Linus Looser sur les défis des CFF
«Nous allons proposer plus de trains de nuit et un meilleur site internet»

Il occupe le deuxième poste le plus important des CFF et est considéré comme un potentiel successeur du CEO, Vincent Ducrot. Linus Looser explique comment la compagnie veut améliorer les déplacements en train et développer ses services pour les voyageurs. Interview.
Publié: 22.07.2022 à 06:28 heures
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Dernière mise à jour: 22.07.2022 à 07:05 heures
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Linus Looser, responsable Production et Voyageurs chez les CFF, a accordé une interview à Blick sur des sujets brûlants liés au trafic ferroviaire.
Photo: Philippe Rossier
Ulrich Rotzinger

Les deux ans de pandémie de Covid-19 et le chaos actuel dans les aéroports vont-ils booster l’usage du train? Linus Looser, le responsable Production et Voyageurs des CFF, parfois considéré comme le numéro 2 de la compagnie, en est convaincu. En plus d’être plus respectueux du climat, le train serait une alternative beaucoup moins stressante et plus fiable pour les voyageurs.

Blick: Le chaos règne dans les aéroports européens. Les voyageurs prennent-ils davantage le train, du coup?
Linus Looser: Nous remarquons que la demande en trafic ferroviaire international longue distance augmente fortement. Nous sommes pratiquement revenus au niveau record de 2019.

Malheureusement, de nombreuses liaisons vers l’étranger sont actuellement complètes...
Nous avons de très bons niveaux de réservation. En été, les trains de nuit sont totalement complets certains jours. C’est pourquoi nous recommandons aux voyageurs de partir en semaine, par exemple le mardi ou le mercredi, car les réservations le week-end sont toujours très prisées.

Est-il vrai que les billets de train de nuit en voiture-couchettes pour Hambourg ou Berlin ne sont plus disponibles depuis le printemps pour l’été, et même l’automne?
Comme il s’agit de destinations classiques parmi les longs voyages vers le nord de l’Allemagne, presque toutes les places sont complètes jusqu’à la mi-août. À partir de la mi-octobre, des places sont à nouveau disponibles pour toutes ces destinations.

Pourriez-vous ajouter quelques de wagons supplémentaires pour que tout le monde ait de la place?
Actuellement, toutes les voitures-lits et voitures-couchettes disponibles sont en service, c’est pourquoi nous ne pouvons pas réagir à court terme à la demande existante. De plus, nous traversons différents pays avec des quais de différentes longueurs. C’est pourquoi la longueur maximale des trains est prédéfinie.

Pourquoi n’élargissez-vous pas l’offre avec plus de liaisons?
Les chiffres sont bons, c’est pourquoi nous renforçons l’offre vers Hambourg et Berlin au changement d’horaire 2022-2023 avec des capacités supplémentaires. Ensuite, nous lancerons également une nouvelle offre via Leipzig, Dresde et jusqu’à Prague. En 2024, nous mettrons sur les rails de nouveaux trains de nuit en collaboration avec les chemins de fer autrichiens ÖBB. Comme le financement n’est pas encore résolu, il n’y a pas encore d’offre de train de nuit vers Rome ni Barcelone.

Qu’allez-vous développer en Suisse?
L’année prochaine, nous proposerons un train direct Genève-Coire le week-end, qui reliera la Suisse romande aux Grisons. En été, nous adapterons l’offre au Gothard: nous aurons alors davantage de trains pour le Tessin le vendredi et le dimanche pour les retours. Nous allons également relier directement la Suisse orientale à Interlaken et nous adapter ainsi aux nouveaux besoins du trafic de loisirs.

La rareté de l’offre est une chose, mais il y a aussi les problèmes de réservation sur le site internet des CFF lorsqu’on essaie d’acheter des billets pour l’étranger. Pourquoi est-ce si compliqué?
Nous ne sommes pas encore satisfaits du système de réservation actuel. L’achat de billets y est vraiment un défi. C’est parce que chaque pays a ses propres moyens de distribution. Mais on travaille actuellement à la création d’une plate-forme unique et intégrée.

Lorsqu’on n’arrive pas à réserver sur Internet, la seule solution qui reste est de se rendre aux guichets. Or vous poussez actuellement pour les démanteler. Cela a-t-il un sens?
Ce n’est pas comme si nous ne proposions plus aucun service de conseil. Le conseil et l’accompagnement des clients sont et restent très importants pour nous. Mais nous constatons aussi qu’environ 5% seulement de tous les billets sont encore achetés au guichet. Le reste est vendu en ligne ou via des distributeurs automatiques. Les billets difficiles à acheter et les conseils sont toujours disponibles dans nos centres de voyages.

