«La Serbie contre la violence»
Nouvelle manifestation en Serbie, la télévision nationale en ligne de mire

Des dizaines de milliers de manifestants ont de nouveau protesté samedi à Belgrade contre la violence. Un mouvement né dans la foulée de deux fusillades meurtrières qui s'est mué en manifestation de colère contre le gouvernement.
Publié: 27.05.2023 à 21:32 heures
Malgré une pluie diluvienne, les protestataires portant des fleurs se sont réunis devant le parlement avant de se diriger vers le siège de la télévision nationale (RTS) qu'ils ont encerclé, ont constaté des journalistes de l'AFP.
Photo: AFP

Malgré une pluie diluvienne, les protestataires portant des fleurs se sont réunis devant le parlement avant de se diriger vers le siège de la télévision nationale (RTS) qu'ils ont encerclé, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Ils ont réclamé la démission de la direction et des rédacteurs en chefs de la chaîne, accusés d'être les «porte-voix» du pouvoir.

«J'en ai marre des mensonges»

Réunis sous le mot d'ordre «La Serbie contre la violence», les manifestants descendent en masse chaque semaine dans les rues de la capitale serbe depuis les tueries survenues début mai dans le pays des Balkans à moins de 48 heures d'intervalle.

La dernière fois que les Serbes ont défilé si massivement, c'était lors des manifestations en 2000, qui avaient abouti à la chute de l'homme fort de Belgrade, Slobodan Milosevic.

«Je suis ici car j'en ai marre des mensonges et de la corruption. Rien ne changera ici, jusqu'à ce que les gens réalisent que c'est possible et qu'ils ont le choix», a dit à l'AFP Dusan Valent, 40 ans.

Contre le pouvoir

Le 3 mai, un adolescent de 13 ans avait tué neuf camarades et un garde dans une école à Belgrade. Moins de 48 heures plus tard, un jeune homme a assassiné huit personnes dans deux villages proches de la capitale.

Les gens ont manifesté d'abord en signe de deuil mais la protestation semble s'être muée en vaste mouvement de colère contre le pouvoir du président Aleksandar Vucic.

Les manifestants réclament la révocation des licences des télévisions proches du gouvernement qui publient des contenus violents et accusent le gouvernement d'avoir instauré ou toléré un «climat de violence» en Serbie. Ils réclament aussi les démissions du ministre de l'Intérieur et du chef des services de renseignements.

En réaction, le président Aleksandar Vucic a organisé lui-même vendredi un grand rassemblement de ses partisans venus à Belgrade de toute la Serbie à bord d'autocars, ce qui a fait dire aux défenseurs des droits humains que certains manifestants avaient subi des pressions pour participer à l'événement.

Chef de l'Etat plus conciliant

Le chef de l'Etat a de nouveau accusé les partis d'opposition d'avoir «essayé d'abuser de la tragédie» à des fins politiques, tout en se montrant plus conciliant que ces derniers temps envers les manifestants eux-mêmes.

«Ceux qui ont marché ces dernières semaines sont dans la plupart des cas des gens biens, décents et normaux qui veulent du bien à la Serbie», a reconnu le chef de l'Etat. «Ceux que je ne peux pas apprécier, ce sont les politiciens qui veulent faire l'histoire en abusant de la tragédie.»

Vucic crée un mouvement

Aleksandar Vucic, qui dirige le pays des Balkans depuis près d'une décennie, a par ailleurs quitté samedi la direction de son parti (SNS, conservateurs). Il a dans le même temps annoncé la création d'un mouvement politique.

Lors d'une assemblée extraordinaire du parti à Kragujevac (centre), il a assuré qu'il n'allait pas quitter le SNS. «Je pense juste qu'une approche légèrement différente est nécessaire pour unir un plus grand nombre de forces qui veulent se battre pour la victoire d'une Serbie patriotique et prospère.»

Redorer le blason de la formation

Selon des analystes, Aleksandar Vucic est plus populaire que son parti, souvent accusé de corruption, et ce nouveau mouvement lui permettra de redorer le blason de la formation qui devrait progressivement se fondre dans son mouvement.

«C'est un moyen de surmonter des crises qui pourraient potentiellement éclater au sein du SNS», estime Bojan Klacar, directeur d'un observatoire indépendant des élections, CESID. Par ailleurs, «en créant un nouveau mouvement, il veut s'assurer un autre mandat» politique, dit M. Klacar.

A la proposition de M. Vucic, l'actuel ministre de la Défense, Milos Vucevic, a été élu à la tête du SNS.

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