Mise à mal lors d'une grande offensive cet été
Pourquoi Poutine veut à tout prix prendre Kharkiv?

Depuis des mois déjà, une pluie de bombes s'abat sur la ville ukrainienne de Kharkiv. La Russie semble désormais vouloir serrer la vis et prendre la ville par le biais d'une grande offensive. Selon les experts militaires, il y a plusieurs raisons à cela.
Publié: 05.05.2024 à 06:10 heures
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Dernière mise à jour: 05.05.2024 à 09:31 heures
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Depuis des mois, une pluie de bombes s'abat sur la ville ukrainienne de Kharkiv.
Photo: keystone-sda.ch
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Cédric Hengy

La population ukrainienne s'apprête à passer un été extrêmement agité. Si l'année dernière, ce sont les forces de Volodymyr Zelensky qui tentaient de sortir de l'impasse sur le champ de bataille en lançant une contre-offensive, cette année, c'est la Russie qui prend les devants.

Selon différents rapports médiatiques, tout semble indiquer que le Kremlin prévoit pour cet été une opération de grande envergure sur la mégapole ukrainienne de Kharkiv. C'est du moins ce qu'a laissé entendre le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov lors d'une récente interview radio accordée à plusieurs médias russes.

La ville sera une «zone de protection démilitarisée»

Depuis des semaines, Kharkiv est attaquée par la Russie avec de violents bombardements et des tirs de missiles. L'approvisionnement en électricité et en eau ne fonctionne plus. Il ne serait donc pas surprenant que la Russie veuille en finir et chercherait à intensifier ses attaques d'ici à quelques semaines déjà.

Mais pourquoi Kharkiv suscite-t-elle un tel intérêt de la part de l'appareil du pouvoir russe? Si l'on en croit les propos de Sergueï Lavrov, la ville doit devenir une «zone de protection démilitarisée». Ceci dans le but de protéger les colonies frontalières russes des attaques ukrainiennes.

Le moral des combattants doit être brisé

Mais une autre thèse circule parmi les experts militaires, qui pourrait expliquer une éventuelle offensive de grande envergure sur Kharkiv. «Kharkiv est considérée comme la deuxième capitale de l'Ukraine, elle est très proche de la Russie et c'est un site industriel important», explique le conseiller politique et expert en sécurité allemand Nico Lange à «Focus».

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Détruire Kharkiv serait «un signal brutal de violence et de désespoir»
Nico Lange, expert en sécurité allemand
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Selon Nico Lange, Kharkiv était autrefois le lieu de production des chars de combat ukrainiens modernes, des missiles et d'autres produits importants sur le plan militaire. Il ajoute: «La ville était l'un des principaux sites universitaires d'Ukraine, avec une recherche et un développement également importants sur le plan militaire.»

La destruction de la ville par une éventuelle prise russe et l'expulsion inévitable de la population seraient un «signal brutal de violence et de désespoir», résume l'expert. Selon lui, le président russe Vladimir Poutine semble donc viser avant tout le moral des Ukrainiens, maintes fois loué.

Sergueï Lavrov entrevoit d'autres conquêtes

Mais on peut douter que l'Ours russe se contente de Kharkiv. Une offensive réussie jusque derrière la ville pourrait ouvrir à la Russie de nouvelles possibilités dans sa guerre d'agression contre l'Ukraine. Sergueï Lavrov semble également en tenir compte dans sa planification. «Nous devons reculer la ligne à partir de laquelle ils (ndlr: les Ukrainiens) peuvent nous frapper», a déclaré le ministre russe des Affaires étrangères. «Je comprends que Kharkiv ne joue pas le dernier rôle ici.»

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«L'armée russe est dans un état très faible»
Kurt Volker, ancien ambassadeur américain auprès de l'OTAN
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Avec tous ces jeux de stratégie, on peut se demander si les forces armées russes disposent réellement d'une force militaire suffisante pour prendre la ville de Kharkiv, qui compte un million d'habitants. Certes, les troupes de Poutine ont récemment pu fêter quelques succès dans la bataille pour la colonie d'Otcheretyne. Mais selon l'expert en sécurité, le doute subsiste. Pour conquérir Kharkiv, «Poutine devrait y rassembler jusqu'à 100'000 soldats», ose-t-il pronostiquer.

L'ancien ambassadeur américain auprès de l'OTAN, Kurt Volker, est, lui aussi, sceptique quant à la force de frappe des Russes. «L'armée russe est dans un état très faible, avec un équipement, une formation, un moral et un commandement médiocres.»

Inquiétude pour les forces armées ukrainiennes

Malgré tout, plusieurs experts affirment que c'est plutôt l'armée ukrainienne qui est à craindre actuellement. Selon l'expert militaire Ralph Thiele, cela serait surtout dû au fait que les troupes russes sont «plus fortes en personnel, plus expérimentées et plus solides moralement qu'au début de la guerre». Le fait que l'économie de guerre russe produise plus de matériel militaire que les 32 pays membres de l'OTAN fait également le jeu de Poutine.

«L'industrie de l'armement russe peut continuer à fournir des armes et des munitions à l'armée, et ce, pendant un certain temps encore», est également certain le politologue autrichien Gerhard Mangott. En face, l'Ukraine dépend massivement de l'aide militaire étrangère pour sa survie.

Seule une Ukraine «véritablement russe»

Même si le Congrès américain a récemment adopté, après de longues tergiversations, un paquet d'aide de 60 milliards de dollars, cela ne semble impressionner personne du côté russe, du moins en public.

Le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a même menacé pendant l'interview radio qu'il n'y aurait qu'une Ukraine «qui soit vraiment russe, qui veuille faire partie du monde russe, qui veuille parler russe et éduquer ses enfants». La prise de Kharkiv semble donc être une nouvelle étape vers la réalisation de cet objectif.

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