Pandémie de Covid-19 en Chine
Les JO de Pékin seront-ils à l'origine d'une vague d'infections?

À l'occasion de Jeux olympiques de Pékin, les autorités chinoises veulent prouver la supériorité de leur stratégie stricte dite «zéro Covid» par rapport aux approches des pays occidentaux. Mais que risque le pays si la bulle sanitaire n'est pas étanche?
Publié: 04.02.2022 à 06:07 heures
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Dernière mise à jour: 04.02.2022 à 08:49 heures
Les Jeux olympiques de Pékin sont maintenus dans une bulle sanitaire. Les agents de nettoyage ne sont pas les seuls à porter des combinaisons intégrales: les fonctionnaires et assistants sont soumis aux mêmes règles.
Photo: AFP
Fabian Vogt

Depuis le début de la pandémie, 106’000 cas de Covid-19 ont été signalés en Chine. Un chiffre minime pour le pays le plus peuplé de la terre qui compte pas moins de 1,4 milliards d'âmes. À titre de comparaison, la Suisse en a enregistré 2,3 millions de cas pour une population d'environ 9 millions de personnes.

Pour parvenir à ce résultat (parfois remis en cause, le gouvernement étant parfois soupçonné de cacher les chiffres véritables), la Chine a appliqué une stratégie rigoureuse dite «zéro Covid», ce qui ne serait guère possible dans une démocratie.

Des métropoles de plusieurs millions d’habitants ont été isolées pendant des semaines. Chaque personne infectée doit être hospitalisée. Les tests de masse font partie du quotidien de la population. Lorsqu'en octobre, une femme a été testée positive lors d'une visite au parc Disneyland de Shanghai, plus de 30’000 visiteurs ont été retenus dans le parc et testés individuellement. L’objectif? Retracer chaque cas et interrompre les chaînes de transmission.

Avec l’apparition du variant Omicron, les mesures sanitaires ont été encore davantage renforcées. Au passage de la nouvelle année, ce sont près de 13 millions d’habitants de la ville de Xian qui sont restés confinés pendant trois semaines. Le gouvernement chinois a commencé à poser des clôtures de barbelés et des murs aux diverses frontières afin d’empêcher le virus d’entrer dans le pays. Divers observateurs supposent que la pandémie de coronavirus est utilisée comme prétexte pour contrôler toujours davantage la population.

600’000 cas par jour

Comme pratiquement personne n’a été infecté par le coronavirus jusqu’à présent, les Chinois n’ont pas développé d’immunité naturelle. Selon le portail «Ourworldindata», 87% de la population est doublement vaccinée, mais avec des vaccins qui ont été développés et produits en Chine. Des études internationales menées à Yale et Hong-kong leur donnent une mauvaise note en ce qui concerne la protection contre le variant Omicron. Même le booster n’aurait que très peu d’utilité. Il est encore difficile d’évaluer si les vaccins chinois protègent réellement contre des formes graves de la maladie.

Les vaccins à ARNm comme ceux produits par Moderna et Pfizer/BioNTech ne sont pas autorisés dans le pays. L’immunologue Akiko Iwasaki part du principe que les Chinois ont besoin d’au moins quatre doses du sérum pour être raisonnablement protégés.

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Une université de Pékin a calculé que sans stratégie «zéro Covid», la Chine devrait s’attendre à 600’000 cas par jour. Le système de santé pourrait s’effondrer sous une telle charge, même si le variant Omicron est réputé moins virulent que ses prédécesseurs. À cela vient s’ajouter le fait que la Chine ne compte que 4,7 lits de soins intensifs pour 100’000 habitants, selon la «NZZ». En Suisse, ce chiffre s’élève à 11.

Vague d’infection?

Le gouvernement chinois ne veut prendre aucuns risques. Il n’est pas seulement convaincu de la supériorité de la stratégie «zéro Covid» sur celle des pays occidentaux, comme les autorités ne manquent pas de le rappeler. Elles veulent profiter des Jeux olympiques pour le prouver au monde entier. Les acteurs des JO – athlètes, accompagnateurs, assistants, journalistes – se retrouvent dans une bulle sanitaire. «Il était clair dès le début que nous n’aurions aucun contact avec la population locale», rapporte Nicole Vandenbrouck, journaliste sportive pour Blick, qui se trouve à Pékin depuis cette semaine. Le reporter sportif Mathias Germann, également sur place, ajoute: «J’ai l’impression que les Chinois craignent que nous leur amenions le coronavirus. Ou, au moins aussi grave, que nous mettions en péril leurs jeux d’hiver.» Toute personne arrivant sur le sol chinois doit être testée. Si le test s’avère positif, celle-ci est immédiatement placée en quarantaine stricte. Les journalistes et athlètes déjà présents sur le site rapportent des conditions très difficiles.

Cette stratégie drastique a des conséquences. En 2020, la Chine était pourtant la seule grande économie mondiale à croître en dépit la pandémie. Désormais, les analystes revoient à la baisse leurs estimations. Le pays est confronté à des problèmes au niveau des chaînes de transport. Les bateaux restent immobilisés pendant des semaines dans les immenses ports commerciaux. Les camions en provenance du Myanmar (Birmanie) doivent s’arrêter à la frontière. La cargaison est désinfectée et reste bloquée pendant 48 heures avant d’être chargée par des grues sur des transporteurs chinois. Ceux-ci traversent la frontière, où la marchandise est à nouveau désinfectée et gardée pendant 24 heures. Ce n’est qu’ensuite qu’elle peut être distribuée. La situation est précaire.

Si 90% de la population est vaccinée à trois ou quatre reprises avant que le variant Omicron ne déferle sur la Chine, la catastrophe sanitaire pourrait être évitée, estime Ivan Hung, à la tête le département des maladies infectieuses à l’université de Hong-Kong, dans les lignes de la «NZZ». Mais le pays serait-il en mesure de lutter contre un potentiel variant encore plus contagieux? Le gouvernement chinois n’a pas encore de réponse à cette question.

(Adaptation par Jessica Chautems)

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