Souvenez-vous, le week-end dernier. La Suisse se demandait quelle mouche avait piqué son Conseil fédéral. «Nos conseillers fédéraux ont-ils perdu la raison?», pestait notamment le conseiller national UDC saint-gallois Mike Egger. Et pour cause, la Confédération a indiqué qu'elle se procurerait à partir de cette année un billet permanent pour les Remontées Mécaniques Suisses pour chaque conseiller fédéral. Coût: 4324 francs par sésame. De là à dire que le gouvernement fait du ski aux frais du contribuable, il n'y a qu'un pas!
Bien entendu, cette information n'a pas fait l'unanimité. Mike Egger reproche au gouvernement d'avoir une «mentalité de self-service»: «S'offrir encore un abonnement de ski avec un salaire de plus de 470'000 francs, alors que la ministre des Finances Karin Keller-Sutter a laissé entrevoir un paquet d'économies, témoigne malheureusement d'une certaine arrogance», résume le politicien qui n'est de loin pas le seul à se montrer critique.
Même Viola Amherd était sceptique
En réalité, même la toute nouvelle présidente de la Confédération Viola Amherd aurait eu des doutes quant à la pertinence d'une telle acquisition, murmure-t-on à Berne. La conseillère fédérale du Centre aurait compris que de tels privilèges ne seraient pas bien accueillis si le Conseil fédéral appelait en même temps à faire des économies. Mais la majorité gouvernementale est arrivée à une autre conclusion.
Pour ne rien arranger, avec un prix moyen d'environ 70 francs pour une journée sur les pistes, les conseillers fédéraux ne pourront guère rentabiliser leur sésame. Pour que l'abonnement soit rentable, les magistrats devraient rester plus de 60 jours sur les lattes. Difficile d'imaginer un conseiller fédéral, comme n'importe quel autre travailleur d'ailleurs, s'offrir autant de journées au grand air pendant la saison d'hiver.
Le Conseil fédéral tient à faire du ski
Mais qu'à cela ne tienne! Le Conseil fédéral tient mordicus à son abonnement de ski. Jusqu'à présent, les Remontées Mécaniques Suisses avaient mis gratuitement à disposition une carte permanente. Mais après l'ouverture d'une enquête pour octroi d'avantages dans un cas similaire dans le canton du Valais, le Conseil fédéral a décidé de trouver un autre moyen d'aller sur les pistes. C'est désormais le contribuable qui doit payer.
Bien que le Conseil fédéral est d'avis «qu'il n'y a pas eu de conflits d'intérêts dans cette affaire par le passé», le gouvernement a opté pour cette nouvelle solution à la suite de discussions publiques dans les cantons, explique la Chancellerie fédérale à Blick. Et ce dernier de préciser au passage: «Il n'est pas prévu que le Conseil fédéral revienne sur sa décision.»
Une liste de privilèges
Rappelons que les membres du gouvernement profitent aussi d'un AG CFF gratuit en 1ère classe et d'un billet permanent gratuit supplémentaire de l'Union des transports publics (UTP), qui couvre aussi les entreprises de transports publics privées. Ce dernier sera à leur disposition pour la dernière fois en 2024, mais le flou demeure sur ce que le contribuable devra payer à l'avenir.
Après tout, un abonnement aux remontées mécaniques n'est de loin pas le seul privilège dont le Conseil fédéral bénéficie. Contrairement au Parlement, il a notamment droit à une compensation du renchérissement pour 2024. En outre, alors que la rente de veuve à vie doit être supprimée pour le peuple, les conseillers fédéraux et leurs proches bénéficieront là aussi d'un régime spécial.