Ils y croient. Et peut-être trouveront-ils un moment dans l’agenda serré de Donald Trump à Rome, ce samedi 26 avril, pour le forcer à écouter leur plan de paix sur l’Ukraine en marge des obsèques du pape François ? Ces dirigeants européens se nomment Emmanuel Macron, Keir Starmer et Donald Tusk. Les dirigeants français, britanniques et polonais veulent encore croire qu’il existe un moyen de convaincre la Maison Blanche de ne pas tout céder à Vladimir Poutine. Mais comment y croire?
La réalité est que les Européens ont compris ces jours-ci qu’ils n’ont pas les moyens de s’opposer à un «deal» entre Trump et Poutine. Il leur faudrait pour cela être capables de s’interposer sur le terrain, en Ukraine, et de présenter un plan de paix alternatif. Or ni l’un ni l’autre ne sont à l’agenda. L’agence Reuters, qui a mis la main sur des documents diplomatiques européens, permet d’y voir plus clair. Voici donc ce que Macron et ses soutiens espèrent obtenir.
Cessez-le-feu inconditionnel
Le premier élément est un cessez-le-feu inconditionnel dans le ciel, sur terre et en mer. Cette trêve des hostilités a d’ores et déjà été acceptée par Volodymyr Zelensky, ce Président ukrainien sans cesse critiqué par Donald Trump. Or pour le moment, Moscou ne s’est pas du tout engagé à stopper les combats dans des termes identiques. Il s’agit donc, pour les Européens, de faire pression sur Trump pour que son émissaire Steve Witkoff, attendu à Moscou, arrache une promesse en bonne et due forme au Kremlin.
Le deuxième élément, essentiel, est de subordonner les négociations de paix au respect de la trêve. Il faut bien comprendre que Donald Trump envisage exactement l’inverse. Trump accorde la priorité à un accord avec la Russie. Beaucoup d’observateurs estiment qu’il veut cet accord pour ses 100 jours de présidence le 30 avril, et qu’il espère toujours dans la foulée rencontrer Vladimir Poutine en Arabie saoudite, où il se rendra à la mi-mai. La proposition européenne complique donc son jeu. Paris, Londres et Varsovie veulent des négociations «avec la participation des États-Unis et des pays européens, parallèlement à la préparation de l’ordre du jour et des modalités d’un accord de paix complet».
Les Etats-Unis comme garants
Troisième exigence européenne: l’engagement de Washington à surveiller le cessez-le-feu. C’est essentiel. La responsabilité directe des Etats-Unis serait engagée, «avec le soutien de pays tiers». Cette surveillance de la trêve inclurait le déploiement d’une force de «réassurance» européenne en Ukraine, éloignée du front. Elle s’accompagnerait de «solides garanties de sécurité» de la part des Etats-Unis, laquelle ressemblerait à l’article 5 de l’OTAN. En clair: toute violation russe entraînerait une riposte immédiate. Il n’y aurait «aucune restriction sur la présence, les armes et les opérations des forces étrangères amies sur le territoire ukrainien».
La cession par l’Ukraine de la Crimée annexée par la Russie en 2014, et des territoires conquis par l’armée russe depuis le déclenchement de la guerre le 24 février 2022 seraient «avalisée» mais pas reconnue. C’est la grande différence avec le plan américain diffusé par la presse, selon lequel les Etats-Unis reconnaîtraient la souveraineté de Moscou sur la Crimée et une large partie des oblasts ukrainiens de Louhansk, Donetsk, Zaporija et Kherson. «La discussion sur les territoires s’engagera après le cessez-le-feu» propose le plan européen.
Quels moyens pour l’Europe?
L’entrée de l’Ukraine dans l’OTAN? Sur ce point, les Européens sont prêts à s’aligner sur le refus catégorique de l’administration Trump. L’entrée future du pays dans l’Union européenne figurerait en revanche noir sur blanc.
Le problème est que toutes ces nuances, voire ces contradictions flagrantes du plan américain, exigent des leviers et des moyens pour faire entendre raison à Donald Trump? Le meilleur levier, pour le moment, reste le refus ukrainien et la résistance de ce pays assiégé. Mais cela peut-il durer? Et que pourront proposer en échange les capitales européennes si Washington ferme la porte aux discussions. Difficile, dans ces conditions, de croire au miracle ukrainien «Made in Europe».