Le Proche-Orient s'embrase
«Si Israël devait faire face à une menace existentielle, il y a un risque qu'il utilise des armes nucléaires»

Ce n'est probablement qu'une question d'heures ou de jours avant que l'Iran ne porte un coup sévère à Israël. Les experts mettent en garde contre une escalade. Le spectre d'une Troisième Guerre mondiale plane même. Quelle est l'ampleur du danger? Blick fait le point.
Publié: 06.08.2024 à 16:12 heures
L'Iran veut passer aux choses sérieuses en matière de représailles après les frappes israéliennes sur son territoire.
Photo: IMAGO/ZUMA Wire
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Guido Felder

Au Proche-Orient, la crainte d'un conflit généralisé augmente. Ce n'est plus qu'une question de temps avant que l'Iran et ses alliés n'attaquent Israël, en guise de représailles après l'assassinat du chef du Hamas Ismaïl Haniyeh à Téhéran et du commandant du Hezbollah Fouad Chokr à Beyrouth.

Parallèlement, la peur d'une Troisième Guerre mondiale grimpe également, car le conflit au Proche-Orient oppose des puissances nucléaires. Quelle est la probabilité que cela dégénère? Comment éviter l'escalade? Blick fait le point. 

Quelle sera la gravité de la guerre qui menace au Proche-Orient?

Les avis sont unanimes: cette fois, l'Iran et ses alliés frapperont plus fort qu'en avril. Dan Smith, directeur de l'International Peace Research Institute (Sipri) à Stockholm, déclare à Blick: «Si Israël devait faire face à une menace existentielle, il y a un risque considérable qu'il utilise des armes nucléaires et provoque ainsi d'énormes destructions et de la misère humaine.»

Michel Wyss, expert à l'Académie militaire de l'EPFZ, part aussi du principe qu'une attaque iranienne serait «probablement plus étendue» qu'en avril. En Israël, on parle d'une attaque qui pourrait durer plusieurs jours. «Il est toutefois difficile de spéculer sur l'ampleur d'un éventuel conflit en raison des nombreuses inconnues», avertit Michel Wyss. Téhéran a fait savoir qu'il voulait punir la mort d'Ismaïl Haniyeh, mais qu'il ne souhaitait pas d'escalade dans la région.

Pourquoi le risque d'une Troisième Guerre mondiale augmente-t-il?

Lors de l'invasion de l'Ukraine par les Russes en février 2022, la crainte d'une Troisième Guerre mondiale était déjà de mise. Jusqu'à présent, le conflit est resté régional, bien que son impact se fasse sentir à l'échelle mondiale. Mais un autre foyer d'incendie vient désormais s'ajouter, impliquant plusieurs grandes puissances.

Les bourses sont un sismographe de l'état de la planète. Et elles font des siennes: lundi, les marchés financiers ont entamé la semaine dans le rouge et ont enregistré des pertes. Et ce principalement en raison de la crainte d'une récession aux Etats-Unis – mais aussi à cause du conflit au Proche-Orient. Le régime iranien a rejeté toutes les tentatives de médiation, notamment de la part de la Jordanie voisine. Il a promis que «les gens dans le monde seraient témoins de scènes intéressantes dans les prochaines heures».

Qui met en garde contre une Troisième Guerre mondiale?

Le ministre israélien des Affaires étrangères Israël Katz voit déjà son pays «au milieu d'une Troisième Guerre mondiale» contre l'islam radical. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky met lui aussi en garde contre un troisième conflit mondial en raison de la situation au Proche-Orient. Plusieurs gouvernements européens évoquent la possibilité d'une guerre directe avec la Russie.

Le président russe Vladimir Poutine prévient également. En mars, il avait déjà déclaré qu'un conflit généralisé avec l'OTAN n'était pas à exclure et que dans ce cas, le monde n'était qu'à un pas d'une Troisième Guerre mondiale.

Dans quelle mesure est-ce réaliste?

Herfried Münkler, politologue qui a également conseillé la chancelière allemande Angela Merkel, qualifie le danger de «réel» sur srf.ch. «Avec deux guerres impliquant des puissances nucléaires, à savoir la guerre en Ukraine avec la Russie et la guerre au Proche-Orient avec Israël, il y a une probabilité qu'une guerre prenne assez rapidement des proportions mondiales et débouche sur une confrontation nucléaire.»

Le risque d'en arriver là est toutefois considéré comme faible par le chef du Sipri, Dan Smith. «Si l'on veut chiffrer le risque, il faut dire qu'il est nettement inférieur à 10%.» Il s'agit d'une guerre que personne ne souhaite. «Les grandes puissances n'aspirent pas à une destruction mutuelle», estime l'expert. 

Theodor H. Winkler, ancien conseiller en sécurité au Département suisse de la défense, estime que «notre période la plus dangereuse» reste à venir. Dans la «NZZ», il affirme qu'une guerre mondiale pourrait être «effectivement à portée de main» en 2027. Cela sera le cas si la Russie l'emporte sur l'Ukraine, si la Chine envahit Taïwan, si tous les conflits graves se poursuivent et si un président américain réélu, Donald Trump, laisse tomber l'Europe.

Comment serait-elle déclenchée?

Le déclenchement le plus probable serait un accident technique ou un mauvais hasard. Dan Smith explique: «Après l'utilisation d'armes nucléaires, les émotions pourraient s'embraser de tous côtés et les suspicions et les hostilités pourraient augmenter, transformant un accident technique en une guerre mondiale.»

Par «accident technique», Dan Smith entend par exemple un dysfonctionnement de logiciel «qui, en raison de malentendus et d'un manque de communication dans une atmosphère d'hostilité et de méfiance mutuelles, se transforme en une catastrophe dépassant nos pires prévisions».

Comment peut-on encore l'éviter?

Selon Dan Smith, il n'y a pas d'autres solutions: «Il ressort de l'évaluation des risques que la priorité la plus urgente est actuellement d'assurer une communication claire entre les grandes puissances dotées de l'arme nucléaire et, si possible, de réduire l'hostilité entre elles.»

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