Philippe Nantermod
Sacrifier les chauffeurs Uber ne peut décemment réjouir personne

Le conseiller national PLR valaisan Philippe Nantermod, membre de l'équipe de chroniqueurs de Blick, déplore la décision du Tribunal fédéral qui a interdit à Uber de continuer ses activités à Genève. Il dénonce un coup de massue pour les chauffeurs concernés.
Publié: 10.06.2022 à 10:50 heures
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Dernière mise à jour: 10.06.2022 à 14:51 heures
Hormis quelques centrales de taxi qui se frottent les mains à l’idée de voir disparaître un concurrent gênant, la décision ne satisfait ni les clients, ni les employés, ni les contribuables.
Photo: keystone-sda.ch
Philippe Nantermod

La décision est tombée comme le couperet de la guillotine. Du jour au lendemain, des centaines de chauffeur Uber ont perdu leur travail. À moins de préférer les règlements aux hommes, personne ne peut décemment se réjouir que des gens perdent leur gagne-pain. Qu’on aime ou pas l’entreprise américaine, synonyme pour beaucoup de misère, force est d’admettre qu’interdire de travailler n’est certainement pas une réponse à la précarité.

Le Tribunal a appliqué la loi, il a fait son travail. Pour que d’autres perdent le leur. On pourra gloser des heures durant sur la qualification du chauffeur Uber. Est-il indépendant, travailleur? Quand considérera-t-on que les paysans qui livrent la Migros sont aussi les employés du géant orange? Vaste question qui fera mouliner des générations d’étudiants en droit. En attendant, ceux qui bossaient pointeront. Et au social, s’il vous plaît.

Le Conseil fédéral a regardé ailleurs

Hormis quelques centrales de taxi qui se frottent les mains à l’idée de voir disparaître un concurrent gênant, la décision ne peut satisfaire personne. Ni les clients, ni les employés, ni les contribuables. Les autorités qui applaudissent donnent l’impression de jeter de la brioche à la figure de ceux qui s’étaient lancés de bonne foi dans une activité pseudo-indépendante.

Qu’on le veuille ou non, le monde numérique a bouleversé nos habitudes, pas qu’en mal. Travailler via une plateforme n’est pas entièrement comparable au métier de bureau, salarié, auquel nous ont habitués les Trente glorieuses. Et peut-être qu’il est grand temps de mettre à jour le droit du travail pour proposer une alternative, quelque chose entre le tout indépendant et le tout travailleur-salarié-syndiqué. Un statut qui assure un minimum de prestations sociales, sans pour autant rendre l’activité économiquement impossible.

Jusqu’à ce jour, le Conseil fédéral a regardé ailleurs, arguant qu’il n’y avait pas de raison d’agir. Peut-être que l’arrêt du Tribunal fédéral nous rappellera que les lois sont aussi faites pour être adaptées à leur époque et réveillera le gouvernement de sa torpeur.

Depuis la publication de cette chronique, un accord a été trouvé entre l'État de Genève et Uber. Les chauffeurs vont pouvoir recommencer à travailler.

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