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Les cinq échecs de l'Europe face aux migrants

Pour répondre à l'afflux de migrants sur l'île italienne de Lampedusa, Ursula von der Leyen a proposé un plan en dix points. Mais au delà de l'urgence, l'Union européenne s'avère aujourd'hui impuissante et tragiquement désunie.
Publié: 18.09.2023 à 12:46 heures
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Dernière mise à jour: 18.09.2023 à 12:54 heures
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La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen était sur l'île de Lampedusa lundi. Elle a ensuite proposé un plan d'urgence en dix points aux côtés de la Première ministre italienne Giorgia Meloni.
Photo: imago/ZUMA Press
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Richard WerlyJournaliste Blick

Le piège migratoire est-il en train de se refermer sur la Première ministre italienne Giorgia Meloni? Arrivée au pouvoir voici tout juste un an, la dirigeante du parti d’extrême-droite «Fratelli d’Italia» avait promis à ses compatriotes un blocus naval pour endiguer le flot des migrants venus par bateaux s’échouer sur les côtes de la péninsule. Or rien n’a eu lieu et ces jours-ci, l’explosion du nombre de migrants arrivés sur l’île de Lampedusa prend des allures d’impasse. Sur place ce dimanche 17 septembre, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a proposé en urgence un plan en dix points. Mais plusieurs pays membres de l’Union le refusent déjà. Voici les cinq échecs européens qui font du sujet migratoire une bombe politique.

Ursula von der Leyen à Lampedusa en images

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Échec N°1: La Commission européenne est impuissante

Le plan en dix points proposé dimanche à Lampedusa par Ursula von der Leyen ne change pas du tout la donne. Il ne fait, en réalité, que demander la mise en œuvre immédiate des principes du «pacte sur la migration» que le Parlement européen a adopté le 20 avril, mais auquel les 27 États-membres n’ont toujours pas donné leur feu vert.

La présidente de la Commission européenne veut ainsi renforcer l’assistance à l’Italie de Frontex, l’agence de protection des frontières extérieures de l’espace Schengen, dont la Suisse est membre. Elle promet d’intensifier la surveillance des mers et «d’étudier les options pour étendre ses missions navales en Méditerranée.

Son plan veut également faciliter le transfert des personnes arrivées à Lampedusa dans d’autres pays membres, au lieu d’être embarqués vers la Sicile. La réalité? Tout le monde traîne les pieds. Même la Belgique, pourtant éloignée de la Méditerranée, a par avance répondu non. La vérité? Tous les gouvernements prient pour que les conditions météorologiques se dégradent avec l’arrivée de l’hiver, et ralentissent les flots de bateaux de passeurs.

Échec N°2: Le blocus naval est impossible

Cette idée lancée par Giorgia Meloni durant sa campagne électorale n’a pas été mise en œuvre par les autorités italiennes. Pourquoi? Tout simplement parce qu’un blocus naval anti-migrants est bien trop coûteux, bien trop risqué sur le plan humanitaire, et bien trop compliqué à organiser au moment où les marines des pays membres de l’Union sont occupées à d’autres missions, comme la surveillance des navires et sous-marins russes, ou les entraînements de l’OTAN.

On oublie trop vite que la conséquence du blocus naval serait, obligatoirement, la prolifération des morts en mer. Début juillet, le naufrage d’un navire chargé de migrants arraisonné par un garde-côte grec l’a démontré, avec près d’une centaine de morts et plus de cent disparus. Surveiller la Méditerranée est une chose. Bloquer les bateaux en est une autre.

Échec N°3: Les «hotspots» ne fonctionnent pas

Là aussi, il faut arrêter de jouer sur les mots. Le lexique européen sur les migrants interdit de parler de camps de rétention ou de tri des demandeurs d’asile. Les centres construits sur l’île grecque de Lesbos ou à Lampedusa (pour 400 personnes alors qu’ils sont des milliers à accoster) se nomment «hotspots». Il sont supposés permettre aux migrants d’être accueillis et de demander l’asile, mais sans pouvoir en sortir. Or l’exemple de Lampedusa montre que cela ne marche pas.

Plus problématique: la proposition européenne – ne pas considérer automatiquement comme demandeur d’asile un migrant qui a posé le pied sur le sol européen – n’est toujours pas adoptée. Les recours juridiques sont donc immédiats. Le Royaume-Uni a déclenché la colère des associations humanitaires en ouvrant un «centre flottant» pour les migrants, sur une péniche. L’exemple risque malheureusement de faire des émules.

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Échec N°4: La répartition volontaire est un leurre

Il faut là aussi dire les choses comme elles sont. L’acceptation volontaire d’une réinstallation des migrants sur leur territoire ne sera jamais acceptée par tous les États membres de l’Union. Et ceux qui s’y opposent refuseront à coup sûr de payer une contribution supplémentaire, comme le requiert le pacte pour la migration et l’asile présenté par la Commission en septembre 2020, c’est-à-dire il y a trois ans!

Comment obliger les gouvernements de pays comme la Pologne ou la Hongrie, déjà privés de certains fonds européens en raison des atteintes à l’État de droit, à s’acquitter de cette «indemnité migratoire» puisqu’ils refusent d’ouvrir leurs frontières? Comment justifier alors qu’ils assument, sur leurs épaules, le poids de l’immigration en provenance d’Ukraine?

Échec n°5: La Tunisie est une passoire

On a beaucoup dit que la Turquie fait un chantage migratoire à l’Union européenne depuis la signature d’un accord en 2016 entre Bruxelles et Ankara, moyennant l’octroi de six milliards d’euros d’aide pour continuer d’accueillir les migrants sur son sol. Ce n’est pas faux et la Grèce en sait quelque chose.

Mais le flot, sur le flanc oriental de l’Europe, s’est largement tari, à la fois en raison des contrôles turcs et de la construction de murs dans les pays frontaliers, comme c’est le cas en Grèce le long de la rivière Evros. Le gros problème, en revanche, vient de la Tunisie. L’accord signé avec ce pays en juillet prévoit prés de 800 millions d’euros d’aide, mais la déliquescence de l’État tunisien rend presque impossible son application. La région de Zarsis, dans le sud de la Tunisie, à la frontière de la Libye, est emblématique de ce chaos. Les pêcheurs locaux sont aussi des passeurs. Lampedusa est à moins de 150 kilomètres. Bref, la Tunisie paraît aujourd’hui vouée à rester une passoire migratoire.

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