Chaque matin, Blick plonge dans le volcan politique français que la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron est en train de faire exploser. Jusqu’au résultat du second tour des législatives le 7 juillet. Un voyage quotidien dans les coulisses du grand jeu du pouvoir, vu de Suisse. Des rires. Des larmes. De l’espoir. Et pas mal de chaos. Bienvenue sur la crête du volcan français. À la «une» ce samedi 22 juin: faut-il dissoudre Emmanuel Macron?
Dans la France en éruption
Macron démission, l’appel de Marine
Jordan Bardella a été entendu. Alors, pourquoi pas Marine Le Pen? A une semaine du premier tour des élections législatives, dimanche 30 juin, la patronne du Rassemblement national (RN) a fait ce que son chef de file aux élections européennes (et candidat au poste de premier ministre) a réussi le 9 juin. Lors de sa campagne, Jordan Bardella avait à plusieurs reprises exigé une dissolution de l’Assemblée nationale en cas de défaite du camp présidentiel. Et il l’a obtenu, puisque Emmanuel Macron a renvoyé les 577 députés devant leurs électeurs dès l’annonce de la nette victoire du RN, avec 31,47% des suffrages contre 14,56% à la liste «Renaissance» conduite par Valérie Hayer. Résultat: Marine Le Pen, candidate dans sa circonscription d’Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais) exige à son tour une «clarification», terme souvent employé par le locataire de l’Élysée. Avec précaution: «Je n’appelle pas Emmanuel Macron à démissionner a-t-elle déclaré vendredi. Je note juste que quand il y a un blocage politique, quand il y a une crise politique, il y a trois possibilités. Le remaniement, la dissolution ou la démission du président. Le remaniement ne m’apparaîtrait pas extrêmement utile. La dissolution vient d’être opérée pendant un an. Il ne restera donc au président que la démission pour sortir potentiellement d’une crise politique.»
Edouard Philippe, Macron m'a tué
Le président de la République se voit comme un sauveur. C’est en tout cas ce qu’il avait expliqué le 12 juin, lors de sa conférence de presse d’explication, après sa décision de dissoudre l’Assemblée nationale. «J’ai pris acte d’un blocage qui conduisait inéluctablement à empêcher le gouvernement d’agir, ce qui devenait dangereux pour la France» avait-il justifié. Problème: son ancien Premier ministre Édouard Philippe l’accuse désormais d’avoir tout sabordé. «C’est le président de la République qui a tué la majorité présidentielle», en décidant de dissoudre l’Assemblée nationale, a-t-il déclaré sur TF1, lors d’un déplacement dans les Hauts-de-Seine. En clair: le naufrage électoral annoncé du camp présidentiel ne peut être imputé qu’au locataire de l’Élysée. Une manière de préserver ses propres chances de se porter candidat à l’élection présidentielle de mai 2027. Avec cette question tout de même: comment motiver ses troupes avec une telle formule? «L’esprit de défaite a toujours été dans les élites», avait asséné Emmanuel Macron. Pas si faux?
Attal et Macron, le tandem disparu
Gabriel Attal l’a dit clairement. «Le 9 janvier, le président de la République m’a nommé. Le 30 juin (date du premier tour), j’aimerais que les Français me choisissent», a affirmé le jeune Premier ministre français devant la presse jeudi 20 juin, alors qu’il était interrogé sur la nécessité ou pas de faire campagne avec le président de la République, compte tenu de l’animosité que ce dernier suscite parmi les électeurs. Et d’ajouter: «C’est la première fois depuis plus de 25 ans que les Français vont choisir un Premier ministre. Évidemment qu’il y aura un avant et un après […] dans la pratique du pouvoir, dans l’équilibre des institutions.» La vérité? En campagne dans sa circonscription du département des Hauts-de-Seine, au sud de Paris, le chef du gouvernement de 35 ans a toutes les raisons d’être amer. Il n’a même pas eu le temps de planter l’arbre rituel des Premiers ministres dans les jardins de l’Hôtel Matignon, et l’échec du pari présidentiel de la dissolution peut lui coûter très cher sur plan politique. On le qualifiait de «bébé» Macron lors de sa nomination. En cinq mois, Gabriel Attal est devenu adulte et il rompt déjà avec le père.
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«Le 1» Hebdo, adieu Manu
Un coup de chapeau au passage à l’hebdomadaire «Le 1», auquel j’ai emprunté le titre de cette chronique. Le magazine dirigé par Éric Fottorino passe en revue, cette semaine, tous les arguments qui font d’Emmanuel Macron le grand responsable de la débâcle politique qu’il a lui-même décidé de clarifier avec la dissolution. Un coup de projecteur politique décapant, de la part d’un journal qui n’a jamais caché sa sympathie pour l’actuel président et sa volonté de réformer la France. «Nous avons suivi avec curiosité et intérêt d’abord, enthousiasme parfois, ce qu’il faut bien appeler l’aventure macronienne, avant, peu à peu, comme bien d’autres, de déchanter devant les paroles et les actes de ce jeune président dont la manière d’agir allie, un pouvoir concentré et autocentré», argumente l’éditorial. Et d’asséner: «En marche, Emmanuel Macron l’est resté, mais pas dans la direction espérée.» Avant de citer un fameux refrain: «Cela n’est rien, Madame la marquise, Cela n’est rien, tout va très bien. Pourtant, il faut, il faut que l’on vous dise, On déplore un tout petit rien: elle a péri dans l’incendie.»
Alexis Kohler, Docteur Folamour
Il était sur la photo. La fameuse photo diffusée dans la soirée du dimanche 9 juin, montrant Emmanuel Macron en train d’annoncer la dissolution à ses interlocuteurs, tous les visages défaits. Le président remplissait son devoir constitutionnel de consulter la présidente de l’Assemblée nationale, le Premier ministre et le président du Sénat avant de renvoyer les députés aux urnes. Mais qui lui a soufflé cette idée et ce calendrier potentiellement explosif, à un mois de l’ouverture des Jeux olympiques d’été pour lesquels il proposait une trêve? Un homme était ce soir-là assis à ses côtés: le secrétaire général de l’Élysée Alexis Kohler. Un pur haut fonctionnaire, lié sur le plan familial à la famille Aponte, propriétaire du géant maritime MSC basé à Genève. Kohler était avec Macron au ministère de l’Économie, sous François Hollande. Il est devenu son ombre à l’Élysée depuis 2017. Et son docteur Folamour en politique?