Son quartier général à Zurich n'a pas bougé d'un iota, mais la Migros telle qu'elle était autrefois n'existe plus pour de nombreux collaborateurs du siège principal.
«J'ai commencé à travailler pour Migros parce que je m'identifiais fortement aux valeurs sociales de l'entreprise», explique une jeune femme dans un entretien accordé à Blick. Mais récemment, elle a dû assister au licenciement de plus d'un tiers des collègues dans son département, dont des femmes enceintes et des jeunes mères. «Cela a fait extrêmement mal et m'a profondément bouleversée.»
Au total, environ 150 personnes ont perdu leur emploi cette semaine chez Migros Supermarché SA, 100 autres ont reçu un congé de modification. L'objectif de ce démantèlement, auquel a participé la tristement célèbre société de conseil McKinsey: rendre le géant orange plus attractif en termes de prix, gagner du terrain face aux discounters allemands – et redevenir plus rentable.
Quand le prix prend le pas sur l'environnement
Dans le domaine du marketing et de la communication, la coupe a été particulièrement brutale. Ce n'est pas un hasard. En effet, le nouveau management autour de Mario Irminger compte redéfinir l'image de Migros. A l'avenir, ce n'est plus le développement durable qui doit être mis en avant, mais le prix.
Christopher Rohrer, responsable de la direction du développement durable du groupe Migros depuis janvier 2024, confirme les informations de Blick à ce sujet: «Le développement durable aura moins de place dans le marketing classique, au lieu de cela, nous mettrons davantage en avant nos avantages en termes de prix.»
Ces dernières années, Migros a donné le ton en matière d'efforts pour le climat et d'environnement, selon Christopher Rohrer. Entre-temps, la concurrence lui a emboîté le pas dans de nombreux domaines: «Migros a par exemple défini il y a des années déjà l'objectif du zéro net d'ici 2050, et aujourd'hui presque tout le monde s'en réclame. Cela n'a donc pas beaucoup de sens de continuer à jouer un rôle de pionnier dans ce domaine.»
Moins d'«actions irréfléchies»
Même le titre de «détaillant le plus durable du monde», dont l'entreprise s'est fièrement parée pendant des années, n'est plus une priorité absolue: «Renoncer à certaines mesures peut avoir pour conséquence que nous devions à l'avenir renoncer au label de 'détaillant le plus durable du monde'», explique Christopher Rohrer. «Au lieu de belles campagnes de marketing, nous préférons avoir un impact réel en arrière-plan.»
Il déclare la guerre aux «actions irréfléchies» qui causent plus de dommages que de bénéfices: «Si nous exigeons par exemple pour la viande importée les mêmes normes animales qu'en Suisse, cela semble formidable. Mais si les consommateurs achètent ensuite leur viande importée simplement chez la concurrence parce qu'elle y est moins chère, cela ne sert strictement à rien pour le bien-être des animaux – et Migros perd des parts de marché.»
Migros s'est «dispersé»
Le nouveau chef estime que Migros s'est «dispersé» par le passé dans ses efforts de développement durable. Une donne qui devrait changer: «Avec la nouvelle organisation, mon équipe et moi faisons désormais tout d'une seule main. Ce faisant, nous ne nous focalisons pas seulement sur l'industrie et les supermarchés, mais aussi sur les secteurs de la finance et de la santé.»
Malgré ce changement de paradigme, Migros maintient ses objectifs de développement durable, assure Christopher Rohrer. «Mais nous n'investissons plus inutilement des millions pour obtenir des applaudissements pour des mesures populaires, mais peu efficaces. Au lieu de cela, nous misons de plus en plus sur des adaptations en arrière-plan qui seront effectivement décisives pour le bilan climatique.»
Des employés mécontents s'en vont
Les déclarations du nouveau chef de la durabilité sont une attaque frontale contre ses prédécesseurs. Au siège de Zurich, nombreux sont ceux qui se sentent mis à l'écart. Certains, mécontents de ce changement de cap, ont donc commencé à chercher un nouveau poste il y a des mois déjà.
Mais les nouvelles directives émanant de Zurich provoquent aussi de la nervosité chez les partenaires commerciaux, par exemple chez Bio Suisse. Migros avait annoncé que la plupart des produits de sa propre marque «Migros Bio» seraient convertis au label Bourgeon de Bio Suisse d'ici fin 2025. Mais aujourd'hui, cette adaptation coûteuse est à nouveau en discussion.
Blick a récemment appris que la nouvelle équipe dirigeante examine actuellement si Migros a vraiment besoin du label Bourgeon sur tous ses produits bio. Rien n'est encore décidé. Mais c'est justement pour les produits importés que certains membres de la direction se demandent s'il est vraiment judicieux de payer des millions en droits de licence pour le Bourgeon. Dans ce cas-là aussi, le prix va primer.