Ce dimanche, les Serbes éliront leur nouveau Parlement. Les électeurs auront alors l'occasion de se débarrasser du président Aleksandar Vucic, chef d'un pouvoir autoritaire et favorable à la Russie. Les plus grands concurrents sont les membres de l'opposition unie «Serbie contre la violence».
Ont-ils une chance? Y aurait-il enfin la paix avec le Kosovo? Y aurait-il des émeutes? Ou tout resterait-il comme avant? Voici tout ce qu'il faut savoir sur les élections.
1) Pourquoi Vucic voulait-il convoquer des élections anticipées?
Deux fusillades en mai, qui ont fait 18 morts, ont déclenché des manifestations massives au cours desquelles des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans les rues. Ils ont reproché à Aleksandar Vucic d'alimenter un climat de haine et de glorification de la violence et ont exigé sa démission.
Le conflit avec le Kosovo, où des Serbes ont tué un policier en septembre, joue également un rôle. L'UE fait pression sur les deux pays pour qu'ils améliorent leurs relations s'ils veulent être admis dans l'Union.
En raison de la pression de l'opinion publique, Aleksandar Vucic a dissous le Parlement à l'automne et fixé de nouvelles élections au 17 décembre, dans un délai si court que l'opposition n'a pas eu le temps de se former. Parallèlement, des élections municipales auront lieu dans 65 communes, dont Belgrade. Le gouvernement actuel n'est en place que depuis avril 2022.
Qui gagnera les élections?
18 alliances électorales se disputent les faveurs des électeurs. Une victoire du SNS, le parti progressiste de Aleksandar Vucic, est considérée comme probable. Les sondages lui donnent près de 40%.
L'opposition unie, qui se présente sous le nom de «Serbie contre la violence», suit avec 25%. C'est la première fois qu'une alliance aussi large se présente aux élections et obtient d'aussi bons résultats dans les sondages. Mais comme Aleksandar Vucic contrôle les médias, l'opposition a peu de visibilité.
Y aura-t-il des émeutes en cas de défaite de Vucic?
«A court terme, il pourrait y avoir des moments délicats comme des manifestations de diverses tendances et des violences policières», estime Konrad Clewing de l'Institut Leibniz pour la recherche sur l'Europe de l'Est et du Sud-Est. Il serait alors possible que les services secrets proches du Kremlin fassent appel à Moscou.
L'expert suisse des Balkans Daniel Bochsler de la Central European University à Vienne prend comme exemple la Macédoine et le Monténégro: «Il y a eu beaucoup de discussions et de menaces lorsqu'un changement de pouvoir s'est dessiné. Mais la situation n'a pas dégénéré davantage.»
Quels sont les thèmes électoraux?
Le développement économique, la relation avec le Kosovo, la démocratisation ainsi que la violence rampante. La violence est même glorifiée dans les programmes de divertissement télévisés, où des hommes détruisent des meubles et menacent les femmes, et où un condamné donne des conseils sur la manière de tuer quelqu'un en prison sans laisser de traces.
5) Que signifie le résultat des élections pour le Kosovo?
Si l'opposition bat Aleksandar Vucic, ce ne sera pas encore un véritable changement de cap. «Une partie de l'opposition est composée de nationalistes», explique Daniel Bochsler. Toutefois, une victoire électorale de l'opposition démantèlerait le réseau actuel entre les groupes criminels et paramilitaires qui contrôlent le nord du Kosovo, les services secrets et le gouvernement serbes. Daniel Bochsler comprend ainsi les événements: «Cela ouvrirait la voie à une implication des représentants de la population serbe du Kosovo, qui semblent plus intéressés par une solution que le gouvernement de Belgrade.»
Et si Aleksandar Vucic gagne à nouveau? Même dans ce cas, il y a un petit espoir d'apaisement, selon Konrad Clewing. «Parce que la campagne électorale sera alors terminée et que Aleksandar Vucic n'aura plus de pression, on peut espérer qu'il réduira un peu son agressivité envers le Kosovo.»
Dans quelle mesure Poutine intervient-il dans les élections?
Les experts ne croient pas que le Kremlin influence directement les élections. Pour Konrad Clewing, «le Kremlin est satisfait de l'orientation de la politique étrangère de Aleksandar Vucic. Et on peut partir du principe qu'il va gagner les élections.» Certes, les médias sont influencés par le Kremlin, «mais ceux-ci sont principalement manipulés par Aleksandar Vucic lui-même».
Selon Daniel Bochsler, la vision politique que de nombreux Serbes associent à la direction russe est bien plus déterminante que le soutien à la campagne. «Par cette vision, j'entends une alternative à l'Europe et l'idée que la Russie soumettra l'Ukraine et aidera ensuite les Serbes à récupérer le Kosovo et à démanteler la Bosnie-Herzégovine en tant que pays.» Le président Aleksandar Vucic aurait précisément fait allusion à ce sujet il y a quelques jours lors d'une intervention télévisée très remarquée.