Un an après la décision en faveur de l'achat des nouveaux avions de combat F-35, la ministre de la Défense, Viola Amherd, se retrouve en mauvaise posture. Des semaines avant la décision, il était déjà clair que le Conseil fédéral opterait pour ces avions-là. Ces jets furtifs étasuniens ne sont pas seulement les meilleurs, mais aussi les plus avantageux des quatre offres qu'a reçu la Confédération, martelait alors l'élue.
Et cela aurait déplu... à la France. Nos voisins, qui proposaient leur Rafale face au F-35, se sont sentis lésés. Et pas tant par la décision finale que parce que l'on lui aurait donné de faux espoirs. En effet, peu avant que la décision ne tombe, le Conseil fédéral aurait à nouveau sollicité Paris, dans une optique d'achat contre des contreparties politiques – cela alors que le dévolu de la Confédération était jeté sur les F-35 depuis longtemps. La France s'est sentie flouée.
Viola Amherd savait
Face à cela, Viola Amherd et son département de la défense, le DDPS, se lavent les mains. «Si de telles négociations ont eu lieu, c'est à l'insu de la cheffe du département et du DDPS», avait affirmé le département dans une prise de position. La Valaisanne a par ailleurs accusé le ministre des Finances, Ueli Maurer, et le ministre des Affaires étrangères, Ignazio Cassis, d'avoir mené ces pseudo-négociations tardives dans son dos.
Or, il n'en est rien. Une enquête menée par la radio SRF met en doute les déclarations de la ministre. En réalité, une semaine avant le choix du type d'avion, le Conseil fédéral aurait demandé à la France, qui avait en fait déjà perdu l'affaire, de lui confirmer qu'elle était prête à faire des contreparties politiques si la Suisse achetait l'avion de combat français Rafale. Le gouvernement aurait commandé cette lettre, déclarée secrète, au ministre des Finances. Ce dernier se serait adressé à son homologue français, Bruno Le Maire. Cerise sur le gâteau: Viola Amherd était présente lors de la prise de décision!
Paris en colère, le DDPS se tait
La France aurait fourni cette confirmation, avec deux promesses: d'une part, Paris s'est montré prêt à verser à huit cantons suisses une part plus importante des recettes fiscales provenant des salaires des frontaliers. Selon les estimations, cela aurait rapporté 3,5 milliards de francs sur dix ans. Deuxièmement, Bruno Le Maire aurait assuré que la France soutiendrait à l'avenir la Suisse dans tous les dossiers de politique européenne. La SRF, dévoilant cela, se réfère à quatre sources indépendantes.
Une fois le pot aux roses découvert, Paris aurait réagi de manière brusque, rompant toutes les relations diplomatiques de haut niveau avec la Suisse. Le désaccord entre Berne et Paris perdure encore aujourd'hui. Cela est également lié à des déclarations ultérieures du DDPS de Viola Amherd, rapporte SRF.
Le DDPS ne veut pas s'exprimer sur cette affaire. «Comme les séances du Conseil fédéral sont confidentielles, nous ne pouvons pas nous prononcer sur ces questions», botte en touche le chef de la communication, Renato Kalbermatten.