Des experts s'inquiètent
«Le fiasco de Lausanne va se reproduire à la gare de Genève!»

Les CFF transforment la gare de Genève à partir de 2027 et jusqu'en 2035. Un délai jugé «irréaliste» ou encore «intenable» par plusieurs experts contactés par Blick, qui craignent de revivre la même déconvenue qu'à Lausanne. L'ancienne régie fédérale, elle, rassure.
Publié: 24.05.2023 à 13:20 heures
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Dernière mise à jour: 24.05.2023 à 13:24 heures
Les CFF souligne que, «comme c’est d’usage dans les grands projets, le planning intentionnel est fixé sous réserve d’une autorisation de construire et d’éventuels aléas durant le chantier». (Image d'illustration)
Photo: Keystone
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Antoine HürlimannResponsable du pôle News et Enquêtes

Est-ce la prochaine couleuvre à avaler pour les Romandes et les Romands? L’extension souterraine de la gare de Genève, devisée à 1,6 milliard de francs et prévue pour 2035, pourrait prendre du retard. L’oiseau de mauvais augure qui le prédit n’est pas n’importe qui.

Dans un long entretien avec Blick, Vincent Kaufmann, professeur de sociologie urbaine et d’analyse des mobilités à l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), estimait sur nos plateformes le 19 mai dernier que, avant 2037, on n’en verrait pas la couleur. Deux autres experts contactés par nos soins — qui souhaitent rester anonymes — appuient cette analyse. Et vont même plus loin.

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«Articuler la date de 2037 me paraît même optimiste»
Une source qui connaît bien le dossier
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«L’horizon annoncé par les CFF est tout simplement irréaliste», amorce notre première source, qui connaît bien le dossier. «On peut dire ce qu’on veut, mais, je le répète: l’échéance est intenable, enchaîne-t-elle. Articuler la date de 2037 me paraît même optimiste.»

Notre second spécialiste abonde. Et lâche une formule choc: «Le fiasco de Lausanne va se reproduire à la gare de Genève! L’agenda avancé par les CFF fonctionnerait si nous étions dans un monde idéal. Or, nous ne sommes pas dans un monde idéal. A force de se casser les dents, les CFF devraient bien le savoir.»

Le gouvernement est préoccupé

Face à ces inquiétudes, qu’en dit le politique? Selon les informations du Conseil d’État, les travaux de la gare de Genève seront-ils terminés dans les délais? À ce stade, des retards sont-ils d’ores et déjà prévus? Que peut faire le gouvernement pour éviter que la déconvenue lausannoise ne se reproduise?

Nous avons posé ces questions au Ministre en charge du Département des infrastructures sur le départ, Serge Dal Busco. Il souligne d’abord dans un courriel que, pour Genève, «l’extension de la gare Cornavin est évidemment cruciale, car nous devons impérativement développer durablement l’offre et la capacité ferroviaires».

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«A ce stade, des risques de difficultés pour ce chantier extrêmement complexe ne peuvent pas être écartés»
Serge Dal Busco, conseiller d'État en charge du Département des infrastructures
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Diplômé de l'École polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) et de l'EPFL, l’ingénieur de formation ne dissimule pas ses craintes: «Nous suivons de près l’évolution du projet avec la direction des CFF et l’Office fédéral des transports (OFT). A ce stade, des risques de difficultés pour ce chantier extrêmement complexe ne peuvent pas être écartés, et c’est une vraie préoccupation pour notre canton, mais il serait prématuré de tirer des conclusions ou d’articuler des délais.»

Les CFF rassurent

Décidément, tout le monde semble anticiper un retard au bout du Léman. Sauf… les CFF. «Les deux projets de gares de Lausanne et Genève n’ont rien en commun, assène dans un e-mail Frédéric Revaz, porte-parole de l’ancienne régie fédérale. A Lausanne, les CFF reprennent le projet pour rendre la gare plus capacitaire, ce qui implique un retard de quatre ans. A Genève, le projet de gare souterraine suit son cours comme prévu selon le planning déterminé avec les commanditaires (Ville, Canton, OFT).»

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«Les calendriers sont dépendants des procédures!»
Frédéric Revaz, porte-parole des CFF
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Le communicant développe son argumentaire. «Comme c’est d’usage dans les grands projets, le planning intentionnel est fixé sous réserve d’une autorisation de construire et d’éventuels aléas durant le chantier. Les calendriers sont dépendants des procédures! Cela induit toujours des risques de reports. Il s’agit de facteurs externes, sur lesquels les CFF n’ont que peu d’emprise.»

Toujours selon Frédéric Revaz, la plus grande entreprise de transport du pays a prévu de transmettre le dossier en été 2024 à l’OFT. «Le projet de gare souterraine pourrait être mis à l’enquête publique dans les trois ans et la durée des travaux est évaluée à huit ans environ, détaille-t-il. Ce qui donne un horizon de mise en service à 2035.»

Interrogé sur les raisons qui font que la fin du chantier — initialement prévue pour 2032 — a déjà été décalée de trois ans, le communicant rappelle que la première mouture des plans «a été modifiée sur décision des commanditaires et des CFF: deux nouveaux passages inférieurs et un tunnel à double voie ont été ajoutés au projet, ce qui a rallongé la planification. Ceci n’est pas une nouveauté; la décision formelle a été prise, après études, en 2021.»

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