Giorgia Meloni vient d’administrer une redoutable leçon de politique à tous ceux qui l’estimaient incapables de diriger la péninsule. A 45 ans, la dirigeante de Fratelli d’Italia, ce parti d’inspiration fasciste aujourd’hui transformé en une force nationale populiste consciente des enjeux économiques qui pèsent sur l’Italie, accède sans coup férir au palais Chigi, le siège du gouvernement à Rome.
Et ce, après avoir tenu à distance, depuis la victoire de la coalition de droite aux législatives du 25 septembre, ses principaux partenaires Matteo Salvini (Lega) et Silvio Berlusconi (Forza Italia), dont l’irritation était d’ailleurs perceptible ces derniers jours.
Antonio Tajani aux Affaires étrangères
Certes, l’ancien ministre de l’Intérieur Matteo Salvini, admirateur non repenti de Vladimir Poutine, hérite de la vice-présidence du Conseil et du poste de ministre des infrastructures et des transports. Certes, Silvio Berlusconi, 86 ans, place son bras droit Antonio Tajani au poste de ministre des Affaires étrangères. Mais derrière cette vitrine, Giorgia Meloni a prouvé en un mois sa maîtrise des dossiers et sa capacité à s’imposer.
Sa première prouesse a été de requérir l’aide du président du conseil sortant, Mario Draghi, pour rassurer l’Union européenne. Et voilà qu’au final, le crucial poste de ministre des Finances, dans un pays endetté à hauteur de 150% de son produit intérieur brut, échoit à Giancarlo Giorgetti, jusque-là chargé du développement économique. Les 123 milliards d’euros de prêts européens, alloués à l’Italie dans le cadre du plan de relance Next Generation EU approuvé en juillet 2020, devraient donc être sécurisés.
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Cette confirmation de l’habileté politique de la dirigeante d’extrême-droite, proche du premier ministre hongrois Viktor Orbán, adversaire résolu des règles Bruxelloises en matière d’État de droit, est un message clair adressé à ses futurs partenaires européens. Alors que l’octogénaire milliardaire Berlusconi multiplie les gaffes, frustré de ne pas avoir obtenu la présidence du Sénat, ceux qui espèrent la voir trébucher rapidement risque d’être déçus.
Giorgia Meloni a solidement en main les clés du pays dans lequel l’alliance des droites, rappelons-le, n’a obtenu que 43% des voix, dont 26% pour «Fratelli d’Italia». Inutile donc de la diaboliser. Inutile aussi d’attendre une première faute rapide. Son diplomate en chef, Antonio Tajani, a présidé le parlement européen après avoir été Commissaire européen. Autant dire qu’il sera difficile de le faire trébucher.
L’heure du «donnant-donnant»
L’heure, maintenant, doit donc être au «donnant-donnant» avec la troisième économie de la zone euro, dont les exigences en matière de solidarité, surtout sur le sujet de l’immigration, sont légitimes. Emmanuel Macron, qui pourrait rencontrer Giorgia Meloni le 24 octobre lors de sa visite à Rome et au Vatican, en a bien conscience.
L’Italie, pays fondateur de l’Union européenne, a des devoirs autant que des droits. Les garanties données par sa nouvelle présidente du Conseil sur son engagement aux côtés des États-Unis et de l’OTAN pour l’Ukraine face à la Russie de Poutine sont aussi des marqueurs à surveiller.
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Rien n’est pire que de vouloir nier les évidences. La vérité est aujourd’hui que Giorgia Meloni, cette politicienne longtemps fascinée par Benito Mussolini, est aux commandes de l’Italie.
De Paris à Berlin en passant par Bruxelles, ses partenaires doivent d’emblée dire leurs exigences, non pour nier la volonté politique des électeurs italiens, mais pour lui rappeler que les engagements pris au niveau communautaire le sont par des États, non par des gouvernements.
La nouvelle présidente du Conseil a promis de défendre coûte que coûte les intérêts de ses Italiens. Soit. Mais elle doit démontrer que son grand pays accepte aussi les règles du jeu à 27. La solidarité ne peut être que le résultat d’une confiance mutuelle. La défiance, à l’inverse, ne fait que nourrir les égoïsmes.