Le président russe Vladimir Poutine s'est rapproché de son objectif l'année dernière. Gustav Gressel, expert militaire et en Europe de l'Est du groupe de réflexion European Council in Foreign Relations à Berlin, suit de près la guerre en Ukraine et décrit dans une analyse trois scénarios possibles. Le déroulement de la guerre dépend en premier lieu de l'Occident – et des élections aux États-Unis.
L'année dernière, la Russie a réussi à résoudre les principaux problèmes de son armée. Les forces armées ont été utilisées plus efficacement et moins de Russes ont perdu la vie. La production d'armes a été augmentée. Pendant ce temps, le soutien de l'Occident à l'Ukraine a diminué. C'est crucial pour l'année 2024.
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Meilleur scénario: l'Ukraine passe à l'offensive
Le meilleur scénario pour l'Ukraine serait que l'ex-président américain Donald Trump ne soit pas investi pour les élections présidentielles et que Nikki Haley se présente pour les Républicains. Le vainqueur des élections américaines n'aurait alors que peu d'influence.
Mais si Nikki Haley était dans la course et dénonçait l'indécision et la faiblesse des États-Unis lors de la campagne électorale, la balle serait dans le camp du président Joe Biden qui assurerait à l'Ukraine des armes plus nombreuses et plus efficaces. Par exemple des avions de combat F-16 et des missiles ATACMS. «L'Ukraine sera ainsi en mesure de repousser encore plus loin du front les forces aériennes russes et de réduire leur efficacité», décrit Gustav Gressel.
Certes, cela signifierait aussi des pertes pour l'armée ukrainienne, mais en même temps, la formation serait améliorée. L'Ukraine pourrait créer de nouvelles brigades qui manieraient des techniques de pointe. Cela inciterait l'UE à soutenir à nouveau davantage l'Ukraine. À long terme, ce serait un grand atout. «Ainsi, d'ici fin 2024, l'Ukraine aurait créé les conditions nécessaires pour reprendre l'initiative en 2025 et libérer d'autres territoires», évalue Gustav Gressel. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky devrait être satisfait de cette situation.
Scénario moyen: l'Ukraine se maintient sur la défensive
Un chaos lors des élections américaines aurait une influence sur le champ de bataille en Ukraine. Si Joe Biden était freiné par les Républicains parce que ces derniers demandent de l'argent pour des projets nationaux, comme un mur à la frontière sud, il serait difficile de promettre des paquets d'aide efficaces. «Les États-Unis continueraient à fournir une aide sous perfusion à l'Ukraine», explique Gustav Gressel pour décrire la situation dans ce cas.
L'UE continuerait alors à ne fournir que peu de munitions. Certes, l'Ukraine pourrait se maintenir à flot – mais seulement dans une position défensive. L'armée ukrainienne devrait «céder certains territoires sous la pression de la Russie», explique Gustav Gressel.
Le fait que l'Ukraine ne reçoive pas assez de véhicules blindés se verrait dans la deuxième moitié de l'année. Kiev manquerait soit des pièces de rechange, soit de munitions dans ses armes. De nouvelles brigades seraient dissoutes et l'armée aurait de plus en plus de mal à trouver de nouveaux soldats. La motivation serait en baisse constante. «En bref, l'Ukraine reste sur la défensive et survit à l'année 2024», dit Gustav Gressel à propos de ce scénario. Le vainqueur de la guerre dépendra alors de la victoire des démocrates ou des républicains aux élections américaines.
Scénario catastrophe: l'Ukraine ne peut pas repousser les attaques
Si Donald Trump fait campagne et devient le candidat républicain à la présidence, les choses se présentent mal pour l'Ukraine. Les républicains entraveraient toute tentative de Biden d'envoyer de l'aide à l'Ukraine. L'UE continuerait certes d'envoyer des armes, mais elle ne pourrait pas compenser l'absence d'aide américaine.
L'Ukraine manquerait alors rapidement de grenades et de missiles, ce qui l'empêcherait de passer à l'offensive. Avantage pour les Russes. Les Ukrainiens seraient bloqués un peu et les soldats sur le front ne pourraient plus être retirés, car ils devraient tenir la position. Cela aurait une conséquence dramatique, prévient Gutsav Gressel: «Fin 2024, la plupart des brigades ukrainiennes seront fatiguées et épuisées.»
Sans les missiles ATACMS des États-Unis, l'Ukraine pourrait repousser moins d'attaques russes. Poutine en profiterait pour bombarder le pays. «Les perspectives de plus en plus sombres pousseraient de nombreux Ukrainiens à fuir. D'ici fin 2024, dix millions d'Ukrainiens auront fui vers l'Europe, et la tendance est à la hausse», explique Gustav Gressel. L'UE devrait alors faire face à des coûts considérables, ce qui réduirait les ressources disponibles pour aider l'Ukraine.
Si Donald Trump venait à gagner les élections, l'Europe cesserait d'approvisionner l'Ukraine. Car craignant que les États-Unis cessent de soutenir l'Ukraine et que la Russie en profite pour attaquer d'autres pays, l'UE choisirait de renforcer sa propre armée. Gustav Gressel estime, à propos de ce scénario catastrophe, que «la guerre en Ukraine serait considérée comme perdue par la plupart des Occidentaux, bien que l'Ukraine elle-même continuerait à se battre contre vents et marées».