La maîtrise des coûts de la santé est «une impasse». Selon Walter Stüdeli, ce n'est pas un problème si tout devient plus cher, tant que la qualité est au rendez-vous. C'est la déclaration préférée d'un lobbyiste bernois bien connu dans le domaine de la santé dans la Berne fédérale. Il s'appelle Walter Stüdeli, est politologue et économiste et est actuellement un homme très demandé, car il parvient à faire tourner la Berne fédérale.
Son dernier coup d'éclat: il organise la tempête des physiothérapeutes dans la Berne fédérale. L'association Physioswiss, qui dirige la profession, veut remettre au ministre de la Santé Alain Berset 100'000 signatures de protestation d'ici novembre. Objectif: que l'Office fédéral de la santé publique annule une réforme des tarifs de la physiothérapie.
Toujours plus de coûts
Le «petit» cas de la physiothérapie montre de manière exemplaire pourquoi, dans l'assurance maladie obligatoire, toutes les réformes sont vouées à l'échec. Et ce, depuis des années. Avec pour conséquence que les assurances maladie doivent supporter toujours plus de coûts et les répercutent sur les assurés.
Les primes d'assurance maladie ne cessent d'augmenter: 8,7% de hausse en moyenne annoncée il y a quelques jours. En chiffres absolus, la prime augmente de 23,80 francs pour atteindre 427 francs – une valeur record des deux dernières décennies.
Des séances de physios raccourcies
Que veut l'office fédéral dans le cas des physios? Il veut moderniser la facturation. Jusqu'à présent, un forfait par séance était appliqué. Nulle part n'était précisée la durée de celle-ci. La plupart du temps, elle était d'une durée d'une demi-heure.
Mais certains prestataires ont eu l'idée de raccourcir le traitement à 15 ou 20 minutes, tout en conservant l'efficacité. La physiothérapie travaillerait de manière plus efficace aujourd'hui qu'autrefois, selon l'explication d'un des protagonistes.
C'est donc tout naturellement que l'office fédéral a proposé un nouveau système tarifaire: une séance de 20 minutes comme base et 5 minutes supplémentaires par séance, comme dans les cabinets médicaux.
Une augmentation plus forte qu'ailleurs
L'office fédéral d'Alain Berset est intervenu parce que les coûts de la physiothérapie ont explosé et parce que l'affaire exige de la transparence. En dix ans, les coûts ont augmenté de 6,9%, alors que toutes les autres prestations de l'assurance maladie n'ont augmenté que de 2,8%.
En 2022, la hausse s'est encore accélérée, avec une augmentation de 8,7% par rapport à l'année précédente, a déclaré le conseiller fédéral mardi. La transparence est maintenant de mise, car la Confédération doit légalement exiger la preuve de chaque séance de thérapie pour que l'argent des assurés soit dépensé efficacement.
La branche pense que cela sert de réduction des coûts, même s'il n'y a aucune précision à ce sujet. Elle se dit scandalisée parce qu'aujourd'hui déjà, on ne gagne pas beaucoup en physiothérapie, en tout cas moins que dans les professions médicales. On parle de 60 francs bruts de l'heure, «moins que les artisans», selon la branche.
Il a donc été facile pour le lobbyiste Walter Stüdeli d'amener des dizaines de milliers de personnes à s'opposer à Berset, y compris deux douzaines de conseillers nationaux de la gauche à l'UDC. Le Conseil fédéral pousse une branche vers l'abîme et met en danger cette thérapie.
Opposition totale à la réforme
Walter Stüdeli et les physiothérapeutes ont un grand modèle: le corps médical. Depuis des années, il parvient à torpiller toute réforme de la facturation des prestations médicales, ce que l'on appelle le tarif Tarmed. Les arguments sont similaires à ceux de la physiothérapie: le Conseil fédéral mettrait en danger la sécurité de l'approvisionnement en traitements.
