Cette semaine, l'Europe va connaître de profonds changements politiques. La France et le Royaume-Uni élisent chacun un nouveau gouvernement dimanche et jeudi. Les Britanniques devront choisir un nouveau Premier ministre, les Français un nouveau Parlement. Les deux élections sont certes de nature très différentes, mais elles auront une grande influence sur la politique du Vieux Continent.
Royaume-Uni: «Same but different»
L'actuel Premier ministre britannique Rishi Sunak devra probablement passer le flambeau. Après 14 ans dans l'opposition, le parti travailliste et son actuel leader Keir Starmer pourraient prendre la tête du gouvernement britannique jeudi, si les sondages se confirment. Actuellement, le parti de centre-gauche bénéficie de 40% d'opinions favorables, les conservateurs des Tories de seulement 20%, comme le montrent les sondages représentatifs de la chaîne britannique BBC.
Qu'est-ce qui changera si le Centre-Gauche remplace les conservateurs? Pas grand-chose pour l'instant, du moins pas en politique étrangère. Le chef du Labour Keir Starmer, lui-même autrefois opposé au Brexit, a clairement déclaré qu'il ne reviendrait pas sur la sortie du Royaume-Uni de l'UE. Il souhaite toutefois améliorer les relations avec cette dernière.
Le programme électoral du parti travailliste prévoit d'alléger les contrôles aux frontières afin de réduire le coût des denrées alimentaires, de soutenir les tournées d'artistes et d'encourager la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles. Parmi les changements proposés figure également un nouvel accord vétérinaire avec l'UE, destiné à améliorer les échanges commerciaux.
Sur la question de l'Ukraine, Keir Starmer a aussi annoncé qu'il suivrait la ligne de ses rivaux conservateurs s'il était élu. Le parti travailliste s'est non seulement engagé à maintenir l'engagement du Royaume-Uni au sein de l'OTAN, mais il a aussi fait campagne pour un nouveau «pacte de sécurité» avec l'Europe, même si les détails de ce qu'il pourrait contenir restent vagues.
France: La rupture
Les élections françaises diffèrent en presque tous points des élections britanniques. Dans l'Hexagone, le président Emmanuel Macron a convoqué de nouvelles élections parlementaires début juin après les mauvais résultats de son parti aux élections européennes. Le deuxième tour aura lieu dimanche. Actuellement, ce n'est pas son parti ou sa coalition qui est en tête, mais le Rassemblement national (RN), parti d'extrême droite, dirigé par Marine Le Pen (55 ans).
Si le RN parvient à étendre son influence au Parlement français dimanche, les relations de la France avec l'Europe s'en trouveront fondamentalement modifiées. Le plus gros problème pour le parti est sa position prorusse. Marine Le Pen elle-même a déclaré en 2017 qu'elle «vénérait» le chef du Kremlin Vladimir Poutine. Jordan Bardella, l'élève politique de Le Pen et actuel président du parti, a en outre clairement indiqué qu'il était hors de question que la France envoie des troupes en Ukraine, contrairement à ce que laissait entendre Macron quelque temps plus tôt. De plus, le RN n'a pas encore voté de résolution pro-ukrainienne au Parlement européen.
Si Jordan Bardella, 28 ans, devenait Premier ministre, il pourrait soit mener une guérilla contre Macron, soit tenter de changer l'UE de l'intérieur. Avec le soutien de partis d'extrême droite dans plusieurs pays, le RN pourrait constituer une minorité de blocage au sein du Conseil des ministres de l'UE, orienter le cours de la politique européenne, bloquer l'aide à l'Ukraine et empêcher l'élargissement de l'UE. Cette stratégie pourrait éviter l'isolement de la France, mais aurait de graves conséquences pour l'Europe. Toujours est-il que le parti a entre-temps renoncé à l'idée de faire passer un «Frexit».
Des querelles programmées
La relation entre les deux pays est une histoire tumultueuse et cela ne va probablement pas s'arranger. David Lammy, qui sera probablement le nouveau ministre des Affaires étrangères du Royaume-Uni, a déjà traité Marine Le Pen de «fasciste».
L'un des principaux points de désaccord concernera la traversée de la Manche par les migrants. Certains experts ont fait remarquer qu'un gouvernement d'extrême droite pourrait éventuellement entraîner une augmentation du nombre de traversées vers Londres par de petites embarcations. Pour le dire simplement, un gouvernement français nationaliste, qui souhaite prendre des mesures sévères contre l'immigration, ne s'opposera guère à ce que des migrants quittent la France pour traverser la Manche.