Les élus doivent écouter les scientifiques pour prendre leurs décisions. C’est une des revendications bien légitimes des différents mouvements écologistes. Je crois savoir que nous le faisons. Mais on peut en débattre.
A l’inverse, il serait temps que les scientifiques écoutent aussi les politiques. S’intéressent à ce qui se fait sous la Coupole. Cette semaine, l’actualité a été marquée par le retour des bouchonneurs, ces manifestants délinquants qui bloquent le trafic pour exiger de la Confédération qu’elle adopte des mesures pour améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments. Renovate Switzerland, c’est leur nom, avec un logo pompé de Rivella, on ne sait pas trop pourquoi. Et parmi ces manifestants, au moins une professeure d’université.
Comment comprendre ce décalage complet?
J’imagine que l’action de «désobéissance civile», comme l’appellent des larmes plein les yeux un certain nombre de journalistes qui confondent leur métier avec celui de militant syndical, était prévu il y a fort longtemps. Sinon, comment comprendre le décalage complet avec l’actualité? En septembre, le Parlement a adopté un contre-projet à l’initiative des glaciers.
Si ambitieux que l’initiative sera retirée. Il impose pêle-mêle d’installer des panneaux solaires sur toutes les nouvelles constructions, injecte deux milliards de subsides pour remplacer les chauffages à mazout par des pompes à chaleur, introduit des procédures très accélérées pour réaliser des nouveaux barrages ou des installations photovoltaïques. Et d’ici 2050, les bâtiments ne devront plus émettre de CO2.
Empaqueté, pesé, voté le 30 septembre, l’objet est si ambitieux qu’il est attaqué au référendum par l’UDC. Pour les manifestants, tout cela ne suffit sans doute pas. La dernière fois qu’une frange jusqu’au-boutiste a préféré exprimer dans la rue son refus de tout compromis plutôt que soutenir des solutions pragmatiques, c’est la grève du climat qui a finalement sabordé la loi CO2. Avec l’appui inattendu du pompier pyromane Renovate Switzerland qui parvient à crisper sur un sujet qui suscitait jusqu’ici un consensus, l’UDC peut maintenant espérer marquer un deuxième pénalty contre la politique climatique dans cette législature. Rendez-vous aux votations du printemps 2023.