Or, il existe de nombreux exemples montrant comment les tarifs en vigueur conduisent à de mauvaises incitations et à une surabondance de prestations médicales. Conséquence: une forte augmentation des coûts de l'assurance maladie.
Trois exemples rapportés mardi par la NZZ: le scanner du genou sans accident, certaines opérations du genou ou les médicaments contre le choléstérol chez les personnes âgées sans antécédents médicaux.
Les génériques en avant
Les laboratoires pharmaceutiques parviennent eux aussi, avec une grande régularité, à s'opposer à la réforme du prix des médicaments. Dernier exemple en date: Alain Berset voulait s'attaquer à la surtaxe suisse élevée pour les génériques. Les génériques sont des copies à effet identique d'un médicament original sans protection par brevet.
Alain Berset avait proposé un système de prix de référence qui tenait davantage compte des prix bas des médicaments dans les pays voisins. Mais l'industrie pharmaceutique s'est mise en travers de la route, a contacté les médias et les parlementaires et a réussi à faire passer son message: la réforme des prix mettait en danger la sécurité de l'approvisionnement et la santé. En conséquence, Berset a dû retirer le nouveau système.
Un rapport d'experts sans effet
La physiothérapie, le corps médical, l'industrie pharmaceutique, les pharmacies, les importateurs et distributeurs de médicaments... La liste des profiteurs de l'assurance maladie obligatoire qui s'opposent aux réformes est longue.
La meilleure métaphore est celle du jardin partagé, dont tout le monde profite mais que personne souhaiter entretenir. La Confédération et les assurances maladie tentent d'en limiter l'accès. Mais ceux qui broutent parviennent régulièrement, avec l'aide de lobbyistes au Parlement, à démanteler tous les obstacles prévus.
Les paquets de mesures de maîtrise des coûts de 2019 et 2020 en sont deux exemples parfaits. Ils ont commencé en 2017 par un rapport d'experts renommé sur la réforme de l'assurance-maladie, qui énumérait tous les facteurs de coûts et les mauvaises incitations.
Il en est ressorti 38 recommandations que Berset a présentées au Parlement dans deux projets. L'objectif serait de réaliser des économies allant jusqu'à un cinquième, tout en conservant la même qualité. Les primes d'assurance maladie auraient donc dû baisser massivement.
Des solutions biffées par les bourgeois
Mais il en a été autrement: les délibérations ont duré deux ans chacune. Des mesures d'économie potentiellement radicales telles que la réduction du prix des génériques, le renforcement des importations parallèles de médicaments bon marché, l'obligation d'un premier conseil (appelé gatekeeper), par exemple dans les cabinets des médecins de famille ou par le biais de la télémédecine, ainsi que de nouveaux pouvoirs du Conseil fédéral pour faire baisser les tarifs des traitements, ont toutes été supprimées par la majorité bourgeoise.
Les mesures telles que les amendes et les sanctions en cas de non-respect des objectifs budgétaires de la Confédération dans l'assurance maladie ont également été supprimées. Les fournisseurs de prestations, dont l'industrie pharmaceutique, se réjouissent de ce résultat.
L'Office fédéral de la santé publique est faible
Berset et l'Office fédéral de la santé publique ont leur part de responsabilité dans cet échec. Le lobbyiste Walter Stüdeli affirme qu'il lui a manqué «la volonté d'organiser».
Le directeur d'une grande caisse-maladie, qui ne souhaite pas être cité, affirme qu'il n'est pas pertinent que Berset réunisse la branche pour ensuite gâcher des accords judicieux. Le dernier exemple en date a eu lieu vendredi dernier: Berset a annoncé de nouvelles petites mesures d'économie de son propre chef. Trois d'entre elles étaient bonnes.
Mais il a laissé de côté celle où la branche s'était mise d'accord. L'idée était que les médicaments prescrits bon marché, comme le paracétamol ou l'ibuprofène, seraient majorés et que les médicaments chers seraient moins chers.
