Trump accuse Zelensky
Un plan d'urgence européen pour l'Ukraine est inévitable (sinon...)

Impossible d'imaginer une paix équitable en Ukraine sans un soutien massif des Européens. Donald Trump a en effet choisi son camp. Pour lui, Kiev doit céder face à Moscou. Et tout de suite.
Publié: 01.03.2025 à 06:43 heures
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Dernière mise à jour: 01.03.2025 à 08:22 heures
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Emmanuel Macron et Donald Trump se sont rencontrés à la Maison-Blanche le 24 février.
Photo: China News Service via Getty Images
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Richard WerlyJournaliste Blick

Fini les plans à moyen ou à long terme. Fini les promesses – qui n’engagent que ceux qui les prononcent, comme la Présidente de la Commission européenne cette semaine à Kiev – sur l’accélération de l’intégration de l’Ukraine à l’UE, qu’elle pourrait rejoindre «avant 2030». Fini les cogitations des états-majors français et britannique sur les modalités d’un possible déploiement de troupes en Ukraine, à l’arrière, pour sécuriser le potentiel cessez-le-feu.

Fini, tout ce branle-bas de combat diplomatico-militaire dont les prochaines étapes sont la réunion d’une dizaine de dirigeants européens ce dimanche 2 mars à Londres, et un sommet extraordinaire des 27 pays de l’Union européenne à Bruxelles le 6 mars. L’Ukraine et son président Volodymyr Zelensky – attendu dans la capitale britannique, de retour de Washington – ont besoin d’un plan de soutien d’urgence, capable de démontrer très vite à Donald Trump que le retour à la paix ne se fera pas aux seules conditions des Etats-Unis et de la Russie. Un plan qui doit impérativement comporter trois volets: un appui militaire lourd, un appui financier conséquent, et une réaffirmation de la vocation du pays à entrer dans l’UE.

Défendre l’Ukraine ou pas?

Tout ceci, bien sûr, n’est indispensable que si les Européens continuent, comme ils l’affirment haut et fort, de vouloir défendre l’Ukraine et faire échec à la menace russe. C’est la conséquence du scénario de nouvelle guerre froide, issue de l’agression de Moscou le 24 février 2022. L’Ukraine, dans ce contexte, est l’ultime rempart de l’Europe face à Vladimir Poutine et à son armée. Une autre vision est bien évidemment possible, et au moins deux chefs de gouvernement, le Hongrois Viktor Orbán et le Slovaque Robert Fico, sont assurés de la défendre bec et ongles lors du sommet de Bruxelles.

Pour eux, le rétablissement d’une coexistence pacifique avec la Russie est la priorité. Ils sont sur la ligne de Donald Trump. C’est l’Ukraine agressée et résistante qui doit céder. Il n’est pas tenable de résister plus longtemps à Moscou, et il est aberrant de continuer à sanctionner l’économie russe dont les ressources naturelles abondantes, à commencer par les hydrocarbures, sont indispensables au redressement économique du Vieux Continent.

Quatre dirigeants vont donc être, dans les heures qui viennent, contraints d’avancer leurs pions et de prendre un maximum de risques s’ils veulent être cohérents, après leurs déclarations de soutien à l’Ukraine.

Le premier est Emmanuel Macron. Le président français a fait de la défense autonome européenne la pierre angulaire de son discours. Il était à Washington lundi 24 février dans le bureau ovale. Macron a l’avantage que lui confère l’histoire de son pays, à la fois plus vieil allié des États-Unis et puissance rétive à la domination américaine. La France est dotée de l’arme nucléaire. Macron doit avancer des propositions concrètes et les rendre publiques. Il est le mieux placé pour défendre l’idée d’un emprunt européen de toute urgence pour la défense, et pour acter de nouvelles livraisons d’armes à l’Ukraine. Il est le dos au mur.

Le second est le Premier ministre britannique Keir Starmer. Pour lui, l’Ukraine est une révolution culturelle. Londres doit choisir entre la défense de la liberté du continent face à la Russie, et sa sacro-sainte alliance avec les États-Unis. Starmer était aussi à Washington, le 27 février. Il est apparu moins offensif que Macron. Son pays, qui n’est plus dans l’Union, n’est pas concerné par l’éventuelle intégration communautaire de l’Ukraine. Sa décision de mettre des troupes à disposition pour préserver un cessez-le-feu en Ukraine serait toutefois majeure.

Le troisième est le futur Chancelier allemand Friedrich Merz. Pour ce dernier, sorti vainqueur des législatives de dimanche 23 février avec 29% des voix, face à une extrême droite (soutenue par l’administration Trump et Elon Musk) à 20%, la prise de risque s’annonce colossale. Peut-il, alors que son gouvernement de coalition (sans doute avec les sociaux-démocrates) n’est pas formé, prendre des décisions en matière de défense, comme l’envoi à l’Ukraine des fameux missiles longue portée Taurus qu’Olaf Scholz, le Chancelier sortant, a toujours refusé de livrer? Le suspense, en ce qui le concerne, est maximal.

Meloni, le «go-between»

La quatrième est la Première ministre italienne Giorgia Meloni dont le rôle peut être décisif. Issue de l’extrême droite néofasciste, Meloni est proche de Trump et Musk. Elle a leur oreille. Elle a leur confiance. Elle peut jouer le «go-between» car son soutien à l’Ukraine est sans faille (jusque-là). L’Italie dispose d’un système de défense antiaérien conçu avec la France. Des batteries supplémentaires de ces systèmes «mamba» peuvent-elles être acheminées en Ukraine? Négliger Meloni dans l’équation serait une grave erreur. Parce qu'elle peut parler à Trump.

Le plan d’urgence européen doit voir le jour si les pays concernés prennent leur rôle au sérieux, et tirent les conséquences de la nouvelle donne américaine. Dans le cas contraire, Donald Trump aura compris. Le champ sera libre pour imposer «sa» paix en Ukraine.

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