L'ONU veut des explications
Moscou aurait envoyé 20'000 enfants ukrainiens de force en Russie

La Russie va devoir s'expliquer lundi à l'ONU sur le sort des enfants ukrainiens qui selon Kiev ont été envoyés de force par milliers sur le sol russe depuis le début de la guerre en février 2022.
Publié: 22.01.2024 à 07:49 heures
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L'Ukraine estime à 20'000 le nombre d'enfants ukrainiens envoyés de force en Russie.
Photo: Anadolu via Getty Images

La Russie va devoir s'expliquer lundi à l'ONU sur le sort des enfants ukrainiens qui selon Kiev ont été envoyés de force par milliers sur le sol russe depuis le début de la guerre en février 2022.

Le Comité des droits de l'enfant – composé de 18 experts indépendants – doit examiner le dossier de la Russie pendant deux jours dans le cadre d'un examen régulier.

Moscou dit vouloir protéger ces enfants des combats

La liste des multiples préoccupations des experts a été envoyée des mois à l'avance à la Russie. Concernant l'«évacuation» des enfants ukrainiens vers la Russie ou les territoires ukrainiens sous contrôle russe, ils souhaitent notamment connaître combien sont concernés et les «mesures prises pour protéger le droit de ces enfants de préserver leur identité, y compris leur nationalité.»

L'Ukraine estime à 20'000 le nombre d'enfants ukrainiens envoyés de force en Russie. Seuls environ 400 ont été rapatriés par les autorités à ce stade. Moscou affirme vouloir protéger ces enfants des combats.

«La réinstallation des enfants évacués se fait avant tout à leur demande et avec leur accord», a affirmé la Russie dans ses réponses écrites transmises l'an dernier au comité et que l'ONU a fait parvenir aux journalistes jeudi.

46'886 enfants ukrainiens ont acquis la nationalité russe

Le document ne donne pas le nombre d'enfants concernés, mais indique que «parmi les personnes évacuées figuraient notamment des enfants qui vivaient dans des institutions publiques pour orphelins et enfants privés de protection parentale (environ 2000 personnes au total)», dont «des enfants possédant la nationalité ukrainienne».

Il indique par ailleurs que selon les statistiques du ministère russe de l'Intérieur, «46'886 enfants ukrainiens ont acquis la nationalité russe pendant la période allant du 1er avril 2022 au 31 juin 2023».

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«Il faudrait encore 90 ans pour rapatrier rien que les enfants ukrainiens qui ont déjà été identifiés»
Kateryna Rashevska, juriste
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Pour un mécanisme juridique international

Kateryna Rashevska, juriste auprès de l'ONG Regional Center for Human Rights en Ukraine, espère que le comité va plaider en faveur de la création d'un «mécanisme juridique international» permettant l'identification et le retour de ces enfants. «Aujourd'hui, le processus de retour des enfants ukrainiens n'est qu'un processus très sporadique», a-t-elle déclaré à l'AFP.

Au rythme actuel, «il faudrait encore 90 ans pour rapatrier rien que les enfants ukrainiens qui ont déjà été identifiés», a-t-elle déploré, appelant l'assemblée générale de l'ONU à adopter une résolution créant un tel mécanisme. «La communauté internationale est prête à faire quelque chose, mais elle doit agir plus rapidement», a-t-elle souligné.

De nombreux autres sujets seront évoqués lors de l'examen du dossier de la Russie, qui démarre à 15H00 (14H00 GMT), la liste des points que souhaite aborder le comité de l'ONU s'étalant sur sept pages.

Il veut notamment interroger la délégation russe sur les mesures prises pour supprimer les obstacles à l'exercice par les enfants de leur droit à la liberté d'association et de réunion et faire en sorte que les enfants ne soient pas sanctionnés pour leur participation à des manifestations, notamment contre la guerre.

Les droits des enfants en jeu

Dans un rapport envoyé au comité de l'ONU, l'ONG Human Rights Watch s'inquiète pour la liberté d'expression des enfants, leur droit à l'information et ceux liés à l'identité de genre et l'orientation sexuelle.

«Il existe un large éventail de questions relatives aux droits de l'enfant en Russie sur lesquelles on pourrait se pencher», a affirmé à l'AFP Rachel Denber, directrice adjointe de la division Europe et Asie centrale à HRW.

«Nous ne nous sommes concentrés que sur trois d'entre elles pour montrer que la répression générale des droits en Russie a un impact sur les droits de l'enfant», a-t-elle expliqué, soulignant en exemple qu'ils sont victimes de «représailles» s'ils critiquent l'invasion russe en Ukraine.

Lutter contre les «pratiques préjudiciables»

Le comité veut aussi discuter de la détention illégale ou arbitraire d'enfants, des châtiments corporels, y compris à la maison, des mesures prises pour préserver l'identité culturelle et linguistique et le patrimoine des enfants autochtones, ainsi que de ce que Moscou fait pour lutter contre certaines «pratiques préjudiciables» dans le Caucase du Nord, telles que les mariages d'enfants, les mutilations génitales féminines et la polygamie.

«Cette région est confrontée à des problèmes spécifiques [...], tous exacerbés par la faiblesse des systèmes juridiques et des normes sociétales», a expliqué à l'AFP Grigor Avetisyan, de l'ONG néerlandaise Stichting Russian Justice Initiative, qui a longtemps oeuvré en Russie. Mais «l'ensemble de la région, comme le reste du pays, connaît [...] une dégradation générale de la situation des droits humains», a-t-il ajouté.

(AFP) 

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