Certificat Covid au travail
Beaucoup d'employeurs n'en veulent pas... pour le moment

Dès lundi, les employeurs pourront exiger un certificat Covid sur le lieu de travail, mais devront s'acquitter des frais des tests. Néanmoins, si le patron opte plutôt pour des mesures de protections différenciées, l'employé non vacciné serait discriminé. On décortique.
Publié: 12.09.2021 à 17:39 heures
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Dernière mise à jour: 12.09.2021 à 18:18 heures
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Ceux qui n'ont pas de certificat Covid peuvent être obligés de porter des masques dans le bureau, dans le cas d'un plan de protection différencié.
Photo: Keystone
Thomas Schlittler, Daniella Gorbunova (adaptation)

Le Conseil fédéral a tranché: dès lundi, les employeurs sont autorisés à demander un certificat Covid à leurs salariés. Mais, officiellement, pas question d’instaurer une discrimination à l’emploi. Théoriquement, le contrôle ne doit être effectué que pour déterminer les «mesures de protection appropriées».

À prendre avec des pincettes. Roger Rudolph, professeur de droit du travail à l’Université de Zurich, prévient effectivement qu’«en modifiant l’ordonnance Covid 19, le Conseil fédéral a créé les bases légales permettant de distinguer les employés avec et sans certificat.»

Les tests seront coûteux

A partir d’octobre, lorsque la Confédération ne prendra plus en charge les frais des tests, les non vaccinés devront passer à la caisse: il faudra alors compter environ 70 francs par test.

De l’autre côté, la décision du gouvernement donne également lieu à des incertitudes chez les vaccinés: quelles sont les «mesures de protection appropriées» sur le lieu de travail? Quelle inégalité de traitement entre les vaccinés et les non vaccinés est concevable?

L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) répond par un exemple: pour une grande boucherie où l’on travaille dans des locaux étroits, un certificat Covid peut être déclaré obligatoire à l’avenir. En revanche, une pépinière, où la majorité des employés travaillent à l’extérieur, peut ne pas avoir besoin d’un tel certificat.

Tests à la charge de l’entreprise

La discrimination des personnes non vaccinées ne doit pas être autorisée, souligne l’OFSP: «Si une obligation de certificat s’applique, l’entreprise doit proposer des tests réguliers ou prendre en charge les coûts des tests.»

En d’autres termes, personne ne devrait être mis à la porte pour cause de son statut vaccinal. Les tests quotidiens ou hebdomadaires seront financés par l'employeur.

«Mesures différenciées»

La situation est cependant différente si l’employeur ordonne des «mesures différenciées» au lieu du certificat obligatoire - telles que le home office ou le masque pour les personnes non vaccinées ou guéries. Dans ce cas de figure là, en revanche, l’entreprise n’est plus tenue de prendre en charge les frais des tests.

L’une des conséquences néfastes d’un tel fonctionnement serait l’outing: si une seule personne porte le masque lors d’une réunion avec dix participants, son statut vaccinal devient alors visible pour tous.

Une idée peu séduisante – et peu propice à une bonne ambiance de travail. D’où peut-être la réticence de nombreux grands employeurs, qui montrent pour l’heure peu d’intérêt pour les QR codes de leurs employés.

Migros, Crédit Suisse et CIE se passeront du certificat

Le groupe Migros, qui emploie environ 90’000 personnes dans toute la Suisse, est le plus catégorique: «Nous n’avons pas besoin du certificat et nous ne l’exigerons pas.» Au lieu de cela, l’entreprise s’appuie sur ses concepts de protection déjà existants. Car ceux-ci ont fait leurs preuves.

La situation semble similaire dans beaucoup d’autres entreprises. Le Crédit Suisse nous informe qu'«il n’est pas prévu d’exiger une preuve de vaccination contre le Covid-19». Le concurrent UBS écrit quant à lui: «Nous n’introduirons pas de certificat obligatoire dans nos bureaux pour le moment.» Swisscom leur emboîte le pas, en déclarant ne pas avoir pour projet de changer sa politique de protection.

Mais de nombreuses autres enseignes prennent la température avant de statuer. Coop, Nestlé, Novartis, Post, Roche et les CFF ne se sont pas encore prononcés.

Cantons également prudents

Les employeurs publics sont également encore hésitants: les cantons d’Argovie, de Berne, de Saint-Gall et de Zurich déclarent publiquement qu’ils n’ont pas encore abordé la question de savoir s’ils devaient demander le certificat Covid à leurs fonctionnaires.

Fait particulièrement surprenant: à Berne, les fonctionnaires fédéraux ne sont pas soumis à une quelconque obligation de certificat. «L’administration fédérale n’utilisera la possibilité de vérifier les certificats de ses employés que dans des situations très spécifiques», déclare un porte-parole de l’Office fédéral du personnel.

La capitale politique se justifie. D’une part, les unités administratives disposent déjà de concepts de protection bien rodés, et d’autre part, l’administration fédérale, en tant qu’employeur public, est confrontée à des obstacles plus importants que le secteur privé pour la mise en œuvre des contrôles de certificats.

Force motrice: l’Union patronale suisse

«L’administration fédérale doit pouvoir s’appuyer sur une base légale formelle pour traiter les données particulièrement sensibles des employés. L’ordonnance Covid n’est pas suffisante pour permettre aux employeurs publics de le faire», poursuit le porte-parole.

Il semble donc qu’aucun des grands employeurs ne soit particulièrement impatient de traquer le sésame dans l’open space. Mais alors, si la mesure est actuellement quasi inapplicable, pourquoi le Conseil fédéral a-t-il créé cette possibilité?

L’Union patronale suisse (UPS) a été l’une des forces motrices de cette décision. Ces dernières semaines, elle a fait campagne en faveur de l’amendement. Fredy Greuter, responsable de la communication de l’UPS, explique: «comme toujours, l’union patronale a défini sa position en étroite concertation avec ses membres. L’extension du certificat Covid a été soutenue par une très nette majorité des membres».

À noter que l’Union patronale est majoritairement constituée d’industriels, qui n’ont pas à traiter directement avec les employés qui refusent la vaccination. Aussi, des entreprises comme le groupe Migros – le plus grand employeur du pays – ne sont pas membres de cette dernière.


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