Les images ont fait le tour du monde: que ce soit en Sardaigne, en Toscane ou sur la côte ligurienne, les fonctionnaires de la Guardia di Finanza ont mis sous scellés des super yachts à tour de bras dans les ports de luxe italiens. À la longue liste s'ajoutent des villas, des limousines... Les trésors appartiennent à des Russes qui figurent sur les listes de sanctions européennes. Pas moins de 680 amis de Poutine sont dans le collimateur des autorités européennes, dont 26 milliardaires. Beaucoup d’entre eux goûtaient en Italie aux joies de la dolce vita avant que le Kremlin ne lance sa guerre d’agression contre l’Ukraine.
Le pays transalpin n’a pas tardé à réagir. Dès le mois de mars, les premiers yachts ont été saisis. A Imperia, en Ligurie, la police financière a confisqué le Lady M (d’une valeur de 65 millions d’euros) de l’oligarque et grand actionnaire de Tui Alexei Mordashov. Peu après, le Lena (valeur 50 millions d’euros) a été confisqué à Sanremo. Propriétaire: Guennadi Timtchenko, fondateur de Volga-Group. Les fonctionnaires ont également frappé à Trieste. Il s’agissait du Sy A, le plus grand voilier du monde. Ce bateau de plus de 500 millions d’euros appartient à l’homme d’affaires russe Andreï Igorevitch Melnitchenko. Enfin, la capture du Sheherazade dans la marina de Carrare a fait les gros titres, puisqu'on murmure qu'il appartient à Vladimir Poutine en personne et vaut près de 700 millions d’euros.
Un voilier coûte jusqu’à 30’000 euros par jour
Mais ce n'est pas tout d'apposer des scellés. Les navires restent à quai et doivent être entretenus. Ils sont assurés à grands frais et ont du personnel à bord, qui ne peut désormais plus être payé par les propriétaires. A cela s'ajoutent les taxes portuaires. Les coûts sont désormais à la charge de l’État italien.
Rien que le trois-mâts Sy A, avec son personnel de 30 personnes, coûte entre 20’000 et 30’000 euros par jour, écrit «La Repubblica». Les biens des personnes sanctionnées sont par ailleurs gelés, mais pas confisqués. Cela signifie qu’ils devront un jour être restitués à leurs propriétaires, propres et dans l’état où ils se trouvaient lors de la saisie. C’est du moins ce qu’exigent les avocats italiens des oligarques. L'Agenzia del Demanio, agence immobilière nationale compétente, a refilé la patate chaude au ministère des Finances et de l’Economie à Rome, qui doit maintenant payer la note.
Villas et voitures de luxe des oligarques
Les autorités italiennes ont également confisqué des villas et des voitures de luxe. Il s’agit par exemple des propriétés en Sardaigne du fondateur de Metalloinvest Alischer Usmanov, du banquier et ami de Poutine Petr Olegovitsch Aven ainsi que de la «Villa Lazzareschi» dans la province de Lucca du député russe Oleg Savtchenko. Leurs propriétés valent plusieurs centaines de millions d’euros. Ils employaient tous des domestiques, des jardiniers, du personnel de sécurité – désormais aux frais de l’État.
Au lac de Côme, les villas confisquées du présentateur de télévision russe Vladimir Soloviev ont été la cible d’actes de vandalisme. Des opposants à Poutine avaient tenté de mettre le feu à l’une des maisons avec des pneus en caoutchouc. L’autre avait été recouverte d’inscriptions injurieuses et la piscine avait été remplie de peinture rouge sang. Selon un décret national de 2007, les biens gelés doivent être protégés et entretenus. C’est donc l’État italien qui prend en charge les dégâts occasionnés.
(Adaptation par Jocelyn Daloz)
