Le Département de la défense de Viola Amherd veut imposer aux femmes une journée d'information obligatoire à l'armée. La conseillère fédérale du Centre l'a annoncé ce mercredi au Conseil des Etats. Des travaux en ce sens auraient déjà été lancés et des plans concrets devraient être présentés d'ici 2024.
Pour la politicienne argovienne PLR Maja Riniker, c'est la moindre des choses. «Ce n'est pas trop demander que d'investir une journée dans la sécurité de notre pays», estime-t-elle. Du côté des Verts en revanche, la Zurichoise Marionna Schlatter craint que les femmes ne doivent «simplement combler les lacunes dans les effectifs».
Il manquera bientôt près d'un quart des effectifs
Seulement voilà, l'armée manque de soldats. De moins en moins de Suisses effectuent leur service militaire. A tel point qu'«à la fin de la décennie, il nous manquera environ un quart des effectifs», déclarait à Blick le chef de l'armée Thomas Süssli. Cela représente environ 30'000 soldats. Du côté de la protection civile, la situation n'est guère plus réjouissante.
Le Conseil fédéral examine donc deux variantes pour remédier à cette problématique. L'une prévoit que le service civil et la protection civile fusionnent. L'autre souhaite étendre l'obligation de servir aux femmes. Mercredi, le Conseil des Etats a donc pris connaissance des rapports du Conseil fédéral. Et selon Viola Amherd, quelle que soit la solution choisie, la journée d'information pour les femmes doit en tout cas être obligatoire.
Une contrainte prématurée?
Au Parlement, les projets sont très controversés. Maja Riniker serait même favorable à une obligation générale de servir. «Mais ce n'est pas encore à l'ordre du jour», concède-t-elle. Pour elle, il est juste de faire d'abord un premier pas. La conseillère nationale du Centre Ida Glanzmann estime quant à elle que «faire l'armée doit rester une démarche volontaire pour les femmes».
A gauche, on se montre nettement plus critique. Car les femmes peuvent déjà s'engager dans l'armée si elles le souhaitent, poursuit Marionna Schlatter. «On peut d'ailleurs aussi se poser la question de savoir pourquoi presque aucune ne le fait», glisse-t-elle au passage.
Récemment, le Département de la défense avait annoncé des mesures pour rendre l'armée plus attrayante aux yeux des femmes. «Comme cela ne fonctionne apparemment pas, on passe à la phase suivante qui est celle de la contrainte, commente Franziska Roth, conseillère nationale socialiste. Cela donne l'impression que Viola Amherd va un peu vite en besogne.»
«Une absurdité totale»
Le problème est que le sujet est lu sous le prisme de l'égalité homme-femme, poursuit Franziska Roth. «Mais ceux qui réclament l'égalité des droits dans l'armée sont les mêmes qui s'opposent à l'égalité des salaires», ajoute-t-elle.
«Bien sûr, l'égalité n'est pas encore atteinte dans de nombreux domaines, répond la PLR Maja Riniker. Mais ce n'est pas une raison pour rester les bras croisés.» Si les femmes veulent vraiment atteindre l'égalité, «nous devons aussi parfois tendre la main, sinon, nous ne l'atteindrons jamais», ajoute la Centriste Ida Glanzman.
La socialiste Franziska Roth ne se laisse pas convaincre pour autant. «La conseillère fédérale Viola Amherd veut modifier la Constitution pour une seule journée d'information. C'est une absurdité totale», juge-t-elle. L'introduction d'une obligation nécessiterait en effet une modification de la Constitution fédérale, et donc une votation populaire. «Je me réjouis déjà de cette campagne de votation», lâche-t-elle. Le sujet n'est pas près d'arrêter d'agiter la classe politique...
(Adaptation par Thibault Gilgen)