Environ 6000 kilomètres carrés dans la région de Kharkiv sont de nouveau sous contrôle ukrainien après des mois d’occupation russe. Et le succès de cette contre-offensive n’est pas le fruit du hasard.
Comme le rapporte le «New York Times», l’Ukraine s’est fait conseiller par des militaires américains au cours des derniers mois. Le président ukrainien Volodymyr Selenski a également participé à ces nombreux entretiens. Voici ce qu’il aurait déclaré lors de l’un d’entre eux, pour appuyer ses ambitions: «Je veux faire un pas significatif pour montrer que nous pouvons repousser l’invasion russe».
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Retournons quelques semaines en arrière. Au moment des discussions avec les Américains, la situation en Ukraine est dramatique. Chaque jour, le pays enregistre des centaines de morts, tandis que les troupes russes continuent d’avancer et de ravager les villes les unes après les autres.
Les chances de réussite d’une offensive de libération semblent donc faibles. Très faibles, même. Rappelez-vous: lorsque la guerre a éclaté en février, l’Ukraine disposait principalement d’armes et de munitions datant de l’époque de l’Union soviétique. Très vite, les munitions ont manqué et l’armée ukrainienne a dû apprendre à utiliser les armes modernes occidentales directement sur le front.
Volodymyr Selenski n’a toutefois jamais voulu abandonner l’idée d’une contre-offensive. D’autant plus que l’armée ukrainienne a conservé un avantage de taille sur l’armée russe: sa motivation à protéger son pays est restée intacte au fil du temps. Dans les rangs des militaires russes, c’est tout l’inverse qui s’est produit: la volonté s’est effritée et les critiques à l’encontre du Kremlin se sont progressivement multipliées.
Une stratégie machiavélique
Voici ce que prévoyait le plan de la contre-offensive. Il devait y avoir deux attaques simultanées. L’une dans la région de Kharkiv, l’autre à Kherson, dans le sud. En plus de leur appui stratégique, les Américains ont envoyé à l’Ukraine les armes dont elle avait besoin pour l’attaque. Les Ukrainiens n’avaient plus qu’à choisir le bon moment avant de frapper.
Dans le même temps, Moscou aurait eu vent du projet d’offensive. «Nous avons pu voir que les Russes déplaçaient une grande partie de leurs meilleures forces vers le sud pour se préparer à la contre-offensive ukrainienne», explique Colin Kahl, chef du Pentagone, au «New York Times».
Alors que les troupes de Vladimir Poutine se préparaient visiblement à une seule tentative massive, la région de Kharkiv est devenue le talon d’Achille des Russes. L’Ukraine a vu la fenêtre de tir… et ne l’a pas manquée.
Les planètes s’alignent enfin
Le timing a été décisif pour le succès de la contre-offensive. Elle devait avoir lieu avant les premières neiges et surtout avant que le président russe ne puisse utiliser son contrôle sur l’approvisionnement en gaz pour faire pression sur l’Europe.
La semaine dernière, les planètes se sont enfin alignées: l’armée ukrainienne a attaqué dans le nord-est, dans la région de Kharkiv, et a reconquis les localités les unes après les autres. Les troupes russes n’ont eu d’autre choix que de fuir. Elles ont même laissé leurs armes sur place. Personne ne s’attendait à une telle victoire.
Aujourd’hui, les combats continuent. À Kherson, il pourrait encore s’écouler des semaines avant qu’une victoire claire ne se dessine. Car beaucoup de troupes russes y sont stationnées et sont prêtes à en découdre.
Mais l’Ukraine a également remporté une autre victoire symbolique: Moscou voulait faire voter sur le rattachement des régions du sud à la Russie. À cause des attaques, les votations ont dû être reportées. Jusqu'à quand? Nul ne le sait.
Sans trop s'avancer, il est désormais clair que l’armée russe a été énormément affaiblie par le sursaut ukrainien. «Rien n’est encore joué», tempère cependant Colin Kahl. «Mais je pense que la contre-offensive prouve au monde que les Ukrainiens sont capables de mener des opérations complexes et offensives.»