Au secours Platoche! Au secours Zizou! La Fédération française de football (FFF) a plus que jamais besoin de ses idoles pour redorer son blason, après la démission piteuse de son ex-homme fort, son président sortant Noël Le Graët. À 81 ans, l’entrepreneur breton qui régnait sur la plus puissante fédération sportive de France a lâché prise le 28 février, pour aussitôt se voir offrir une voie de garage par le président de la FIFA, Gianni Infantino. L’ex-boss de la FFF dirigera le bureau parisien de la FIFA en cette année plutôt consacrée au ballon ovale, puisque la France accueillera la Coupe du monde de rugby du 8 septembre au 28 octobre prochain.
Soit. Affaire réglée. Mais comment faire pour recoller les morceaux d’un ballon rond pulvérisé par la descente aux enfers de son ancien «parrain», accusé de népotisme et de harcèlement, ce qu’il nie toujours aujourd’hui avec force?
Platini-Zidane, un possible tandem?
Deux noms circulent évidemment. Et le plus intéressant est qu’ils circulent ensemble, sans doute dans le but d’animer les jeux de pouvoir footballistiques d’ici à l’assemblée générale de la «3F» (le surnom de la FFF) qui aura lieu le 10 juin, et de dissuader l’actuel président intérimaire, Philippe Diallo, de se rêver en futur chef. Tous deux portaient le numéro 10. Tous deux ont mené les Bleus au sommet, même si Michel Platini n'a remporté «que» l'Euro, alors que Zinédine Zidane a tout gagné. Tous deux ont l’expérience de responsabilités politico-sportives.
Michel Platini, 67 ans, est l’homme qui aurait dû présider le football mondial depuis le siège zurichois de la FIFA s’il n’était pas tombé dans le piège qu’il s’est tendu lui-même en liant son destin à celui de Sepp Blatter. Zinédine Zidane, 50 ans, est l’homme qui attend la main tendue des autorités françaises, après avoir brillé à la tête du Real Madrid (onze titres internationaux et espagnols comme entraîneur, dont trois sacres en Ligue des champions). Le seul fait de prononcer leurs noms donne des frissons aux supporters français de plusieurs générations. Platoche et Zizou, ou la France du football telle qu’on la rêve: celle des ballons aux pieds, du rêve réalisé par des enfants d’immigrés, de la «vista» de niveau mondial et de la notoriété internationale… Bref, le cocorico «global».
Didier Deschamps, pas menacé
Mais pour quels rôles? Et dans quelles fonctions? Première évidence: le poste d’entraîneur des Bleus n’est pas disponible puisque Didier Deschamps, l’homme aux deux titres mondiaux (l’un comme joueur, l’autre comme entraîneur) a été reconduit début janvier par Noël Le Graët jusqu’en 2026. Difficile d’imaginer son éviction, alors que son bilan est auréolé de deux étoiles et qu’il s’en est fallu d’un cheveu, lors de la finale du Mondial qatari, le 18 décembre 2022, pour qu’une troisième vienne s’accrocher au maillot des Bleus.
Reste donc l’idée du tandem à calendrier différé: Platini pour présider la Fédération à partir de juin, fort de son acquittement en juillet 2022 (tout comme Sepp Blatter) par le Tribunal pénal fédéral de Bellinzone. Et Zidane dans un poste taillé sur mesure de directeur sportif, au côté de Didier Deschamps. Michel Platini, rappelons-le, a entraîné les Bleus entre 1988 et 1992. Les journalistes sportifs français qui font circuler ces rumeurs se régalent. Impossible de rêver plus belle affiche à la «3F»!
Alors, partants? Pour l’heure, ni l’un ni l’autre ne commentent. Zidane s’est juste contenté d’accepter les excuses de Noël Le Graët, qui l’avait rudoyé dans son fameux entretien à RMC le 9 janvier, affirmant qu’il n’aurait même pas décroché son téléphone si Zizou lui avait proposé de succéder à Deschamps. Logique. L’ex-entraîneur du Real Madrid est connu pour sa sobriété verbale et sa susceptibilité.
Platini, lui, laisse dire ses supporters. L’ex-Nancéen dispose d’une licence en Meurthe-et-Moselle, au sein du Val de l’Orne Football Club, dont il est l’un des dirigeants… depuis 2014, et dont le stade porte son nom. L’histoire serait donc parfaite. Retour en Lorraine pour un nouveau départ, après avoir présidé l’UEFA de 2007 à 2015. Un beau roman tricolore…
Quand Noël Le Graët balançait sur Zidane à RMC:
La suite? Elle est en train de s’écrire. La ministre des Sports française, Amélie Oudéa-Castera, qui a précipité la chute de Noël Le Graët, pourrait avoir quelques objections, vu les compromissions supposées de Platini avec les dirigeants du Qatar, via l’entremise de l’ancien président Nicolas Sarkozy. Zinédine Zidane est d’ailleurs aussi assez proche de l’Émirat, puisqu’il a soutenu le Mondial à Doha.
Possible d’oublier au passage les nuages (exploitation des travailleurs, corruption...) associés à cette compétition? La réponse est sans doute oui. Avec l’organisation à venir des Jeux olympiques d’été en 2024 à Paris, la fidélité de sponsors aux poches pleines, comme le Qatar, ne se refuse pas.