Paix en Ukraine
Zelensky a demandé pardon, Trump va-t-il l'accepter?

Devant le Congrès, lors de son discours sur «l'état de l'Union» conçu comme un grand spectacle télévisuel, Donald Trump s'est félicité de la lettre reçue de Volodymyr Zelensky. Il a cité la «paix durable». La demande de pardon ukrainienne peut-elle être entendue?
Publié: 05.03.2025 à 12:51 heures
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Donald Trump a prononcé, mardi 4 mars, son discours sur «l'état de l'Union»
Photo: Getty Images
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Richard WerlyJournaliste Blick

Il fallait en passer par là. Et, habilement, Volodymyr Zelensky a choisi son moment. En affichant juste avant le discours sur «l’état de l’Union» sur les réseaux sociaux, et dans une lettre officielle, son accord pour «signer à tout moment et à toute forme qui conviendra l’accord sur les minerais et la sécurité» avec les Etats-Unis, le président ukrainien a donné à Donald Trump ce que celui-ci voulait: les termes d’une quasi-reddition.

Et maintenant? Quelles conclusions peut-on tirer des mots de Trump devant les sénateurs et les représentants, lorsqu’il a affirmé, mardi soir 4 mars, que Volodymyr Zelensky était «prêt à négocier avec la Russie» en vue d’une «paix durable»?

Trump et Zelensky, duo d’acteurs

Il ne faut pas perdre de vue cette dimension, confirmée par la satisfaction de Donald Trump le 28 février, après sa vive altercation avec le président ukrainien dans le bureau ovale. «This is going to be great television», (Cela fera de la grande télévision) avait-il reconnu. Pourquoi insister sur cet aspect, entre Trump, l’ex-star de téléréalité dans «The Apprentice», et Zelensky, le comédien devenu président grâce au succès de sa série télévisée «Serviteur du peuple»? Parce que tous les deux n’oublient jamais leur public. C’est d’ailleurs aussi pour cela que Vladimir Poutine reste muré dans le silence. L’ancien espion du KGB redoute ces manières de faire qui transforment la diplomatie en spectacle.

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La «paix durable», version Trump?

La manière dont Donald Trump a résumé la lettre de Zelensky est très habile. Selon lui, l’Ukraine est «prête à s’asseoir à la table des négociations dès que possible pour se rapprocher d’une paix durable». Le président américain a cité cet extrait: «Mon équipe et moi-même sommes prêts à travailler pour obtenir une paix durable. Nous apprécions vraiment tout ce que l’Amérique a fait pour aider l’Ukraine à maintenir sa souveraineté et son indépendance.» Le mot «paix durable» – ce qui suppose des garanties de sécurité crédibles pour l’Ukraine – est deux fois cité, sans être présenté comme un objectif pour les Etats-Unis. Alors? Trump est satisfait. La suspension de l’aide militaire américaine, décidée juste avant le discours au Congrès, a fonctionné comme ultime pression. La Maison Blanche doit maintenant prendre l’initiative. Trump affirme avoir reçu des «signaux forts» de Moscou. Lesquels ? Motus.

Une paix européenne, pourquoi pas?

Le discours de Trump ressemblait à un discours de campagne. Il était centré sur les Etats-Unis, et sur des objectifs territoriaux considérés par le nouveau président comme essentiels pour la sécurité nationale: le canal de Panama et le Groenland. Rien sur l’OTAN. Rien sur un désengagement militaire américain d’Europe. Donald Trump est donc fidèle à ce qu’il a toujours dit: si les Européens produisent un plan de paix dont ils apportent les garanties de sécurité demandées par l’Ukraine – en augmentant leur budget de défense et en achetant pour cela au passage des armes américaines – c’est OK. Ça tombe bien. Les dirigeants des 27 pays de l’Union européenne se réunissent jeudi 6 mars à Bruxelles. Emmanuel Macron, leader en matière «d’autonomie stratégique» vis-à-vis des Etats-Unis, s’exprime ce mercredi soir à la télévision avant de recevoir à dîner le Hongrois Viktor Orbán, ouvertement pro-Poutine.

Trump-Poutine, à quoi s’attendre?

Est-ce un signe? Sans doute. La Biélorussie, allié sans faille du Kremlin, vient de proposer d’accueillir des négociations avec Poutine, Zelensky et Trump. «Nous allons nous asseoir et nous mettre d’accord tranquillement. Si vous voulez vous mettre d’accord», a poursuivi le président biélorusse Loukachenko au pouvoir depuis 1994. Possible? Trois choses doivent être notées. 1. Les Européens ne sont pas mentionnés. 2. Minsk, la capitale biélorusse, a donné son nom au processus de négociation basé les accords signés en février 2015 (après l’annexion russe de la Crimée), qui impliquaient l’Allemagne, la France, l’Ukraine et la Russie. 3. Trump, comme Poutine, échangent déjà directement. Mais ça bouge dans le camp russe.

Minerais, cessez-le-feu: on avance?

Un mot est déjà lancé: celui d’une «trêve». Il a été formulé le 2 mars par Emmanuel Macron et Keir Starmer à Londres, et repris par Zelensky avant l’envoi de sa lettre à Trump. Il s’agit d’une «trêve d’un mois dans les combats aériens, et maritimes, ainsi que de l’arrêt des attaques sur les infrastructures énergétiques des deux belligérants». Kiev est OK «si la Russie fait de même». Ce, pour ouvrir des premières négociations. 

Les Européens ont une ligne rouge résumée par le Premier ministre britannique: «Nous ne pouvons pas accepter un accord de paix faible que la Russie peut violer facilement, comme celui de Minsk.» Les Etats-Unis, eux, veulent, outre l’accord sur les terres rares, un cessez-le-feu rapide et l’exclusion d’office de l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN (La Finlande a évoqué la possibilité, pour garantir le cessez-le-feu, d’une entrée automatique de l’Ukraine dans l’OTAN en cas de nouvelle agression russe). Et la Russie? Elle est «complètement d’accord» avec Trump. Poutine est même «prêt» à discuter avec Zelensky. Le Kremlin a aussi reconnu «le droit souverain» de Kiev à rejoindre l’UE.

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