A qui le tour? Pour désigner les personnalités susceptibles de devenir ministres dans le futur gouvernement de François Bayrou, dont la composition devrait être connue avant Noël et peut-être dans les heures qui viennent, les médias français alternent entre deux ou trois formules.
Pour les uns, le nouveau Premier ministre veut s'entourer de «poids lourds». Pour les autres, le leader centriste va procéder à de «grosses prises». La signification est identique: il faut à tout prix que le maire de Pau – il a choisi de continuer à diriger sa ville des Pyrénées – s'entoure d'hommes et de femmes connus, si possible vétérans de l'action publique. Histoire de montrer aux Français que la crise politique actuelle est en passe d'être surmontée. Histoire, surtout, de convaincre la droite traditionnelle et la gauche modérée de ne pas voter une prochaine motion de censure…
Alors, de qui parle-t-on ce lundi 23 décembre, alors que le pays respecte une journée de deuil national pour l'île de Mayotte dévastée par le cyclone Chido ? Voici plusieurs noms qui circulent. Avec leurs forces, leurs faiblesses, et la probabilité de les voir rejoindre l'équipe gouvernementale sur laquelle François Bayrou et Emmanuel Macron ont encore cogité dimanche 22 décembre en soirée.
Xavier Bertrand, le conservateur social
Dernière minute: l'actuel président de la région des Hauts-de-France (Nord) ne rejoindra pas le gouvernement. Xavier Bertrand a été plusieurs fois ministre, notamment en charge de la Santé et des Affaires sociales, sous les présidences de Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy. Ancien assureur, bosseur, affable, il est comme François Bayrou attaché à son terroir. Il aurait été la preuve que le Premier ministre ose affronter Marine Le Pen, car Xavier Bertrand est l'adversaire numéro un de la cheffe du Rassemblement national. C'est raté.
Sa force: son enracinement local
Sa faiblesse: Le RN a eu sa peau
Probabilité: 0/10
Gérald Darmanin, le (très) ambitieux
L'ancien ministre de l'Intérieur est aussi un élu nordiste, actuel député de Tourcoing, ville dont il a été maire. Darmanin est, pour beaucoup, le nouveau Sarkozy. Même physique. Même pugnacité. Qu'apporterait-il à Bayrou? Un moyen de tenir le camp présidentiel, et de mettre la pression sur Gabriel Attal, chef des députés macronistes pour qu'il soutienne le gouvernement sans faille. Mais à quel poste ministériel? On parle des Affaires étrangères. Or l'International n'a jamais été son domaine et il se retrouverait sur un terrain réservé à Emmanuel Macron.
Sa force: ses réseaux
Sa faiblesse: trop ambitieux
Probabilité: 4/10
Elisabeth Borne, la revenante
L'ancienne Première ministre n'apporterait pas grand-chose à François Bayrou. Elle n'est pas populaire. Elle porte sur ses épaules la très controversée réforme des retraites de 2023. Elle est détestée des socialistes dont elle fut proche, comme collaboratrice de Lionel Jospin entre 1997 et 2002. Cette polytechnicienne est, en revanche, une femme de premier plan. Elle est sérieuse. Et elle n'a pas d'ambition présidentielle.
Sa force: sa compétence
Sa faiblesse: son impopularité
Probabilité: 3/10
Pierre Moscovici, l'argentier
Il serait en effet une «grosse prise». L'ancien ministre des Finances socialiste, ancien Commissaire européen aux services financiers et actuel président de la Cour des comptes, permettrait de rassurer les marchés. Il sait ce que veut dire un «choc fiscal» pour augmenter les recettes de l'Etat, puisqu'il l'a fait en 2023-2024, avant de reconnaitre que ses compatriotes ont un «ras-le-bol des impôts». Autre avantage: ses réseaux au sein du PS, où il fut jadis l'animateur de la mouvance fidèle à Dominique Strauss-Kahn. Preuve que François Bayrou regarde dans toutes les directions pour restaurer la crédibilité financière de la France: un autre ex-Commissaire européen, Thierry Breton, également ancien ministre des Finances, serait aussi sur la liste.
Sa force: son CV
Sa faiblesse: détesté par la gauche radicale
Probabilité: 5/10
Laurent Wauquiez, le mousquetaire
L'actuel patron des députés «Les Républicains» verrouillerait le soutien de son groupe parlementaire. Le plus important, toutefois, est qu'il serait moins dangereux dans le gouvernement qu'en dehors, car il traine derrière lui une réputation de traitre patenté. La presse a toutefois fait savoir, dimanche, qu'il aurait dit non, car un seul ministère l'intéresse: celui des Finances.
Sa force: sa capacité de nuisance
Sa faiblesse: faiblesse de son parti
Probabilité: 2/10
Et la valse des noms n'est bien sûr pas terminée! On sait par exemple que l'ancien maire socialiste de Dijon François Rebsamen (brièvement ministre du Travail sous François Hollande) est partant. L'ex-candidate à la présidentielle PS Ségolène Royal s'est à plusieurs reprises dite «disponible». L'ancien patron du syndicat réformiste CDFT Laurent Berger aurait pour sa part décliné. On évoque aussi le nom de l'ancien Premier ministre Jean Castex, aujourd'hui patron du métro parisien…
Le carrousel de la politique française n'a pas fini de tourner… (à vide?)