Les Etats-Unis suspendent leur aide à l'Ukraine
Les angoisses sécuritaires de l'Europe grandissent à mesure que Washington lâche l'Ukraine

C'est un scénario d'horreur: imaginer la Russie en train d'attaquer l'Europe, sous le regard passif des États-Unis. Un scénario pas si improbable selon certains experts, qui estiment que l'Europe aurait du mal à se défendre seule.
Publié: 13.01.2024 à 11:51 heures
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Dernière mise à jour: 13.01.2024 à 13:23 heures
Avec des obusiers, les Russes prennent pour cible des positions ukrainiennes.
Photo: IMAGO/ITAR-TASS/ Sipa USA
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Guido Felder

L'Ukraine est à la peine. Les États-Unis ont suspendu leur livraison d'armes au pire moment pour Volodymyr Zelensky, alors que les attaques russes se multiplient et que certains besoins sont particulièrement pressants, notamment en raison de la saison froide.

Et dans ce contexte, l'Europe ne semble pas à l'abri. Donald Trump, qui a de grandes chances d'être réélu président des États-Unis en novembre prochain, ne semble pas enclin à apporter son soutien à l'Europe dans l'éventualité d'une d'attaque de la Russie contre le Vieux continent. Ce qui pourrait avoir des conséquences dramatiques.

Le commissaire européen au marché intérieur, Thierry Breton, a même rapporté que l'ancien président américain aurait lâché à la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen: «Vous devez comprendre que nous ne viendrons jamais vous aider si l'Europe était attaquée.» En outre, le regard critique que porte Donald Trump sur l'OTAN fait craindre à certains qu'il cherche à se retirer de l'alliance pour des raisons financières.

«Des dangers pourraient nous guetter d'ici 10 ans»

La peur à l'égard de Vladimir Poutine grandit donc au cœur de l'Europe. Le ministre allemand de la Défense Boris Pistorius a d'ailleurs déclaré: «Des dangers pourraient nous guetter d'ici la fin de la décennie.» Et le ministre suédois de la Défense civile Carl-Oskar Bohlin d'avertir, le week-end dernier: «Il pourrait y avoir une guerre en Suède.»

Les Européens seraient-ils assez forts pour se défendre seuls, sans les Américains? Selon l'expert militaire Marcel Berni, la question ne se pose pas encore: «On ne peut pas dire actuellement dans quelle mesure l'Europe pourrait se défendre contre la Russie sans le soutien américain.» Mais le politologue Hubert Zimmermann, expert en relations internationales à l'université de Marburg, est plus cash. Dans le «Frankfurter Rundschau», il assène qu'une émancipation vis-à-vis des États-Unis est pour l'instant impossible: «Sans eux, l'Europe ne serait pas en mesure de se défendre.»

Dans ce contexte, la dissuasion nucléaire reprend soudainement tout son sens. De nombreux pays ont appelé à un réarmement. L'ancien ministre de l'Économie Thierry Breton a même appelé à la création d'un fond de défense européen de 100 milliards d'euros: «Il y a la guerre sur notre continent, nous devons nous réarmer.»

«Mais dans ce domaine, l'UE est fortement dépendante des États-Unis», renchérit Hubert Zimmermann. Sur le plan militaire, technologique et opérationnelle, les troupes américaines seraient en effet largement supérieures aux armées européennes. La dépendance à l'égard de Washington se poursuivra encore longtemps. Du moins, pendant au moins 10 ans.

L'Ukraine doit-elle négocier?

La suspension de l'aide américaine devrait bientôt être ressentie par les Ukrainiens. Et à grande échelle. Et Marcel Berni de prévenir: «Les États-Unis ont fourni la plupart du matériel et des munitions et ont également coordonné l'aide occidentale. Si ce soutien disparaît, l'Europe ne pourra pas prendre le relai.»

Selon l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale, basé en Allemagne, les principaux de donateurs restants sont l'Allemagne, la Finlande, l'Irlande, la Croatie, la Lituanie, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Norvège, la Suède, la Suisse, la Grande-Bretagne et le Canada. Et c'est tout.

Or d'autres pays suivront probablement les États-Unis en mettant fin à leur aide, estime Marcel Berni: «L'Ukraine perdrait donc de sa force de frappe. Kiev pourrait même se voir contrainte à moyen terme être forcée de s'asseoir à la table des négociations face à Vladimir Poutine.»

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