Négociation et confrontation
Trump et Poutine le prouvent: ils forment un tandem imbattable

Le président des Etats-Unis et son homologue russe jouent depuis plusieurs semaines une partie probablement plus chorégraphiée qu'on ne le pense. La question, pour les Ukrainiens et les Européens, est de desserrer leur étau.
Publié: 26.04.2025 à 19:31 heures
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Donald Trump et Volodymyr Zelensky se sont parlés en marge des obsèques du pape François à Rome.
Photo: keystone-sda.ch
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Richard WerlyJournaliste Blick

Attention, mise en scène diplomatique! Peut-on croire à la colère de Donald Trump lorsqu’il reproche à Vladimir Poutine, comme il vient de le faire depuis Rome ce samedi 26 avril, de «le balader et de ne pas vouloir faire la paix»? Et peut-on croire le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, lorsqu’il déclare que son pays est prêt à négocier «sans conditions préalables» un futur accord de paix en Ukraine?

La vérité est que, depuis le premier voyage à Moscou de l’émissaire américain Steve Witkoff, Donald Trump et Vladimir Poutine alternent leurs rôles. Quel rapport entre le président américain furieux contre Volodymyr Zelensky, le 27 février dans son Bureau ovale à Washington, et les paroles réconfortantes prononcées par le même Donald Trump ce samedi 26 avril, lors d’une brève rencontre dans la basilique Saint-Pierre?

L’art du deal à la Trump

La réponse est simple: le locataire de la Maison Blanche applique à la lettre son «art du deal» qu’il a vanté jadis dans un livre devenu best-seller. D’abord casser son interlocuteur. Puis lui tendre la main. En s’assurant, parallèlement, de la bonne volonté du protagoniste principal, à savoir Poutine.

Ce tandem Poutine-Trump a de très bonnes cartes en main pour parvenir aujourd’hui à un accord, même si la Russie est très loin de vouloir se dissocier de la Chine, comme l’espèrent les Etats-Unis. Première carte dans la poche de Trump: la baisse des cours du pétrole et l’arme économique d’un possible durcissement des sanctions, avec pour conséquence des coups potentiellement terribles portés à l’économie russe déjà très fragilisée. Deuxième carte dans la main de Poutine: l’empressement de Trump à vouloir le rencontrer et à signer un accord sur l’Ukraine dans les jours prochains. Le président américain pourra, alors, affirmer qu’il a fait la paix en «cent jours». Quelle que soit la réalité sur le terrain.

Droit international bafoué

L’autre combinaison fatale entre les deux hommes est leur absence totale de respect du droit international, et leur capacité à s’affranchir ponctuellement de leurs alliances. La Russie va-t-elle lâcher l’Iran, auquel Trump espère arracher un accord sur le nucléaire? Possible, vu que le régime de Bachar al-Assad en Syrie est tombé et que l’axe Moscou-Téhéran a moins d’importance aujourd’hui.

Les Etats-Unis sont-ils prêts à mettre leurs alliés européens au pied du mur, et à leur forcer la main? Cela ne fait aucun doute. Pour le reste, Poutine et Trump sont déjà d’accord: l’intérêt des grandes puissances l’emporte sur le droit et les frontières, la Cour pénale internationale est une entité à détruire, et l’Ukraine amputée de 20% de son territoire sera, demain, un fardeau que les Européens devront gérer.

«Stop!» à Poutine

Trump dit «Stop!» à Poutine dans un message posté sur son réseau social? Ce n’est pas là l’essentiel. L’important est ce que Steve Witkoff, le négociateur trumpiste, a dit et entendu au Kremlin, face à Vladimir Poutine qu’il vient de rencontrer pour la quatrième fois en quelques semaines. Poutine frappe des cibles civiles à Kiev? Un bon moyen de faire monter les enchères et de garantir un succès diplomatique à la future rencontre entre les deux présidents, qui pourrait avoir lieu en Arabie saoudite à la mi-mai. Rien de mieux qu’une annonce, alors, d’un cessez-le-feu complet. La population ukrainienne sera soulagée. Et Donald Trump pourra dire qu’il a sauvé de nombreuses vies.

Cynisme, brutalité, volonté de défendre sans scrupules leurs intérêts, et vision conjointe du calendrier à court terme (à savoir un accord de paix au moins valable trois ans, jusqu’à la fin du mandat du président américain): Poutine et Trump forment bien un tandem difficile à battre. Et c’est tout le problème!

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