Depuis que la Banque nationale suisse (BNS) a sonné le retournement des taux d'intérêt, le marché hypothécaire suisse est en pleine effervescence. L'abandon des taux d'intérêt négatifs a rebattu les cartes dans le secteur des intermédiaires hypothécaires.
Ainsi, le portail en ligne Hyposcout ou l'ancienne filiale de Postfinance Valuu ne sont plus présents sur le marché des clients privés. Et le leader du marché, Moneypark, a été repris par l'assureur Helvetia, qui a restructuré l'entreprise.
Le secteur est donc en ébullition. Markus Gygax, président de Valiant, l'a exprimé sans détours: «Les intermédiaires hypothécaires ont en grande partie disparu», a-t-il déclaré il y a quelques jours lors d'une manifestation pour investisseurs.
Andreas Dietrich nuance un peu plus ses propos. Mais le professeur de la Haute école de Lucerne (HSLU) confirme toutefois que la dynamique du secteur s'est perdue après l'essor des taux d'intérêt négatifs, estime.
Les assureurs, les caisses de pension et l'UBS font preuve de retenue
La fluctuation des taux d'intérêt a entraîné un désamour des assureurs et des caisses de pension pour les activités hypothécaires. Pourtant, à l'ère des taux d'intérêt négatifs, le financement d'hypothèques constituait encore, pour ces établissements, une alternative bienvenue aux obligations et aux dépôts à terme, sources de pertes.
Mais les opérations hypothécaires comportent également certains risques, explique Adrian Wenger, expert en hypothèques chez VZ Vermögenszentrum. «Il faut encaisser les intérêts, mais aussi gérer les augmentations et les résiliations d'hypothèques ou engager des poursuites contre les mauvais payeurs.»
Même l'UBS ferait actuellement preuve de retenue sur le marché des hypothèques. La grande banque irait même parfois jusqu'à ne pas conclure de nouveaux contrats avec des clients existants, observe par exemple Adrian Wenger.
Une recherche plus exigente
Ces dernières années, l'UBS a déjà fait preuve d'une certaine retenue sur le marché hypothécaire et a constamment cédé des parts de marché. Il n'est donc pas étonnant que la grande banque se montre réticente une fois de plus, qui plus est en ce moment, avec l'assainissement du portefeuille du CS, précise Andreas Dietrich.
L'UBS considère d'ailleurs l'activité hypothécaire comme un «métier d'ancrage avec une priorité élevée inchangée». Les hypothèques sont un élément central du «conseil clientèle», car lors des renouvellements à venir, on évalue si les critères de financement sont remplis sur une base individuelle. L'environnement actuel des taux et du marché joue également un rôle.
Pour les clients, les temps ont donc bien changé: s'il y a quelques années le démarchage de dix établissements financiers suffisait pour la recherche d'un crédit hypothécaire, la situation est différente aujourd'hui, explique l'expert de VZ Wenger: «Entre-temps, les clients ne reçoivent souvent même plus de réponse.»
La recherche d'une crédit est devenue plus exigeante, en particulier pour les clients qui peuvent difficilement s'offrir un bien immobilier ou qui doivent utiliser les fonds de leur caisse de pension, observe Andreas Dietrich.
Certains crédits moins bien garantis devront être couverts par davantage de fonds propres
La réglementation devrait également jouer un rôle important: le secteur bancaire local devra appliquer «définitivement» les règles de Bâle III au début de l'année 2025. Celles-ci entraîneront des pondérations de risque plus élevées pour les mauvais débiteurs, et plus faibles pour les bons débiteurs pour l'octroi d'un crédit.
Cela signifie que les crédits moins bien garantis devront être couverts par davantage de fonds propres qu'auparavant. Parallèlement, l'autorité de surveillance des marchés financiers, la Finma, sera plus vigilante lors de l'octroi de crédits, selon Andreas Dietrich.
Ainsi, bien que le niveau des taux d'intérêt baisse encore en Suisse, «on peut également observer qu'une partie de la baisse des taux directeurs est compensée par des augmentations de marge des banques.»