Tom Hiddleston et Claire Danes
«The Essex Serpent», un thriller sur les traces d'un monstre des mers

Disponible sur AppleTV+, cette déroutante série réunit Claire Danes, l’actrice de «Homeland», et Tom Hiddleston, inoubliable Loki dans les films Marvel. L’histoire nous emmène à la fin du XIXe siècle, à la recherche d’un monstre des mers.
Publié: 22.05.2022 à 19:24 heures
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Claire Danes, connue grâce à la série «Homeland», incarne Cora Seaborne, aristocrate anglaise dont le mari meurt dès les premières secondes de la série.
Photo: Dean Rogers
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Margaux BaralonJournaliste Blick

C’est sûrement l’une des meilleures surprises récentes de tous les sériephiles. Après un démarrage un peu poussif, la plateforme AppleTV+, débarquée en novembre 2019 en Suisse, révèle une programmation de plus en plus intéressante. De l’hilarante «The AfterParty» à la terrifiante «Shining Girls», en passant par «WeCrashed» ou «Severance», le début d’année 2022 a été particulièrement riche. Et voilà que s’ajoute encore une petite pépite à ce catalogue déjà fournie. «The Essex Serpent», en cours de diffusion, est une production à la fois visuellement léchée, originale et emballante.


Claire Danes, fabuleuse Carrie Mathison dans «Homeland», y incarne cette fois Cora Seaborne, aristocrate anglaise dont le mari meurt dès les premières minutes. Ses larmes se sèchent rapidement, ce deuil étant avant tout une délivrance après des années de violences conjugales. Voilà Cora prête à laisser libre cours à ses passions, notamment les sciences naturelles. Nous sommes au crépuscule du XIXe siècle et Darwin passionne les foules, du moins les «nerds» de l’époque. Lorsque Cora entend parler d’un petit village de l’Essex terrifié par la présence d’un serpent de mer qui dévorerait ses habitants, elle n’hésite pas à partir avec enfant et domestique à la poursuite de la mystérieuse créature. C’est là que la veuve pas vraiment éplorée fait la connaissance de Will Ransome, le pasteur du coin, qui ne la laisse pas indifférente.

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Le crépuscule d’un vieux monde


Tout, au départ, indique que «The Essex Serpent» s’aventure sur le chemin tortueux du thriller gothique. La scène d’ouverture, absolument magnifique, baigne dans le brouillard et la gadoue de la campagne anglaise. Une jeune fille visiblement désireuse de laver un péché de chair entre dans un bras de mer, avant de disparaître dans un hurlement. Ce sera la première victime du fameux serpent, qui déclenche une enquête et une paranoïa généralisée dans toute la ville. S’opposent alors les croyances populaires d’une bonne partie des habitants, persuadés qu’un châtiment divin s’abat sur eux, et les explications rationnelles du pasteur ou de Cora Seaborne, qui n’ont d’ailleurs pas la même. Lui est persuadé que le serpent n’existe pas, quand elle maintient qu’il pourrait s’agir d’une vieille espèce ayant échappé aux cycles de l’évolution et à la vigilance des biologistes.


Sous couvert de résoudre son énigme principale, «The Essex Serpent» interroge le basculement d’un vieux monde vers le nouveau. L’ère victorienne s’apprête à prendre fin sous les coups de boutoir de la modernité et des idées nouvelles. Il y a les progrès scientifiques, avec la présence de Luke, jeune médecin qui touche autant à la psychanalyse qu’à la chirurgie cardiaque, mais aussi le socialisme, auquel adhère Martha, la domestique de Cora, et le féminisme avec cette veuve délivrée de l’emprise du mâle et libre d’aller et venir. Le fameux serpent devient vite une sorte de «MacGuffin», au sens où l’entendait le cinéaste Alfred Hitchcock: l’élément qui déclenche l’action mais dont la nature exacte n’a pas une si grande importance.


L’intérêt, en réalité, est à chercher du côté des triangles amoureux qui se forment peu à peu. Entre Cora, Will et l’épouse de ce dernier, Stella, personnage ambigu à souhait qui semble les pousser dans les bras l’un de l’autre. Entre Cora, Luke et Martha enfin, le médecin comme la domestique étant plus sensibles qu’ils ne le devraient au charme de l’aristocrate libérée. Sans qu’on y prenne garde, lentement mais avec grâce et sans aucune niaiserie, «The Essex Serpent» glisse du thriller à la romance. Il fallait, pour donner du corps à ces dilemmes amoureux certes universels mais un brin usés dans la fiction, d’excellents acteurs. Impossible, bien sûr, de ne pas mentionner les deux paires d’yeux bleus de Claire Danes et Tom Hiddleston, tous deux au sommet de leur art. Mais il serait injuste de ne pas rendre hommage à Frank Dillane, qu’on a vu beaucoup plus sale dans «Fear the walking dead» et qui campe ici un Luke aussi brillant qu’agaçant, et Clémence Poesy, délicate et flippante à la fois dans le rôle de Stella. Tous portent la série et lui permettent d’imposer intelligemment son histoire d’amour.

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