Mais les clients doivent parcourir de plus longues distances pour trouver le centre de voyages le plus proche...
C’est tout à fait possible. Mais nous ne pouvons pas nous fermer aux réalités du marché. Ceux qui ne souhaitent pas se rendre dans un centre de voyages peuvent s’adresser à notre centre d’assistance téléphonique à Brigue, 24 heures sur 24, y acheter leurs billets et se les faire envoyer gratuitement à domicile.

Combien de guichets actifs aurez-vous encore à la fin de l’année?
Actuellement, nous exploitons environ 140 centres de voyages. Nous constatons que la clientèle se rend de plus en plus dans les grands centres, car nous pouvons y proposer des heures d’ouverture plus longues et des conseils aux heures creuses. Le réseau de succursales est contrôlé en permanence. Là où la demande diminue, nous étudions la transformation en stations avec libre-service, en discussion avec les cantons. À la fin de l’année, nous aurons probablement encore 130 guichets.

Quelqu’un qui veut réserver une place assise dans une voiture-restaurant doit pourtant encore le faire via le guichet, car cela n’est pas possible en ligne...
C’est vrai. Cela dit, on peut aussi réserver une place dans la voiture-restaurant par téléphone via le centre de contact. Mais nous sommes en train de mettre en place et d’introduire un nouveau système de réservation. Notre objectif est d’améliorer nettement la convivialité, de sorte que les réservations et les billets puissent par exemple être achetés en une seule étape et que les annulations soient possibles.

Combien de temps devrons-nous attendre pour cela?
Les optimisations, y compris le nouveau système de réservation, se feront par étapes. Les premières améliorations seront apportées pour la nouvelle saison en 2023, puis la deuxième étape fin 2023.

Il n’est pas encore possible de réserver et d’acheter des billets internationaux via l’app CFF. Quand cela sera-t-il possible?
Fin 2023, nous aurons sur notre site les destinations Allemagne et France pouvant être réservées en ligne dans le nouveau système. L’Italie et l’Autriche suivront, y compris les trains de nuit. Nous travaillons également d’arrache-pied à la connexion de l’application.

Le site d’achat en ligne des CFF est considéré comme obsolète, les comparaisons de prix ne sont pas possibles. Votre chef, Vincent Ducrot, qualifie la billetterie internationale de point faible…
Je peux vous assurer que nous travaillons dur sur le thème de la billetterie internationale. La nouvelle plate-forme est déjà active pour les voyages en France et pour la recherche de tarifs économiques vers l’Allemagne. De plus, nous travaillons actuellement à l’activation de la fonction «Prix minimum» lors d’une recherche d’horaire pour la France et l’Allemagne. Cela permet aux clients de voir directement les prix les plus avantageux disponibles pour la liaison demandée.

Le camp fédéral des scouts (ndlr: le BuLa) approche, d’autres événements suivront. Êtes-vous préparés à ce trafic supplémentaire?
Cet été, nous mettons 700 trains supplémentaires sur les rails. Pas seulement pour de grands événements comme le BuLa, mais aussi pour la Fête de la lutte suisse et des jeux alpestres, les Swiss Skills à Berne et les Championnats du monde d’unihockey. Ce sera un été intense pour les CFF.

Ne manquez-vous pas de mécaniciennes et de mécaniciens pour cela?
Les goulets d’étranglement que nous avons connus par le passé sont heureusement de l’histoire ancienne. Nous avons à nouveau suffisamment de personnel de locomotive, les places de formation sont toutes occupées. Les jours de pointe et avec 130 trains spéciaux rien que pour le BuLa, nous devons bien sûr encore chercher et veiller à pouvoir rassembler suffisamment de personnel.

La crise énergétique et le renchérissement des pièces de rechange pour le matériel roulant ont-ils des répercussions sur le résultat annuel du chemin de fer?
Tout à fait. Comme les chaînes d’approvisionnement ne fonctionnent pas correctement, nous avons délibérément décidé de remplir nos stocks de pièces de rechange, par exemple des jeux de roues en acier. La garantie de cette disponibilité a toutefois un prix. Le renchérissement des matières premières également. Pour l’ensemble de l’année, nous ne nous attendons pas à des chiffres profondément rouges, mais il y aura probablement une perte. Notre situation financière reste très tendue.

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