Six mois. Il n’aura même pas fallu six mois à notre nouvelle ministre des Finances pour 1) constater l’étendue des dégâts de l’affaire Crédit Suisse, 2) proposer une solution, 3) l’appliquer, et 4) clore le cas. Avec bénéfice.
Évidemment, toute cette affaire reste une honte. Celle de la direction de la banque. Le naufrage d’une banque d’importance nationale laisse un goût très amer. La perte des postes de travail est déplorable et l’on ne peut qu’espérer que les premiers concernés profiteront d’un marché propice à l’emploi. Les créanciers de la banque, les actionnaires, tous ceux qui y avaient cru, se retrouvent bec de gaz. Pour eux aussi, le résultat est révoltant.
Mais la Confédération n’est pas intervenue pour sauver une banque, ses emplois ou ses actionnaires. Pas plus que Berne ne vient à la rescousse de la société Yendi lorsqu’elle dépose le bilan, la Confédération a agi pour et seulement pour éviter que l’effondrement d’une entreprise ne contamine toutes les autres. La fameuse importance systémique. Pour rappel, en 2008, lorsque le gouvernement américain laissait choir Lehmans Brother, c’est l’économie mondiale qui la suivait dans sa chute, causant plus de misère de pauvreté qu’aucune catastrophe naturelle n’a pu faire jusqu’ici.
Bref, Berne a fait le job. Et l’a bien fait. Il n’est pas terminé: le cas Credit Suisse imposera de revoir la réglementation bancaire, corriger ce qui va mal, supprimer ce qui ne sert à rien. Et se préparer au prochain échec: toute entreprise peut disparaître, même les plus grosses.
Après dix mois à la tête du Département des finances, Karin Keller-Sutter a montré toute sa force: une main de fonte dans un gant d’acier. Imperturbable face aux critiques faciles et démagogiques, elle a tenu une ligne qui a payé: elle a sauvé le système financier suisse et même mondial et fait gagner 200 millions de francs à la Confédération au passage. Je relève ainsi, à l’adresse de tous ceux qui l’ont mal jugée, que la ministre a engrangé en trois mois de quoi payer son salaire pour 500 ans. On peut toujours trouver un meilleur grand argentier. Mais il faudra chercher.
A l’inverse, savoir aujourd’hui que le prédécesseur de KKS traitait la question Crédit Suisse avec une légèreté qui confinait au mépris du mépris inquiète. Et devrait nous faire prendre conscience du danger auquel nous avons été exposés. Et souvenons-nous aussi de cette alliance de la carpe et du lapin, de l’UDC et du PS qui, pour des prétextes dogmatiques invraisemblables, ont tenté de torpiller le plan de sauvetage devant les Chambres en avril dernier. Ce sens de l’irresponsabilité de ceux qui participent au gouvernement laisse songeur.