Après une semaine d'interruption, le «marathon» reprend lundi pour Gisèle Pelicot, au procès des viols de Mazan, avec un nouveau groupe d'accusés, huit autres de cette cinquantaine d'hommes accusés de l'avoir agressée sexuellement, à l'invitation de son ex-mari qui la droguait.
«C'est une course d'endurance, mais elle reste évidemment combative et déterminée à aller jusqu'au bout, parce qu'elle est aussi portée par cet élan de soutien qui dépasse les frontières de la France», a expliqué à l'AFP Antoine Camus, un de ses avocats. «Elle reçoit très régulièrement de nombreux témoignages qui la portent et qui l'aident, dans ce marathon qu'elle ne fait pas que pour elle», a insisté Me Camus.
Sur les 51 accusés de ce procès hors norme, emblématique des questions de la soumission chimique et du consentement, déjà 36 ont défilé, depuis le 2 septembre, devant la cour criminelle de Vaucluse, qui devra le 20 décembre prononcer son verdict, en l'individualisant pour chacun de ces hommes âgés de 26 à 74 ans. La plupart sont poursuivis pour viols aggravés et risquent jusqu'à 20 ans de réclusion criminelle.
Une peine à laquelle le «chef d'orchestre» de ces viols, Dominique Pelicot, aura du mal à échapper, lui qui pendant près d'une décennie avait drogué son ex-épouse à coup d'anxiolytiques avant de la violer et la faire violer par cette cinquantaine d'inconnus recrutés sur internet, à leur domicile conjugal de Mazan (Vaucluse). Des faits qu'il a toujours reconnus.
Parmi les 50 coaccusés en revanche, très peu assument, persistant avoir été invités voire appâtés, par Dominique Pelicot, pour participer au scenario d'un couple libertin. Et quasiment tous prétendent ne pas avoir eu «l'intention» de violer Gisèle Pelicot.
«On fatigue. On fatigue beaucoup du côté de Gisèle Pelicot d'entendre à peu près systématiquement les mêmes explications des accusés sur le terrain juridique de l'intention, (...) entendre qu'elle a été victime de viol 'par accident', de viol 'par erreur de jugement', de viol 'à contre-coeur'. Finalement, ce qu'on vient lui expliquer, c'est qu'elle est victime exclusivement de son mari», a estimé Me Camus.
Il ne mérite plus le titre de père
Les huit accusés dont les cas seront étudiés à partir de lundi sont Saifeddine G., chauffeur routier de 36 ans; Paul G., ouvrier de 31 ans, âgé de 22 ans au moment des faits; Omar D., agent d'entretien de 36 ans; Cendric V., manageur de restaurant de 42 ans; Cédric G., technicien informatique de 50 ans, qui avait prévu de reproduire le même procédé de soumission chimique sur sa propre femme; ou Romain V., célibataire séropositif de 63 ans qui s'est rendu à six reprises à Mazan, sans jamais porter de préservatif. Hassan O., 30 ans, toujours visé par un mandat d'arrêt international, sera lui jugé in absentia.
Ludovick B., intérimaire de 41 ans au chômage, est soupçonné lui d'avoir violé Gisèle Pelicot en 2019, avec la complicité de son ex-mari, au domicile de leur propre fille, Caroline Darian, en région parisienne. Au premier jour du procès, comme 35 autres accusés, il avait nié tout viol, suscitant un rire moqueur de Mme Darian. Après avoir suivi les audiences pendant plusieurs semaines, cette dernière n'était plus apparue récemment sur le banc des parties civiles, au côté de sa mère.
Sur Instagram fin octobre, elle avait publié une photo d'elle accompagnée d'un texte indiquant qu'elle avait «décidé de rentrer en clinique pour plusieurs jours, afin de récupérer toute (son) énergie, de pouvoir à nouveau dormir (et de) rattraper des semaines d'insomnies à répétition».
«Et surtout pour être en mesure d'affronter pleinement et comme il se doit l'un des plus grands prédateurs sexuels et manipulateurs des 20 ou 30 dernières années», poursuivait-elle, évoquant ce père qu'elle ne qualifie plus que de «géniteur».
Parmi les milliers d'images des viols de sa femme retrouvées sur son ordinateur ou divers disques durs, Dominique Pelicot avait aussi des photos de sa fille, nue, endormie, prises à son insu. Des photos, postées sur internet, qui font penser à Caroline Darian que son père l'a également droguée et violée.