Arrivée à Mayotte
Marine Le Pen a cinq bonnes raisons de détester 2025

Onzième personnalité préférée des Français, La patronne du Rassemblement national s'est rendue dans l'île sinistrée de Mayotte. Mais à quelques semaines du jugement dans son procès pour détournements de fonds publics, 2025 a de quoi l'inquiéter.
Publié: 05.01.2025 à 14:00 heures
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Dernière mise à jour: 09:36 heures
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Le 31 mars, Marine Le Pen saura si elle est, ou non, condamnée à une peine d'inéligibilité avec exécution immédiate. Ce qui l'empêcherait de se présenter à la prochaine présidentielle.
Photo: keystone-sda.ch
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Richard WerlyJournaliste Blick

Pas question de voir sa carrière être dévastée par le cyclone judiciaire, comme Mayotte l'a été par le cyclone Chido. Arrivée ce dimanche 5 janvier dans l'île dévastée de l'océan Indien, Marine Le Pen, 56 ans, déjà trois fois candidate à l’élection présidentielle française (2012, 2017, 2022), doit absolument faire de 2025 sa rampe de lancement pour la conquête finale de l’Élysée. Avec, comme arme de persuasion massive, sa cote de popularité: la patronne du Rassemblement national (RN) est, dans le dernier baromêtre de l'IFOP, la onzième personnalité préférée des Français. Seuls deux politiques sont dans le TOP 20: son dauphin Jordan Bardella en dixième position, et elle juste derrière.

C’est en mai 2027, sauf départ anticipé d’Emmanuel Macron, que les électeurs choisiront un nouveau président. Mais c’est maintenant que la patronne du Rassemblement national (RN) doit prouver aux Français et à tous ses rivaux, qu’elle est la plus forte et qu’elle pourra enfin briser le «plafond de verre» qui l’a vu échouer deux fois consécutivement au second tour: en 2017 (33,9% des voix) et en 2022 (41,5%).

Problème: cette année 2025 s’annonce aussi prometteuse que détestable pour Marine Le Pen. Voici pourquoi.

2025 et le risque judiciaire

C’est l’obsession de Marine Le Pen. Et on la comprend. Depuis le réquisitoire prononcé contre elle par le parquet le 18 novembre, dans l’affaire de «détournements de fonds publics» via l’utilisation frauduleuse par le Rassemblement national d’assistants parlementaires européens, l’ex-candidate à la présidentielle sait que sa carrière politique dépend d’une date: le 31 mars. Date à laquelle le tribunal correctionnel de Paris rendra son jugement et la déclarera ou non coupable d’avoir commandité une opération de détournement de fonds européens, à hauteur de 7 millions d’euros.

Question cruciale: si sa culpabilité est reconnue, les juges décideront-ils de lui infliger la peine de cinq ans d’inéligibilité avec «exécution immédiate» (non suspendue en cas d’appel) requise par le procureur? Si oui, la femme politique la plus puissante de France devra quitter son mandat de députée du Pas-de-Calais et renoncer à se présenter en 2027. Un tremblement de terre.

2025 et le danger Bardella

Jordan Bardella, 29 ans, est le poulain politique de Marine Le Pen. Le très jeune président du Rassemblement national, fort du succès de sa liste aux élections européennes du 9 juin (31,4% des voix, presque le double du parti présidentiel Renaissance), est en plus le candidat désigné par cette dernière pour le poste de Premier ministre, si elle remporte le scrutin présidentiel.

Comment est-il possible, dans ces conditions, de représenter un risque pour la patronne du parti? Tout simplement parce que Jordan Bardella dispose maintenant d’une popularité propre (il est plus populaire que Marine dans l’électorat RN, et arrive en première place des hommes politiques préférés des Français), et parce que la nature a horreur du vide.

Si Marine Le Pen est déclarée inéligible, il faudra bien la remplacer. Et pas seulement: le jeune prodige a, au lendemain du réquisitoire dans le procès tant redouté, fixé comme règle de «ne pas avoir de condamnation à son casier judiciaire pour porter les couleurs de son parti à la présidentielle». Une attaque directe.

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2025 et l’hypothèse Bayrou

Ces deux-là se connaissent. Et ils ont subi des ennuis judiciaires comparables ces dernières années. Le nouveau Premier ministre français François Bayrou a, lui aussi, été poursuivi pour «détournements de fonds publics» via l’utilisation frauduleuse par son parti d’assistants parlementaires européens. Différence importante toutefois: il a été relaxé faute de preuves le 5 février 2024, alors que plusieurs autres accusés étaient condamnés. Le parquet a depuis fait appel, ce qui pourrait augurer d’un nouveau procès.

Résultat: Bayrou le centriste, homme du terroir, respectueux des électeurs du Rassemblement national, a téléphoné à Marine Le Pen durant le procès de celle-ci. Et après? Les faits sont simples. Le Rassemblement national peut, s’il joint les voix de ses députés à celles de la gauche, faire tomber le gouvernement Bayrou à tout moment. Mais s’il le fait, Le Pen deviendra synonyme d’instabilité. Un sacré risque.

2025 et le sniper Macron

Emmanuel Macron n’a jamais raté Marine Le Pen. A chaque fois, depuis que ces deux-là se défient sur le terrain électoral, le président français a fait mouche. Il a éliminé son adversaire du RN en 2017 après l’avoir terrassée, lors d’un débat où l’incompétence de cette dernière est apparue crûment. Bis répétita en 2022, à nouveau après un débat durant lesquels la patronne du RN n’a jamais réussi à le déstabiliser.

Macron est un sniper anti-Le Pen. Il sait où viser. Il sait quand tirer. Il tape juste, en misant sur le refus majoritaire des Français de confier les rênes du pays à l’extrême-droite. Aux législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet 2024, tout a failli basculer. Puis une union de tous les autres partis désignée comme un «Front Républicain» a permis d’enrayer le succès massif programmé du RN. Attention aux nouveaux tirs.

2025 et l’ombre du patriarche

Jean-Marie Le Pen a 96 ans. Le père de Marine Le Pen est l’ombre qui peut tout changer, s’il venait à décéder. Son état de santé ne lui a pas permis d’assister au procès pour «détournement de fonds publics» dont il est l’un des coaccusés. Sa disparition ne modifierait rien sur le plan politique. Sa fille a su prendre ses distances avec succès, vis-à-vis de ce «menhir» (son surnom) dont toute la carrière politique à l’extrême-droite a eu un parfum de scandale et des relents putschistes antirépublicains. Reste que sa disparition entraînerait, de facto, des bouleversements au sein du clan Le Pen.

Marion Maréchal, 35 ans, la nièce de Marine Le Pen, a rejoint le RN après les élections européennes de juin. Jordan Bardella peut réclamer sa part de l’héritage familial, après avoir été en couple avec Nolwenn Olivier, la fille de l’autre sœur de Marine, Marie-Caroline, battue de justesse aux législatives dans la Sarthe. Le séisme familial aura-t-il lieu?

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