Obsessions présidentielles 2/3
De Melania à Donald Jr, les secrets du clan Trump dans l'Amérique MAGA

Donald Trump est entouré d'un clan familial dont il est à la fois le patriarche et le commandant en chef. Sauf que cette dynastie ne ressemble ni à l'Amérique traditionnelle, ni aux électeurs MAGA
Publié: 18:46 heures
|
Dernière mise à jour: 19:36 heures
1/5
Lors de son discours du 5 novembre à West Palm Beach, Donald Trump avait sa famille à ses côtés.
Photo: Getty Images
Blick_Richard_Werly.png
Richard WerlyJournaliste Blick

«Mais où est donc passée Melania?». Linda McMahon, 76 ans, a d’abord hésité avant d’interroger les convives de la table d’honneur, dans la grande salle de réception de Mar-a-Lago, le 14 novembre. Silence. L’épouse de Donald Trump n’a fait qu’une brève apparition au gala de l’America First Policy Institute, le premier événement politico-mondain de la transition. Son QG demeure plus que jamais le triplex familial du 64e, 65e et 66e étages de la Trump Tower à Manhattan, New York. «Melania? J’ai l’impression qu’elle a été remplacée par le milliardaire Elon Musk. C’est lui qui est partout sur les photos à côté du président élu, non?» sourit un professeur de sciences politiques, sur le campus de la Savannah State University, en Géorgie. Tout en gardant l’anonymat, «vu l’ambiance politique aux Etats-Unis depuis le 5 novembre».

Un coup d’œil sur les photos les plus récentes en provenance de la résidence de Donald Trump, à West Palm Beach en Floride, de nouveau surnommée la «Winter White House» (la Maison Blanche hivernale) suffit en effet pour apprécier le basculement familial. En charge de la préparation de la cérémonie d’investiture du 20 janvier 2025 à Washington, Linda Mc Mahon, ancienne vice-présidente de la Fédération mondiale de catch et amie proche de Dana White, le très influent patron du circuit UFC de combats MMA, fait ces temps-ci presque office de première dame lors des réceptions dans l’immense salle couverte de dorures. Une salle capable de recevoir jusqu’à 300 invités, avec vue imprenable sur les vagues de l’Atlantique venues d’écraser contre la digue du golf… où Melania Trump évite ces temps-ci de s’attarder.

La restauration d’une dynastie

«On assiste littéralement à une restauration. Trump est le roi de retour sur le trône jugent, dans un article récent du «Wall Street Journal», les journalistes Alex Leary et Peter Grant. Or qui dit nouveau règne dit nouvelle cour, nouveaux favoris, nouveaux rôles au sein du clan Trump. L’avis du quotidien financier, propriété du milliardaire Rupert Murdoch qui a longtemps soutenu Donald Trump avant de prendre ses distances, même si sa chaîne de télévision Fox s’est réjouie de sa victoire? «Melania est surtout préoccupée par son fils Barron, 18 ans, inscrit à l’université à New York. Au sein du clan familial, le partage des responsabilités se joue d’abord entre Donald Jr, le fils aîné du président élu, très impliqué dans la campagne présidentielle, et Eric, son cadet, en charge de l’empire immobilier et des investissements dont l’épouse, Lara, copréside le comité national du Parti républicain».


Traduction littérale: Donald Jr a perdu de l’influence. Tout comme Ivanka, la sœur des deux hommes (les trois sont nés du premier mariage de l’ex-promoteur new-yorkais avec Ivana, mannequin d’origine tchèque, divorcée en 1990 et décédée en juillet 2022) et son mari Jared Kushner, très présents lors du premier mandat: «Donald Trump blâme tous ceux qui ont, d’une manière ou d’une autre, été associés à sa défaite de 2020, y compris au sein de sa famille» estime, dans son podcast «Disagree Better» (Assumons nos désaccords), le politologue californien John Pitney. Le président élu a, en outre, moins besoin de Donald Jr, connu pour ses propos incendiaires envers ses adversaires. «Hier, son fils était l’un des seuls pitbulls de son équipe. Aujourd’hui, les pontes du mouvement MAGA (Make America Great Again – rendre à l’Amérique sa grandeur, le slogan trumpiste emprunté à Ronald Reagan) forment une meute de chiens féroces».

