C’est un cri du cœur qui va faire des vagues. «Le peuple de Gaza a besoin de nous et de vous!» Dans un courriel interne au Parti socialiste (PS), que Blick s’est procuré, 94 «camarades» de tout le pays pressent leurs élus nationaux pour qu’ils agissent en faveur de la Palestine.
Ce brûlot, adressé le vendredi 1er mars à la conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider, au conseiller fédéral Beat Jans, ainsi qu’à tous les conseillers nationaux et conseillers aux États du parti à la rose, ne tombe pas du ciel. Lors du Congrès du 24 février au Grand-Saconnex à Genève, les délégués ont voté une résolution sur le Proche-Orient.
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Une prise de position défendue notamment à la tribune, avec émotion, par le sénateur du bout du Léman Carlo Sommaruga, qui appelait même au boycott de l’Etat hébreu. Conséquence? Les signataires estiment que «la base du parti» souhaite que ce dernier se positionne «courageusement et clairement sur la gravissime situation en Palestine».
La Suisse «doit reconnaître» la Palestine
Cela ne serait pas le cas aujourd’hui. «Depuis cinq mois, nous sommes toutes et tous témoins de l’horreur, peut-on lire dans le mail en question. Tous les jours, sous nos yeux, dans les médias et sur les réseaux sociaux, la population gazaouie partage en direct et de l’intérieur le massacre continuel qu’elle subit. Face à l’urgence de la situation, le silence du Conseil fédéral et d’une grande majorité des élu-es fédéraux socialistes est intolérable et ne peut plus durer!»
Parmi les signataires, plusieurs noms bien connus du milieu politique romand. Romain Pilloud, député au Grand Conseil vaudois et président de la section cantonale. Garance La Fata, députée au Grand Conseil neuchâtelois. Sylvain Thévoz, député au Grand Conseil genevois. Mountazar Jaffar, conseiller communal (législatif) à Lausanne. Patricia Spack Isenrich, députée au Grand Conseil vaudois et syndique de Bussigny. Jean-Charles Rielle, député au Grand Conseil genevois et ancien conseiller national. Laurie Willommet, conseillère municipale (exécutif) à Vevey. Ou encore Marlyne Andrey-Berclaz, députée au Grand Conseil valaisan.
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Leur argumentaire s’articule autour de quatre revendications précises:
- «La Suisse doit appeler à un cessez-le-feu permanent à Gaza, l’acheminement d’une aide humanitaire urgente, ainsi qu’exiger la levée du siège de Gaza.»
- «La Suisse doit soutenir l’action de l’UNRWA et renforcer son financement.»
- «La Suisse doit soutenir la procédure de l’Afrique du Sud à la CIJ et contribuer activement à la mise en œuvre de la décision du 26 janvier 2024 d’obtenir le respect du droit humanitaire de la part de l’État d’Israël.»
- «La Suisse doit suspendre immédiatement sa collaboration militaire avec l’État d’Israël jusqu’au respect de ce dernier du droit international, c’est-à-dire l’arrêt de la colonisation de la Cisjordanie, la fin de l’occupation des territoires occupés par Israël.»
La déclaration ne s’arrête pas là. «La Suisse doit reconnaître le droit à l’autodétermination de la population palestinienne dans son ensemble, lancent les militants. Cela se traduit par la reconnaissance de l’État de Palestine.» À ce jour, 139 Etats ont sauté le pas. Mais pas la Suisse.
«Une guerre génocidaire»
Pire, toujours selon les militants: «Jusqu’à maintenant, aucune mesure contraignante n’a été prise par la Suisse contre l’Etat d’Israël pour mettre un terme à la guerre génocidaire qu’il est en train de commettre contre le peuple palestinien. Alors qu’en 2022, à la suite de l’attaque de la Russie contre l’Ukraine et de l’occupation russe de l’Ukraine, la Suisse, en raison de la violation du droit international, du droit international humanitaire et des crimes de guerre commis par l’occupant, a adopté divers paquets de mesures financières et matérielles envers la Russie.»
Les signataires s’interrogent: «Qu’attendons-nous en tant que socialistes pour exiger haut et fort l’application par la Suisse de telles mesures contre Israël qui viole gravement le droit international humanitaire depuis des décennies et commet les horreurs actuelles? Qu’attendez-vous en tant que qu’élu-es socialistes pour contester cette politique du deux poids deux mesures qui ruine nos valeurs socialistes et celles dont se revendique notre pays?»
Pour eux, il ne fait aucun doute. Leurs représentants aux Chambres fédérales et au sein du gouvernement doivent se mouiller: «Vous, conseillère et conseiller fédéraux socialistes, vous, conseillères et conseillers aux Etats socialistes, vous, conseillères et conseillers nationaux socialistes, camarades, vous avez le pouvoir de porter à Berne la voix que la base militante a exprimée haut et fort lors du dernier congrès.»
Risque de «famine de masse»
Pour mémoire, le 7 octobre, une attaque terroriste était menée par le Hamas. Cet assaut d’une violence sans précédent dans le sud d’Israël avait entraîné la mort d’au moins 1160 personnes, en majorité des civils.
De l’autre côté, depuis le début de la guerre, près de 30’000 palestiniens — là aussi très majoritairement des civils — auraient été tués, d’après les chiffres du Hamas. La situation humanitaire ne cesse d’empirer dans le territoire palestinien où 2,2 millions de personnes, soit l’immense majorité de la population, sont menacées d’une «famine de masse», selon l’ONU, citée par Keystone-ATS.