Un scandale d'antisémitisme suscite l'indignation à Davos (GR) et fait les gros titres jusqu'au-delà des frontières du pays. Une collaboratrice de l'établissement alpin de Pischa a affiché une note expliquant qu'aucune luge ou autre équipement sportif ne serait plus loué aux membres de la communauté juive. Des «expériences négatives dans le passé» en seraient la raison.
Le tenancier de l'établissement Ruedi Pfiffner a beau s'être excusé chez Blick de l'action de sa collaboratrice, l'affaire est loin d'être terminée. La police cantonale des Grisons a ouvert une enquête pour discrimination.
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«Un problème à deux facettes»
Cette affaire donne une mauvaise image de toute la région touristique de Davos. L'automne dernier déjà, un scandale avait éclaté. Le «Gipfel Zytig» – organe journalistique du tourisme à Davos – avait en effet publié une photo d'excréments humains, couplée d'une légende au caractère antisémite: «Ceux-ci proviennent sans aucun doute d'un être humain d'origine juive.»
Le directeur de la société touristique de Davos Klosters, Reto Branschi ne veut toutefois pas entendre parler d'un problème d'antisémitisme généralisé dans sa région. Il l'assure à Blick: «L'antisémitisme n'a pas sa place chez nous.»
Il parle plutôt d'un «problème à deux facettes». Selon Reto Branschi, il s'agit avant tout des hôtes de confession juive orthodoxe. «Une petite partie des hôtes juifs orthodoxes refuse malheureusement toute forme d'information, de médiation ou d'adaptation à nos conditions», ajoute-t-il. Cela en partie par maladresse, en partie par manque de respect.
Par conséquent, une petite partie des habitants, des autres hôtes et des entreprises se retournent à leur tour contre les hôtes juifs, avec, parfois, des réactions excessives. «Ces deux phénomènes ne sont pas bons, car la cohabitation ne peut fonctionner que si tout le monde se respecte.»
Une taskforce pour aider
Reto Branschi souligne toutefois qu'il s'agit de cas isolés. Mais des actions comme celle du restaurant Alpin de Pischa sont vouées à déteindre sur l'ensemble de la destination. «Nous recevons beaucoup de retours qui critiquent Davos.»
Dans ce contexte, on peut tout de même se demander si une erreur n'a pas été commise à l'automne dernier, lorsque la société touristique de Davos-Klosters a mis fin à un projet de dialogue lancé il y a plusieurs années. Des médiateurs avaient pour mission de veiller à une meilleure compréhension entre les habitants et les touristes juifs. «Les médiateurs du projet de dialogue ont fait du bon travail et ils se sont énormément investis. Mais ils n'étaient tout simplement pas respectés et une partie des hôtes les ignoraient. C'est la raison pour laquelle nous avons mis fin à ce projet», explique Reto Branschi.
Depuis environ six mois, une taskforce s'occupe de cette problématique. «La première phase a consisté en une médiation au cours de laquelle toutes les parties concernées ont été entendues», explique le dirigeant de la société touristique. Les travaux ont été ensuite retardés en raison de la guerre au Proche-Orient. Ils devraient toutefois bientôt reprendre. «Nous sommes maintenant à la veille de discussions. Nous allons mettre sur la table mesures concrètes et, espérons-le, prendre des décisions communes.» Reste à savoir si cela suffira à éviter de nouveaux scandales.
Un vétéran du tourisme davosien trouve l'affaire «embarrassante»
Pour Ernst Wyrsch, président de la section grisonne de l'association professionnelle «Hotelleriesuisse» et membre du comité directeur de «Graubünden Tourismus», l'incident de Pischa est «embarrassant et ne peut pas être simplement balayé sous la table».
Il regrette les «dommages collatéraux» que Davos subit à cause de cet épisode – ce qui est d'autant plus fâcheux que quelques semaines auparavant, Davos s'était montré un excellent hôte pour les gens du monde entier lors du WEF. Il n'accepte pas les excuses du tenancier du restaurant alpin et constate que les réactions négatives étaient tout à fait prévisibles. «La mission du tourisme est de rendre les gens heureux et non de leur faire la leçon», poursuit Ernst Wyrsch.
Une table ronde est suggérée
Pour lui, la condamnation collective d'une communauté religieuse ne peut que discréditer Davos, malgré les liens étroits que la commune entretient depuis des décennies avec les touristes juifs – le village possède même un cimetière juif. Il faut donc empêcher situation s'enliser.
Ernst Wyrsch demande donc lui aussi une table ronde, mais avec un tout autre objectif que celui du directeur de Davos Klosters: il s'agirait de discuter avec les hôtes davosiens «des bases du comportement à adopter vis-à-vis des visiteurs». Et ce, au niveau communal ou éventuellement cantonal. «Mais ce n'est pas un problème de Davos. C'est un problème de société, et d'autres lieux touristiques seraient bien inspirés de se pencher sur cette question», conclut Ernst Wyrsch.