Au final, cela devait permettre d'économiser 60 millions de francs de dépenses dans le régime obligatoire. Mais Berset a finalement décliné l'offre. On a dit qu'il craignait une atteinte à sa réputation, car si les médicaments bon marché étaient soudain fortement augmentés, cela aurait suscité une large indignation.
Tout devient plus cher
Même les petites réformes sont donc condamnées. Le jeu de l'oie continue à tourner comme avant. Plus de diagnostics, plus de thérapies, plus de coûts et des primes d'assurance maladie plus élevées.
«Le catalogue des prestations ne cesse de s'élargir. Cela rend les choses toujours plus chères», déclare le directeur de la caisse maladie mentionné plus haut. Il plaide pour un «grand nettoyage» de celui-ci. Berset s'y est toujours opposé, et ce, jusqu'à aujourd'hui, en invoquant l'égalité de traitement entre les riches et les pauvres.
850 francs en moyenne
Conséquence: les dépenses de santé ont fortement augmenté par habitant. Elles s'élèvent aujourd'hui à environ 850 francs par mois. Il y a dix ans, elles étaient de 700 francs, il y a vingt ans de 557 francs. Depuis 2003, les coûts par habitant ont augmenté de 52%.
Les assurés en supportent près de la moitié. La différence est payée principalement par les cantons (hôpitaux) avec les recettes fiscales et, dans une moindre mesure, par les assurés complémentaires et les particuliers. Ces coûts se déplacent actuellement des interventions avec nuitée à l'hôpital («stationnaire») vers les caisses maladie («ambulatoire»).
«Cette augmentation favorise les idées provocantes et, à un moment ou à un autre, radicales», déclare le directeur de la caisse maladie mentionné plus haut. Il qualifie par exemple de radicale la revendication de la gauche: l'introduction d'une prime d'assurance maladie échelonnée en fonction du revenu. «Un projet socialiste», selon ce natif de Suisse orientale. Ce principe devrait peser lourd qu'aujourd'hui sur la classe moyenne et les hauts revenus.
Le faible rôle des caisses maladie
La suppression de l'obligation de contracter des caisses maladie avec chaque cabinet médical, récemment évoquée par la directrice de la santé zurichoise Nathalie Rickli (UDC), est une idée provocante. Cela redonnerait aux caisses maladie le pouvoir de négociation qu'elles n'ont pas aujourd'hui.
Ce pouvoir se manifeste dans l'assurance complémentaire. Là, les assurances peuvent exclure les hôpitaux privés et les cabinets médicaux du catalogue si leurs tarifs sont indécents. Cela a incité certains prestataires à pratiquer des prix justes et a permis d'éradiquer les abus, comme la double facturation des prestations médicales dans les hôpitaux privés. La «Handelszeitung» connaît des exemples qu'elle ne peut toutefois pas nommer.
En fait, les caisses maladie devraient représenter les intérêts des payeurs de primes. La question de savoir si elles le font est controversée. La loi leur donne théoriquement un grand pouvoir de négociation. Elles pourraient négocier des tarifs plus bas. Mais elles se sont affaiblies elles-mêmes, car elles sont divisées en deux camps au niveau national: en deux associations (Curafutura et Santésuisse). Cette opposition affaiblit le pouvoir de contrôle sur les assurés.
Les lobbyistes se portent biens
N'oublions pas que le Parlement a voulu cet affaiblissement. «Aujourd'hui, les fournisseurs de prestations ont un droit de veto», explique un haut fonctionnaire de la Confédération qui souhaite rester anonyme. Les lobbyistes de la trempe de Walter Stüdeli et le secteur de la physiothérapie le savent bien. Finalement, ils gagneront la bataille contre Berset et les payeurs de primes y perdront.
Ainsi, le successeur d'Alain Berset en tant que ministre de la Santé ne pourra pas vraiment intervenir. L'histoire n'a pas de fin heureuse, si ce n'est que les fournisseurs de prestations réalisent des bénéfices plus élevés et que les assurés peuvent se rendre de plus en plus souvent en thérapie, quel qu'en soit le prix.