Les analystes préviennent
La mort d'Ebrahim Raïssi serait «un coup stratégique monumental» pour le régime iranien

En Iran, le président Ebrahim Raïssi et le ministre des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian sont décédés dans un accident d'hélicoptère. Cette perte secoue violemment le régime et annonce un séisme majeur dans le pays, estime un représentant de la résistance.
Publié: 21.05.2024 à 06:06 heures
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Dernière mise à jour: 21.05.2024 à 08:32 heures
Si l'émoi est grand au sein du régime irianien après la mort d'Ebrahim Raïssi, le deuil devrait être plus faible au sein de la population iranienne. Ses adversaires l'avaient d'ailleurs surnommé «le boucher de Téhéran».
Photo: Getty Images
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Guido Felder

Le régime iranien a été ébranlé dans la nuit de samedi à dimanche. Le président Ebrahim Raïssi et le ministre des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian ont tous deux perdu la vie dans un accident d'hélicoptère dans la province d'Azerbaïdjan oriental. La raison pour laquelle l'hélicoptère s'est écrasé n'a pas encore été élucidée. Le matériel de l'armée de l'air iranienne est toutefois considéré comme très vétuste, de nombreux appareils datant d'avant la révolution islamique de 1979.

Ebrahim Raïssi était le numéro deux du pays en tant que président, derrière le chef religieux l'Ayatollah Ali Khamenei. Ce dernier a décrété un deuil national de cinq jours et a appelé à la prière.

Mais si l'émoi est grand au sein du régime, le deuil devrait être plus faible au sein de la population iranienne. Ebrahim Raïssi était en effet considéré comme une marionnette du régime, un homme de main responsable de nombreuses arrestations et exécutions en tant qu'ancien procureur. Ses adversaires l'avaient d'ailleurs surnommé «le boucher de Téhéran» et lui reprochent d'être derrière la mort de 30'000 personnes en 1988.

Ces derniers mois, Ebrahim Raïssi a également fait la une des journaux pour avoir imposé le port du hijab. C'est dans ce contexte que Mahsa Amini avait été arrêtée parce que son foulard était mal ajusté, en automne 2022. Sa mort en garde à vue avait entraîné une vague de protestations sans précédent dans le pays.

Attention au «facteur de déstabilisation»

La mort d'Ebrahim Raïssi est une perte importante pour le régime. Maryam Radjavi, présidente de la Résistance iranienne, élue au Conseil national de la Résistance d'Iran (NCRI) basé à Paris, écrit dans un communiqué que la mort que l'ex-président iranien représente «un coup stratégique monumental et irréparable pour le guide suprême des mollahs, Ali Khamenei, et pour l'ensemble du régime, tristement célèbre pour ses exécutions et ses massacres».

Ali Safavi, un des collaborateurs de Maryam Radjavi, rajoute: «La mort d'Ebrahim Raïssi intervient à un moment où le régime iranien doit déjà faire face à de nombreuses crises internes et externes et est donc extrêmement vulnérable. Cette perte est donc un facteur de déstabilisation.»

En nommant Ebrahim Raïssi président et successeur du modéré Hassan Rohani en 2021, Khamenei souhaitait renforcer le régime pour qu'il puisse résister aux pressions tant internes qu'externes. «Raïssi était considéré comme le candidat idéal pour éliminer les dissidents et garantir une obéissance absolue à la vision de Khamenei», explique Ali Safavi. Sa perte devrait donc être douloureuse pour le leader religieux.

Le ministre des Affaires étrangères a également perdu la vie dans l'accident

Le ministre des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian, également victime d'un accident, était, lui aussi, considéré comme un fidèle du régime, ayant contribué à l'influence des Gardiens de la révolution dans d'autres pays. Il entretenait des relations étroites avec Qassem Soleimani, que Donald Trump – à l'époque président des États-Unis – a fait tuer par un drone en 2020.

Hossein Amir-Abdollahian a également joué un rôle clé dans le soutien aux organisations paramilitaires comme le Hezbollah: «Ses efforts diplomatiques visaient souvent à renforcer ces groupes, à conclure des contrats d'armement et à fournir un soutien logistique. En même temps, il a réussi à donner l'apparence d'une diplomatie légitime sur la scène internationale», explique Ali Safavi.

Ali Safavi est convaincu que cet accident va encore aggraver la crise en Iran, car la mort de Ebrahim Raïssi fait ressurgir les atrocités de 1988 dans la conscience des Iraniens: «Le régime craint que le crash de l'hélicoptère ne devienne un catalyseur pour de nouvelles révoltes qui rappelleraient les protestations généralisées des années précédentes.»

Ebrahim Raïssi était par ailleurs considéré comme un successeur possible de l'ayatollah Ali Khamenei. Désormais, le vice-président Mohammad Mokhber doit désormais organiser, avec le président du Parlement et le chef de la justice, des élections présidentielles anticipées dans les 50 jours: «Le régime doit trouver un successeur approprié qui puisse faire preuve du même degré d'obéissance qu'Ebrahim Raïssi, tout en gérant le mécontentement croissant de la population iranienne», conclut Ali Safavi.

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