Et si tout cela était, simplement, une affaire de contrats sonnants et trébuchants? Giorgia Meloni et les partisans de la candidature de Rome pour l’Exposition universelle 2030 ne se privent en tout cas de le dire à tous ceux qu’ils rencontrent à Paris. La Première ministre italienne est arrivée dans la capitale française mardi 20 juin pour défendre le dossier de la ville éternelle devant le Bureau International des Expositions (BIE) qui reçoit, ces jours-ci, tous les candidats. Problème: le dossier transalpin est mal parti. Même Emmanuel Macron, qui ne rate jamais une occasion de défendre la préférence européenne, pencherait pour l’Arabie saoudite du prince héritier Mohamed ben Salmane, lui aussi présent ces jours-ci à Paris, pour la deuxième fois en un an.
Pas de candidature en Amérique latine ou en Afrique
Cette Exposition universelle 2030 ne devrait pas, en théorie, avoir lieu au Moyen-Orient ou en Europe. Celle de 2015 avait eu lieu à Milan, donc déjà en Italie, ce qui complique le dossier de la péninsule. Celle de 2020 s’est tenue à Dubaï, suivie quatre ans plus tard par la Coupe du monde de football au Qatar. Les pays du Golfe ont donc été bien servis. En toute logique, c’est vers l’Amérique Latine ou l’Afrique qu’il conviendrait maintenant de regarder, puisque celle de 2025 aura lieu au Japon, à Osaka.
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2025 World Expo Osaka 3D Rendering | JAPAN Forward
Seulement voilà, les deux continents en question n’ont pas de candidats. Sur le papier, seules les trois candidatures de Riyad, Busan et Rome doivent en effet être examinées avant l’élection formelle, en novembre prochain. Il s’agit pour le BIE d’examiner «les conclusions des missions d’enquête visant à évaluer les projets de candidature. A l'automne, les 179 États Membres de cette organisation voteront ensuite à bulletin secret pour élire le lauréat, selon la règle 'un État, une voix'.»
L’Arabie saoudite, forte de ses pétrodollars, fait déjà le forcing. La ville méridionale de Busan, en Corée du Sud, talonne les Saoudiens. À moins qu’une candidature inattendue ne s’impose à l’arrache: celle de Kiev, la capitale de l’Ukraine qui rêve de conclure ainsi sa décennie de souffrance et de guerre. Le gouvernement ukrainien a déposé in extremis un dossier. Bien joué, car de nombreux chefs d’État et de gouvernement sont à Paris cette semaine pour un autre sommet: celui sur un nouveau pacte financier mondial organisé jeudi et vendredi par Emmanuel Macron.
Et les contrats dans tout ça?
Et les contrats dans tout ça? La colère de Giorgia Meloni, persuadée que les Français font le jeu de Riyad pour mieux vendre des armes à l’Arabie saoudite, s’est répandue comme une traînée de poudre. Tout cela avant leur rencontre prévue ce mardi soir à l’Élysée. De quoi ajouter aux difficultés entre Paris et Rome, notamment sur le dossier très sensible des migrants. Ou bien déjà, lorsqu'en février, Emmanuel Macron ne l’avait pas conviée lors de la première visite du président Ukrainien Zelensky aux côtés du chancelier allemand Olaf Scholz.
La presse italienne a évidemment raconté par le menu la réception organisée au Grand palais éphémère par les Saoudiens, en présence du prince héritier Mohammed ben Salmane. «La France a prévu de soutenir la candidature de l’Arabie saoudite», affirmait mardi le quotidien européen «Politico». Voilà qui a peu de chance de contribuer à l’apaisement des relations avec l’Italie. Alors que l’Union européenne a déjà accordé un soutien informel à la candidature italienne.
Meloni veut le soutien de Bruxelles
Fait étonnant de la part d’une souverainiste aussi affirmée que Giorgia Meloni, c’est à Bruxelles que celle-ci cherche des soutiens, sur le thème de la «revanche de l’Europe». «Tout le monde dit que l’Europe est en train de sortir de l’Histoire, voilà l’occasion rêvée de prouver que c’est faux», notait récemment le ministre italien des Affaires étrangères Antonio Tajani. Paris, pour mémoire, avait abandonné le projet d’organiser l’Exposition universelle de 2025, ayant déjà sur les bras les Jeux olympiques d’été en 2024. «Avec le soutien de tous les États membres de l’UE, le choix de Rome serait un succès pour l’ensemble de l’Union européenne», peut-on lire sur un document de la présidence du conseil italienne, remis à la presse.