Une majorité du Conseil national a refusé le plan de sauvetage de Credit Suisse. Enfin ça, il faut le dire vite. La banque n’a pas été sauvée, elle va disparaître. Les emplois non plus. Pour elle-même, la banqueroute de Credit Suisse est une affaire privée. Très malheureuse, dommage pour l’image du pays, mais dans le fond du même acabit que celle de Jelmoli ou de Tupperware.
Non, le vrai problème, c’est que Credit Suisse est «too big to fail». Trop grand pour disparaître. L’expérience américaine de Lehman Brothers l’a montré. Lorsqu’un grand institut financier s’effondre, ce sont les citoyens qui paient. Du preneur d’hypothèque au salarié. Des gens qui n’ont rien demandé. Des gens comme vous et moi qui se retrouvent à la rue, perdent leur maison. La plupart des grands pontes de la finance internationale, eux, tirent encore leur épingle du jeu.
Otages du système bancaire?
Personne ne sort indemne d’une grande récession, encore moins les plus faibles. Encore moins l’AVS qui vit des cotisations salariales. Pas davantage les PME qui sortent déjà de deux années de crise. Sommes-nous aujourd’hui les otages de ce système bancaire? Ça fait mal de l’écrire, mais oui. De là à tirer sur l’otage, il y a une étape que seuls les fous sont prêts à franchir.
Ainsi, l’attitude du Conseil national me dépasse. Il faudra bien sûr rendre des comptes. Étudier la responsabilité des dirigeants du Crédit Suisse. Celle de l’autorité de surveillance. Exiger la restitution des bonus indus. Changer la structure des grandes banques ou du moins revoir leur responsabilité. Mais tout cela prend du temps.
La gauche a refusé le plan de sauvetage sous le mauvais prétexte que l’on refusait de réformer l’ensemble du système bancaire à deux heures du matin, en quinze minutes, avant toute enquête sérieuse sur les causes du désastre. Après avoir obtenu gain de cause sur ses revendications aux États, elle a fini par tourner sa veste au dernier vote. Quand les élections approchent, on fait n’importe quoi.
Couche de honte
L’UDC qui tenait le Département des finances, en charge de la surveillance des banques, de 2016 à 2022, a refusé, elle aussi, le sauvetage, sous prétexte que certaines de ses propositions avaient été refusées il y a quinze ans. Leur ministre, malheureusement, n’avait pas plus vu venir la crise que les autres…
Cette année, notre parlement fêtera ses 175 ans. Le cirque de la nuit de mardi soir ajoute une couche de honte à celle de la faillite de Credit Suisse. On a vu les parlementaires se bousculer à la tribune pour se payer quelques secondes de célébrité. Des invectives entre élus hier ignorants, aujourd’hui devenus génies de la finance.
Dans les crises, une once d’humilité n’a jamais fait de mal. Si les remèdes ne sont jamais agréables, les vouer aux gémonies pour se faire mousser est un jeu dangereux auquel le parlement ne nous avait jusqu’ici pas habitué. Il paraît que le vote du parlement était symbolique. Dans ce cas, quel est le sens du symbole? Le choix du chaos? No future? Je préfère ce genre de slogan adolescent dans la bouche de Syd Vicious et des Sex Pistols que dans celle les élus du peuple portant la responsabilité de nos institutions et de nos choix collectifs.