A quel point les non-élus ont-ils manqué leur entrée au Conseil national lors des élections du 22 octobre dernier? C'est la question que se posent actuellement de nombreux dirigeants économiques, à la tête de grosses entreprises. Certains ont investi plus de 100'000 francs dans la campagne électorale et n'ont pas obtenu grand-chose, à part un peu plus de popularité.
Les résultats d'une nouvelle étude des professeurs Simon Lüchinger, Mark Schelker et Lukas Schmid des Universités de Lucerne et de Fribourg sont sans équivoque: les perdants des élections qui ont investi beaucoup d'argent dans leur campagne se sont trompés. Mais pourquoi? La «Handelszeitung» s'est penchée sur l'affaire, en prenant deux exemples parmi d'autres.
Sur les élections
La mauvaise stratégie
Le célèbre ex-directeur de l'Union suisse des arts et métiers Hans-Ulrich Bigler (UDC) a manqué de nombreuses voix pour être élu, plus précisément de 330'306 votes. Le chiffre semble très élevé, mais il est bel et bien correct. Le patron de la banque Vontobel, Zeno Staub (Le Centre), a connu le même sort. Il a manqué 279'615 voix à ce gestionnaire pour obtenir un siège.
Il est frappant de constater que ces deux personnalités du monde économique ont misé sur une seule et même stratégie marketing: ils se sont placés en tête de leur propre liste électorale tout en jouant sur leur lien et leur relation avec le secteur financier. Une tactique qu'ils espéraient gagnante. Durant leur campagne, Hans-Ulrich Bigler et Zeno Staub se sont principalement adressés à un public économique et se sont donc concentrés sur des thèmes financiers. Mais cette stratégie n'a pas porté ses fruits lors des élections de 2023. Leur plan s'est même soldé par un fiasco.
La liste électorale principale est le succès
En revanche, d'autres dirigeants du secteur capitaliste, présents sur la liste électorale principale de leur parti, ont eu plus de succès lors des dernières élections. Deux exemples: le patron du CIFI Donato Scognamiglio (PEV) et le directeur de Swissmem Stefan Brupbacher (PLR).
Ils ont tous deux manqué de peu l'accès au Conseil national. Il a manqué 8857 voix à l'homme du CIFI et seulement 8009 voix au représentant de Swissmem. Cela représente environ 1/1000 du potentiel électoral. Pour rappel, le canton de Zurich compte 970'000 électeurs.
La faute au système
L'une des raisons de l'échec de Hans-Ulrich Bigler et Zeno Staub est le système électoral. En cas d'apparentement de listes, le système favorise mathématiquement les candidats de la liste électorale dominante.
Concrètement, la liste de Hans-Ulrich Bigler était associée à la liste électorale principale de l'UDC. Et les électeurs de l'UDC ont surtout déposé cette dernière dans les urnes. On estime que la liste de Hans-Ulrich Bigler n'a été choisie qu'approximativement 2000 fois. Il aurait pourtant fallu que 11'200 électeurs sélectionnent cette liste.
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Une aspiration par les listes principales
Or, Hans-Ulrich Bigler n'a rien obtenu de tout cela. Comme elle a acquis bien moins que ce qu'il ne fallait, la liste électorale principale de l'UDC lui a «aspiré» les voix des sous-listes électorales et les candidats des listes électorales principales comme Thomas Matter et Gregor Rutz ont obtenu tous les sièges au Conseil national. Hans-Ulrich Bigler ne peut même pas espérer remplacer un jour un membre de l'UDC qui se serait retiré. En effet, sa liste de PME n'a obtenu aucun siège.
Il en va de même pour le candidat du centre Zeno Staub. Son parti a certes eu du succès dans le canton de Zurich. Il a obtenu le plus grand nombre de voix avec la liste électorale principale et a obtenu deux mandats supplémentaires au Conseil national. Mais Zeno Staub lui-même est reparti bredouille, car il s'est présenté sur sa propre liste. Elle n'a été déposée qu'environ 5000 fois. Pour gagner, il aurait fallu que 8000 électeurs supplémentaires choisissent sa liste.
Pas tous la même chance
Nous l'aurons compris, se présenter sur la liste électorale principale comporte un grand avantage pour espérer un succès. En effet, chaque candidat peut espérer accéder au Conseil national si un membre du même parti cantonal se retire. Par exemple, le chef du CIFI Donato Scognamiglio est le premier remplaçant sur la liste du PEV de l'élu Nik Gugger. Stefan Brupbacher est le troisième remplaçant de la délégation zurichoise du PLR, qui compte cinq membres.
Toutefois, pas toutes les histoires se terminent bien, même pour ceux qui se sont présentés sur des listes principales. L'entrepreneur et dentiste genevois Michel Matter, n'a en revanche aucun espoir. Certes, il figurait en première position sur la liste principale du parti vert'libéral. Mais son parti est tombé en disgrâce auprès des électeurs. Il a obtenu trop peu de voix par rapport aux autres partis. C'est ainsi que les Vert'libéraux, et donc Michel Matter, ont été écartés de la représentation genevoise au Conseil national, qui compte 12 membres.