Le fera-t-il ou non? C'est la question que se pose l'Europe après les récentes menaces de Vladimir Poutine à l'adresse de la Lettonie, où les politiques réfléchissent à haute voix à l'expulsion forcée de milliers de russophones.
Près de deux ans après son invasion de l'Ukraine, les choix stratégiques du chef du Kremlin peuvent en laisser certains perplexes. D'autres sous-estiment la capacité de défense de l'OTAN et craignent sans raison que le drapeau russe ne flotte bientôt sur Varsovie ou sur Berlin.
Un nouveau rapport du service de renseignement militaire danois permet désormais d'obtenir une image plus nuancée des actions que compte entreprendre le président russe. Blick a pu consulter le document.
Dans ce dernier, les services secrets danois ne s'attendent pas à ce que Vladimir Poutine attaque militairement un État de l'OTAN. Son respect pour l'article 5 est trop grand. Celui-ci stipule que l'ensemble de l'OTAN, y compris la superpuissance militaire américaine, intervient immédiatement en cas d'attaque d'un seul État membre. L'Europe doit se méfier d'une autre menace russe, que la Suisse en particulier ne prend pas assez au sérieux.
En 2024, la Russie tentera par tous les moyens de confondre les peuples européens et de semer le plus de chaos possible. Les cyberattaques contre des services en ligne importants font partie du répertoire d'action des Russes, tout comme le soutien financier d'hommes politiques voulant nuire à l'unité européenne.
Le Conseil fédéral est-il vraiment plus intelligent que les autres?
Les spécialistes danois mettent particulièrement en garde contre les activités de propagande russes visant à créer un sentiment anti-ukrainien et critique envers l'OTAN à l'Ouest. Concrètement, le rapport de 76 pages mentionne la plateforme Russia Today, qui est bloquée dans toute l'UE, mais qui peut toujours être consultée sans problème en Suisse.
En mars 2022, le Conseil fédéral a décidé de laisser la plateforme de propagande continuer à fonctionner. Il est plus efficace de «contrer les propos mensongers et nuisibles par des faits plutôt que de les interdire», écrit le Conseil fédéral. Avec cette position, le gouvernement suisse est seul en Europe.
Les Danois mettent en garde contre de telles actions isolées. Lors d'une intervention devant le Parlement à Copenhague, le ministre de la Défense Troels Lund Poulsen a mis en garde contre le malheur qui menace l'Europe cette année.
La Russie pourrait éventuellement lancer des attaques contre des navires dans la mer Baltique, ou, justement, créer la confusion avec des cyberattaques et vagues de désinformation à grande échelle. Vladimir Poutine veut maintenant tester la réaction de l'OTAN en cas d'urgence.
Le chef du Kremlin aura un avant-goût de la réaction de l'OTAN ces jours-ci avec le plus grand exercice de l'OTAN depuis la guerre froide, qui se déroulera jusqu'en mai dans les pays baltes et en Pologne, aux portes de son pays. 90'000 soldats, des centaines de chars et d'avions de combat y simulent une attaque d'un pays de l'OTAN par un provocateur dont le nom n'est pas précisé. Le message envoyé à Moscou est clair: n'y pensez même pas!
Une guerre pourrait éclater par inadvertance
De telles démonstrations de force de l'OTAN sont importantes. Et en même temps extrêmement risquées, comme le note le rapport des services secrets danois. Il y a un «risque sérieux» que des éléments dans les forces armées russes évaluent mal la réalité de la menace pour la Russie, ou qu'ils se laissent provoquer trop vite et qu'ils réagissent ensuite de manière excessive. Une confrontation directe et involontaire avec la Russie pourrait ainsi avoir lieu en 2024.
Et tandis que l'Occident continue de s'interroger sur ce que Poutine pourrait avoir en tête cette année, l'Ukraine se voit de plus en plus dans une situation désespérée. Un nouveau paquet d'aide de Washington, qui aurait rempli les coffres de guerre et les stocks de munitions de Kiev pour les mois à venir, a été freiné dans les derniers mètres par les Républicains sous la pression du candidat à la présidence Donald Trump. Mercredi, le Congrès se penchera de nouveau sur ce paquet, sans grand espoir.
L'Ukraine a de quoi trembler. Sans l'aide des États-Unis, l'armée russe ne pourra plus être contrée longtemps. Les exercices géants de l'OTAN et les rapports des services secrets danois n'y changeront alors rien.