L'Ukraine à la merci du «deal»
Faire confiance à Trump et à Poutine, ce choix terrible

Le sort de l'Ukraine dépend du «deal» que réussiront à forger, ou non, Donald Trump et Vladimir Poutine. L'on peut légitimement s'en inquiéter, et le regretter. L'on doit aussi reconnaitre que la paix a retrouvé une chance estime notre journaliste Richard Werly.
Publié: 14.03.2025 à 13:48 heures
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Dernière mise à jour: 14.03.2025 à 15:32 heures
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Vladimir Poutine peut-il troquer son uniforme de chef de guerre pour celui d'homme de paix?
Photo: keystone-sda.ch
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Richard WerlyJournaliste Blick

Il faut oser faire confiance à Donald Trump et Vladimir Poutine. Ce choix est terrible. Au vu du caractère et des ambitions de ces deux présidents, convaincus que la seule loi qui vaille est celle du plus fort et du respect sans scrupules des sphères d’influences respectives de leurs pays, parler de confiance est presque une insulte pour les Ukrainiens qui se battent, et pour les Européens dont le sort dépend d’un éventuel futur «deal» au-dessus de leurs têtes entre Washington et Moscou. Et pourtant! Quelle autre alternative?

La paix est, toujours, le résultat d’un rapport de force. Il peut être militaire, et permettre au vainqueur sur le champ de bataille d’imposer sa loi. Ce fut le cas, rappelons-le, les 8 et 9 mai 1945 lorsque les alliés occidentaux et l’Union soviétique obtinrent la capitulation sans condition de l’Allemagne nazie, dont l’on commémorera bientôt le 80e anniversaire.

Ce rapport de force peut aussi être politique, conséquence de pressions et (toujours) de la situation sur le terrain, comme le furent les accords de paix conclus entre Israël et l’Egypte (1978) puis la Jordanie (1994).

Réalité des faits

Jamais, en revanche, la paix ne peut tenir lorsqu’elle nie la réalité des faits, des forces en présence, de l’intransigeance des régimes en place et des aspirations des peuples. On pense au Vietnam, où les accords de Genève signés par la France en 1954, puis ceux de Paris signés par les États-Unis en 1973 échouèrent à terminer la guerre. A la fin, les communistes l’emportèrent. Et Saïgon tomba le 30 avril 1975.

Le cas de l’Ukraine est aujourd’hui à la croisée des chemins. Le président démocratiquement élu de la première puissance mondiale, Donald Trump, a décidé de tenir sa promesse électorale en imposant sa paix dans ce lointain pays européen qu’il associe à son prédécesseur Joe Biden (et aux affaires sur place de son fils Hunter), et dont il méprise ouvertement le président lui aussi élu, mais dont le mandat s’est achevé en 2024.

Une paix durable

En face, le dirigeant autoritaire russe (réélu avec 87% des voix le 17 mars 2024) veut obtenir coûte que coûte la transformation de l’Ukraine en un pays vassal qui ne remette plus jamais en cause la prééminence de la Russie et l’annexion par celle-ci d’environ 20% de son territoire internationalement reconnu depuis l’éclatement de l’ex-URSS, et accepté par Moscou lors de la signature des mémorandums de Budapest, lorsque l’Ukraine abandonna ses armes nucléaires.

Est-ce possible, dans ces conditions, qu’une paix durable sorte d’un tel «deal» Trump-Poutine? Oui malgré tout, si la base de leur accord tient compte des exigences légitimes de l’Ukraine, et s’accompagne de garanties crédibles pour ce pays et pour l’Europe. C’est cela qui, aujourd’hui, importe le plus. C’est sur cela que les Européens, ensemble, doivent exercer une pression maximale, quitte à priver les Présidents russes et américains de leur show pacifique annoncé.

Le prix à payer

Oui, il faut faire le choix terrible de faire confiance à Trump et à Poutine. Mais certainement pas à n’importe quel prix. Et sûrement pas en laissant l’avenir des Ukrainiens, et le nôtre, se décider à huis clos entre deux hommes dont la vie politique et la carrière ont toujours été constellées de mensonges et de violations de leurs accords antérieurs.

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