Il y a ce «mème», cette photo du Titanic qui plonge. Mais par un effet physique, la proue du navire est soulevée des dizaines de mètres au-dessus de la mer. Et passager qui s’y tient s’exprime ainsi: «le bateau ne coule pas, il vole». Bref, tout va bien.
C’est un peu le discours de la gauche face à l’AVS. Depuis 2014, l’AVS perd de l’argent. C’était prévisible: l’augmentation de l’espérance de vie couplée à l’arrivée à la retraite des baby-boomers déploie des effets attendus. Ainsi, voici bientôt dix ans que les recettes de l’AVS, les cotisations salariales, la TVA et les contributions de la Confédération ne couvrent plus les rentes de l’AVS. Ce que nous avons construit depuis 1948, la démographie est en train de le détruire.
Jusqu’ici, quelques bricolages ont été trouvés, qui donnent l’illusion que tout va bien. D’abord, les marchés financiers ont pallié les manques de recettes. Avec 40 milliards de réserves, le capital fait des petits. Mais pas toujours: on peut s’attendre à une correction très importante en 2022 déjà, avec des milliards de pertes à la clef. On a aussi adopté «RFFA» et son augmentation corrective de 0,3% des cotisations salariales. Aide bienvenue qui offre un sursis de trois ans aux retraites. Pas plus.
La réalité est implacable: le bateau prend l’eau et pour que l’AVS ne nous rejoue pas vraiment un remake de Titanic, il faudra corriger sa trajectoire.
La réforme solidifie l’AVS
Pour y arriver, il faut AVS21. Une réforme responsable. Qui évite de renvoyer la patate chaude à la génération suivante, ou même à la législature suivante. On ne s’y était pas trompé: même la gauche de 2017 acceptait déjà d’augmenter l’âge de la retraite des femmes et la TVA.
En pratique, la réforme solidifie l’AVS. Elle garantit les rentes actuelles. Mieux, elle augmente celle des femmes âgées de 55 à 64 ans, jusqu’à 1920 francs par année, excusez du peu. Celles qui le préfèrent pourront toujours prendre la retraite plus tôt, à 62, 63 ou 64 ans, dans de meilleures conditions qu’aujourd’hui. Seules les femmes plus jeunes, celles de mon âge, devront se contenter comme mesure de compensation, de bénéficier d’acquis sociaux solides qui ne reposent pas sur des promesses électorales ou de la spéculation boursière.
Une autre réforme est possible. Une meilleure, pas forcément. Réduire les rentes? Impensable. Prélever l’argent de la BNS? Encore une formule de sorcier dont plus personne ne parle à l’heure où la banque centrale perd 100 milliards de francs sur un semestre. Augmenter les cotisations? Cela coûte plus cher aux salariés que la réforme proposée.
Alors que l’ensemble des pays occidentaux adoptent des réformes comparables à la nôtre, seule une poignée d’Etats (Hongrie, Israël, Pologne et Turquie) maintiennent un âge de la retraite différencié pour les femmes et les hommes. A l’exception d’une gauche qui cherche désespérément un succès dans les urnes à une année des élections fédérales, quitte à sacrifier l’AVS pour cela, les femmes et les hommes de notre pays ont intérêt à réussir la plus importante réforme de la législature.