Le «niet» de Moscou est tombé alors même que les trente pays-membres de la «coalition des volontaires» alliés de l’Ukraine, se réunissaient jeudi 27 mars à Paris. La Russie demeure «catégoriquement opposée» au déploiement de toute forme de contingent militaire en provenance de pays engagés aux côtés de Kiev. Vladimir Poutine propose maintenant de mettre l'Ukraine sous autorité de l'ONU. Est-il crédible, dès lors, de parler comme le fait Emmanuel Macron de l’envoi possible d’une force de «réassurance» potentiellement pilotée par la France et le Royaume-Uni?
Rien avant un «cessez-le-feu» total
C’est le plus important à comprendre. La proposition d’une force européenne susceptible d’être déployée au sol en Ukraine pour garantir une paix durable n’interviendra que si un cessez-le-feu total est obtenu, à l’issue des pourparlers directs entre les Etats-Unis et la Russie.
La réunion de la «coalition des volontaires» de 31 pays, à Paris, a donc surtout porté sur le soutien militaire à l’armée ukrainienne. La France s’est engagée à ajouter deux milliards d’euros d’équipements (missiles antichars Milan, moyens de défense aérienne, missiles de défense sol-air Mistral, blindés de transport de troupes, chars AMX-10 RC et munition». Toutes les hypothèses sur une possible force européenne concernent «le jour d’après» l’arrêt complet des hostilités.
Rien sur la ligne de front
La question de la vérification du cessez-le-feu entre l’Ukraine et la Russie, s’il est obtenu à l’issue des pourparlers en cours entre Washington et Moscou, demeure encore très floue. Le plus probable est qu’il faudra, pour sceller l’envoi de forces internationales sur place, passer par une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies.
L’option de l’Organisation pour la sécurité en Europe (OSCE, basée à Vienne), retenue lors des accords de Minsk – qui n’ont pas empêché la guerre – semble moins probable. L’idée souvent évoquée est l’envoi, sur les 1400 kilomètres du front ukrainien, de troupes en provenance de pays membres des BRICS: Inde, Brésil, et pourquoi pas la Chine.
Rien sans le soutien américain
C’est la partie la plus compliquée de l’équation, sur le plan militaire et politique. Quels pays européens accepteront d’envoyer des troupes en Ukraine – même dans des zones très éloignées de la ligne de front et des missions de soutien et d’entraînement – si Donald Trump (qu’Emmanuel Macron a joint avant la réunion) refuse la logistique américaine? Plus compliqué encore: qui prendra le risque de contrevenir à un éventuel veto de Washington à un tel déploiement? La proposition de Vladimir Poutine de mettre l'Ukraine sous mandat de l'ONU brouille maintenant encore plus les cartes.
Le président français est, pour l’heure, le plus résolu. L'armée Française, pour rappel, est déjà présente en Roumanie voisine. Le Premier ministre britannique, lui, n’a pas clarifié sa position en cas de veto de Washington. La question d’un soutien américain (renseignement, surveillance) est tout aussi cruciale pour le déploiement éventuel d’une force de soutien navale et aérienne. La Bulgarie a toutefois proposé d’accueillir un centre de coordination maritime pour surveiller la mer Noire.
Rien sans maintien des sanctions
C’est un autre sujet de divergence majeure, à ce stade, entre les Etats-Unis et les Européens alliés de l’Ukraine. Lors des dernières négociations en Arabie saoudite, la délégation américaine a laissé entrevoir la possibilité d’une levée partielle des sanctions financières contre la Russie, afin de permettre la reprise du commerce maritime via la mer Noire.
Rien de tel à Paris, du côté de la «coalition des volontaires». Les 31 pays réunis ce jeudi 27 mars à Paris se sont prononcés à l’unanimité contre toute levée des sanctions. Pour rappel, seize paquets de mesures ont été adoptés par l’Union européenne, tous repris ensuite par la Suisse. La Turquie, représentée à Paris, n’applique en revanche pas ces sanctions.
Rien sans Paris et Londres
Une mission franco-britannique se rendra «dans les prochains jours en Ukraine», a annoncé le président français Emmanuel Macron. Paris et Londres se retrouveront donc dans le rôle de «pilotes» de cette mobilisation européenne dont le but est d’apporter à l’Ukraine des garanties de sécurité pour que le cessez-le-feu tienne, et pour que la paix négociée soit durable.
La position de l’Allemagne, en attente de son nouveau gouvernement dirigé par le conservateur Friedrich Merz, n’est pas arrêtée. Giorgia Meloni a en revanche redit que l’Italie ne participera pas à une éventuelle force de réassurance, et elle a souhaité la présence d’une délégation américaine au cours de la prochaine réunion de ce groupe d’une trentaine de pays.