«ARRÊTE, Vladimir!» Jusqu'à présent, Donald Trump n'avait jamais été aussi clair qu'après l'attaque terroriste russe sur Kiev dans la nuit de mercredi à jeudi (au moins 9 morts et 80 blessés). Mais malgré ses avertissements au maître du Kremlin, le président américain est sur le point, avec sa «dernière proposition» de paix, de laisser courir à sa perte non seulement l'Ukraine, mais aussi toute l'Europe.
Volodymyr Zelensky doit «enfin agir», fulmine Trump, en pensant manifestement que les Russes approuveront son «plan de paix» sans broncher. Mais Trump commet une énorme erreur de raisonnement.
Du point de vue russe, la proposition que Trump présente comme un ultimatum, ressemble plutôt à un cadeau de Pâques tardif.
Trump veut :
- Reconnaître la péninsule de Crimée, occupée par la Russie depuis 2015, comme russe.
- Laisser provisoirement aux Russes les territoires occupés du Donbass et des oblasts de Kherson et de Zaporijjia.
- Donner à Moscou la moitié de l'électricité produite par la centrale nucléaire de Zaporizhzhya (la plus grande du monde).
- Lever toutes les sanctions économiques imposées à la Russie depuis 2014.
Et qu'obtient l'Ukraine dans tout ça? Rien du tout. A part un petit territoire conquis par la Russie dans l'oblast de Kharkiv. Aucune garantie de sécurité de la part des Etats-Unis, aucune perspective d'adhésion rapide à l'UE, ni même de garanties pour une aide militaire supplémentaire. Et l'adhésion à l'OTAN? Kiev devrait s'en passer pour toujours.
Pas étonnant que Zelensky ait répondu haut et fort: «Non, merci, Monsieur le président!»
L'exigence absurde de Poutine pour une fin des combats
Trump a ainsi définitivement trouvé son bouc émissaire. Sur sa plateforme Truth Social, il s'insurge contre le fait qu'il est bien plus difficile de négocier avec les Ukrainiens qu'avec les Russes (son envoyé spécial Steve Witkoff se rend cette semaine pour la quatrième fois à Moscou, il n'a encore jamais été à Kiev). Ce qu'il occulte en l'occurrence: Moscou a clairement fait savoir qu'elle n'accepterait pas l'accord de Trump.
Vladimir Poutine a transmis par l'intermédiaire de son porte-parole que la signature de Zelensky au bas du document ne pouvait pas être prise au sérieux, car il n'est plus le président légitime de l'Ukraine depuis l'expiration de son mandat en mai 2024 (selon le point de vue russe). De plus, la Russie ne mettrait fin à la guerre que lorsque l'Ukraine se sera retirée des territoires qu'elle ne contrôle pas encore dans les quatre oblasts de Donetsk, Louhansk, Zaporijjia et Kherson.
Pour rappel, ces quatre régions ont été officiellement déclarées par Poutine comme appartenant à la Russie. Mais à l'exception de Louhansk, presque entièrement conquise, elles restent en grande partie sous contrôle ukrainien. L'Ukraine devrait se retirer volontairement et dérouler pour ainsi dire le tapis rouge aux envahisseurs russes. Une idée absurde.
Trump se retrouve bien seul avec son «plan de paix». Il a clairement fait savoir qu'il se retirerait de tout ce chaos autour de l'Ukraine si les deux parties ne le signaient pas. On peut supposer que l'Amérique cessera prochainement de fournir son aide à l'Ukraine.
Ce faisant, Trump n'abandonne pas seulement Kiev, il se met également à dos l'Europe. Une victoire partielle de la Russie dans cette guerre serait déjà la garantie d'années d'instabilité et d'insécurité extrêmes en Europe. Les experts estiment que de nouvelles attaques russes sur le territoire de l'OTAN sont très probables. Avec la disparition de facto des Etats-Unis en tant que puissance protectrice de l'OTAN, ce risque augmente encore de manière frappante.
Ce détail orthographique donne de l'espoir à l'Ukraine
L'Europe n'est pas (encore) prête à voler de ses propres ailes sur le plan militaire. Il manque en outre une figure de proue de l'envergure du Britannique Winston Churchill, qui a maintenu l'Europe unie en son sein face à la menace nazie.
Ce qui devrait aller vite (unification de l'Europe, réarmement massif, ligne de conduite claire vis-à-vis de Moscou) prendra du temps, beaucoup trop de temps. C'est la vérité désagréable à laquelle l'Europe est confrontée.
Mais peut-être que l'inconstant Donald Trump se rendra compte qu'il a pour une fois misé sur le mauvais cheval. Sur les réseaux, l'idée que Trump pourrait soudainement devenir un ami de l'Ukraine plane, pour un détail orthographique. Dans son dernier post «ARRÊTE, Vladimir» sur Truth Social, il a écrit «Kyiv», selon l'orthographe ukrainienne, et non «Kiev», comme les Russes appellent la capitale ukrainienne. A part ça, il n'y a malheureusement pas d'autre raison d'espérer pour le moment.