Dynastie familiale

Pas question, pour autant, de mettre la dynastie familiale en retrait. Au contraire. Le Donald Trump de 2024 est d’autant plus obsédé par sa «legacy», l’héritage qu’il laissera derrière lui, qu’il ne pourra pas se représenter pour un troisième mandat, car la constitution le lui interdit. Éviter d’exposer ses enfants, au moins dans un premier temps, est donc aussi un moyen de consolider l’assise du clan, tandis que les premiers rôles politiques seront dévolus au vice-président élu JD Vance, 40 ans, et au nouveau patron du «Département de l’efficacité gouvernementale» Elon Musk, 53 ans.

Éric Trump, par exemple, ne se cache pas d’avoir de grands plans d’investissements immobiliers en Israël, le pays que son père soutient envers et contre tout. Le président élu attend aussi d’avoir mis en place son équipe, à la tête du Département de la Justice, conduite par le très controversé Matt Gaetz, 42 ans, pour «éteindre» plusieurs poursuites judiciaires lancées par des organisations civiques telles que «Citizens for Responsabilites and Ethics in Washington».

Celle-ci affirme que la famille Trump a tiré un profit personnel du premier mandat présidentiel, entre 2016 et 2020. L’Hôtel Trump International de Washington DC (revendu en 2022 à un consortium de Miami, en Floride) est ainsi soupçonné d’avoir surfacturé les chambres louées aux agents du secret service chargé de protéger le président et les dignitaires étrangers en visite. Une surfacturation estimée par les plaignants à au moins treize millions de dollars.

Et Melania?

Et Melania? Depuis la sortie, début octobre, de son livre dont le titre est son prénom, la troisième épouse de Donald Trump (après Ivana et Marla Marples, dont il a divorcé en 1999) joue sa carte personnelle: celle d’une femme capable d’avoir ses propres opinions, aux côtés d’un homme entouré de courtisans.

La première preuve en a été donnée à propos du droit à l’avortement, qu’elle a décidé de soutenir en pleine campagne électorale alors que son mari, à ce moment, était alors sous pression des lobbies ultra-conservateurs pour défendre l’interdiction fédérale de l’interruption volontaire de grossesse (ce qu’il a renoncé à faire, laissant l’initiative aux États). «Mon corps, mon choix» avait alors assumé l’ancien mannequin slovène, âgée de 54 ans.

Seconde preuve bien plus récente: son refus d’accompagner Donald Trump à la Maison Blanche le 13 novembre, pour y rencontrer Jill Biden, pendant que son mari échangeait avec le président sortant. «Evil Jill snubbed» (La «diablesse Jill» snobée) a aussitôt titré le quotidien populaire «New York Post». En cause, selon plusieurs médias américains? Le fait que Jill Biden ait elle-même traité Trump de «diable» et de «menteur». «C’est ce genre de langage qui a failli lui coûter la vie» a-t-elle répété lors d’entretiens, faisant référence à la tentative d’assassinat du 13 juillet à Butler, en Pennsylvanie. La réponse de Jill Biden est venue sous forme d’une lettre assurant sa successeure qu’elle attendait ses consignes pour la transition…

Conclusion du «New York Post»: «Melania sera une première dame à temps partiel lors de ce second mandat. Il y aura selon elles trop «d’éléphants» à la Maison Blanche. Elle veut d’abord être une mère et une épouse». Question d’avenir aussi: lorsqu’il achèvera son second et dernier mandat à la fin 2028, Donald Trump (né le 14 juin 1946) aura 82 ans. Barron, leur fils, que sa taille de 2,06 mètres permet aisément de distinguer sur les photos familiales, aura 22 ans. Et rien ne dit que les confidents actuels de son époux seront toujours en place.

Robert Kennedy, le conseiller

«Melania connaît trop bien son Donald, rigole une journaliste du Palm Beach Daily News, rencontrée dans le lobby du Ben Hotel, l’un des établissements chics de la ville où était installé ces jours-ci Robert Kennedy, le futur patron du Département de la Santé. Elle sait que la Maison Blanche sera comme les Everglades chez nous, en Floride: un marais plein d’alligators qui vont s’entredévorer». Robert Kennedy et elle ont toutefois longuement échangé à Mar-a-Lago. Pour parler avec le neveu de JFK, le mythique président assassiné le 22 novembre 1963 à Dallas (Texas), du poids que représente une dynastie familiale aux États-Unis?

«Melania a sans doute un peu peur. Le mouvement MAGA qui a porté son mari au pouvoir est bien plus radical qu’en 2016. La volonté de revanche est omniprésente. Elle sait que le nom qu’elle porte est synonyme de pouvoir. Mais elle est aussi consciente du danger qui va avec».

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la