Petite devinette: qu'est-ce qui est à peu près aussi populaire qu'une fondue suivie d'une meringue crème double sous la canicule? Réponse: le dossier électronique du patient (DEP), ce document censé jouer le rôle d'interface entre les médecins et leurs patients. Et qui «pétouille» depuis des années...
En effet, seuls 20'000 dossiers ont été ouverts jusqu'en mai. Beaucoup trop peu, selon l'OFSP, qui a donc lancé une campagne de promotion. Objectif: convaincre d'abord les hôpitaux, puis, à partir de l'année prochaine, le grand public, de l'utilité du DEP.
Dans un premier temps, l'OFSP va dépenser 3,6 millions de francs pour des affiches avec des slogans tels que «Le DEP est efficace». Une éventuelle prolongation de la campagne jusqu'en 2027 pourrait coûter quelque 1,5 million de francs supplémentaires.
Tous ces moyens mis en œuvre agacent profondément la conseillère nationale Sarah Wyss (PS/BS): «Ce sont des millions de francs jetés purement et simplement par la fenêtre.» L'élue socialiste, qui travaille elle-même dans les services psychiatriques à Berne, articule également une critique de fond: «Le modèle actuel du dossier électronique du patient ne profite ni aux hôpitaux ni aux patients.»
Les hôpitaux ne sont pas de la partie — alors qu'ils devraient l'être
Par conséquent, Sarah Wyss craint que ceux qui se constituent désormais un dossier médical électronique soient déçus. «Le DEP est actuellement un cimetière de documents. Il ne fonctionne pas, parce que tout est facultatif.» Comprenez que le DEP n'offrirait selon elle guère d'avantages en l'état.
Et pour cause: seuls 44% de tous les hôpitaux et 33% des établissements médico-sociaux sont connectés, bien qu'ils devraient tous l'être, selon la loi. Un vœu pieux, dès lors qu'il n'y a pas de sanctions et apparemment peu d'incitations à participer.
Sarah Wyss ne s'oppose pas fondamentalement au dossier médical numérique, mais préconise un temps d'arrêt, «au lieu de gaspiller beaucoup d'argent maintenant». Du point de vue de la Bâloise, le DEP doit d'abord être amélioré... avant d'être promu.
Améliorer le DEP, c'est ce que visent les services d'Alain Berset. Le ministre de la Santé a ainsi mis un projet en consultation pour augmenter l'attrait du dossier électronique. Objectif: forcer également les médecins de famille, les pharmaciens et les physiothérapeutes à utiliser le DEP en plus des hôpitaux. Selon le projet — qui avance dans les méandres de l'administration, les particuliers devraient aussi recevoir automatiquement un dossier. Ceux qui ne le souhaitent pas devraient activement le signifier.
Pas de quoi enthousiasmer Sarah Wyss: «D'un point de vue technique, le dossier électronique reste un amas de PDF... Bien sûr, si beaucoup de gens l'utilisent, il s'améliorera aussi sur le plan technique». Pour elle, il est toutefois clair que si le DEP devient obligatoire, il faudra informer la population. «C'est pour cela qu'il faut dépenser de l'argent.»
Le dossier médical reçoit de nouvelles fonctions
Qu'en dit l'Office fédéral de la santé publique? L'OFSP admet que le DEP n'est pas encore parfait. «Mais il fonctionne et est amélioré en permanence», relève son service de communication. Le fait que toutes les informations sur la santé soient réunies en un seul endroit serait une «nette amélioration par rapport à aujourd'hui». Cela laisserait plus de temps pour le suivi médical et permettrait d'éviter des actions non coordonnées entre praticiens.
De plus, de nouvelles applications seraient ajoutées en permanence. «Le certificat de vaccination électronique sera par exemple bientôt disponible.» Des développements ultérieurs — tout comme le plan de médication et les ordonnances électroniques qui suivront — ne dépendant pas de la proposition d'Alain Berset.
«Le DEP gagne ainsi en vitesse», relève encore l'OFSP. Mais pour que le dossier médical numérique puisse déployer tous ses effets, son utilisation doit être encouragée. C'est donc le bon moment pour le faire connaître, concluent les représentants de l'office pour justifier leur coûteuse campagne.