La Serbie indignée
Le groupe Wagner recrute des Serbes pour combattre en Ukraine

Le groupe Wagner tente de recruter des Serbes de manière ciblée pour qu'ils combattent en Ukraine. Des vidéos montrant des volontaires serbes s'entraînant pour la guerre ont fait grand bruit. Même le président Aleksandar Vucic s'en est mêlé.
Publié: 21.01.2023 à 17:23 heures
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Dans le centre de Belgrade, le symbole du groupe Wagner est apparu sur le mur d'une maison.
Photo: keystone-sda.ch
Marian Nadler

Une vidéo du groupe Wagner, diffusée sur la version serbe de la chaîne de propagande russe Russia Today, a suscité l'indignation en Serbie. On y voit des soi-disant volontaires serbes s'entraîner pour combattre aux côtés des troupes russes en Ukraine.

Le groupe de mercenaires russes a spécialement tourné la vidéo en serbe afin d'encourager le recrutement de volontaires dans le pays. Au même moment, l'emblème de la tête de mort du groupe Wagner est apparu sur un mur du centre-ville de Belgrade. Il était signé par les «patrouilles du peuple», une organisation d'extrême droite qui a régulièrement organisé des manifestations pro-russes, même si elles étaient peu fréquentées.

La diffusion de la vidéo a fait des vagues, alors même que la Serbie est considérée comme un bastion pro-russe en Europe. Même le président serbe Aleksandar Vucic est intervenu. Il n'a pas du tout apprécié cette tentative de recrutement et s'est adressé directement à la troupe de mercenaires et à son chef Evgeni Prigoschin: «Pourquoi est-ce que vous appelez des Serbes à combattre, alors que vous savez que c’est illégal?» En Serbie, il est interdit de participer à des conflits à l'étranger. Une règle qui s'applique d'ailleurs également aux soldats suisses.

Sans contact de Vladimir Poutine depuis plusieurs mois

Les déclarations d'Aleksandar Vucic sont une rare critique du président en direction de la Russie, proche allié de la Serbie. Le chef d'Etat a profité de l'occasion jeudi pour clarifier certains points à la télévision serbe. En ce qui concerne la guerre en Ukraine, la Serbie est «neutre». Le président du Parti progressiste serbe a en outre souligné qu'il n'avait pas parlé au président russe Vladimir Poutine depuis «de nombreux mois».

Il est souvent reproché à la Serbie de faire passer son amitié de longue date avec la Russie avant ses ambitions d'adhésion à l'UE. Mais les évènements survenus ces derniers jours à Belgrade montre le difficile exercice d'équilibriste du pays entre l'Union européenne d'une part et le Kremlin d'autre part.

Pas de sanctions contre la Russie

Aux Nations unies, la Serbie a toujours voté en faveur des résolutions condamnant l'agression russe. «Pour nous, la Crimée est l'Ukraine, le Donbass est l'Ukraine, et cela restera ainsi», a déclaré Aleksandar Vucic cette semaine dans une interview à l'agence de presse étasunienne Bloomberg.

Cependant, la Serbie a jusqu'à présent refusé d'imposer des sanctions à la Russie. Un petit nombre de ses citoyens ont combattu aux côtés des forces soutenues par la Russie en Ukraine après l'annexion de la Crimée par Moscou au printemps 2014. Une partie des Serbes est favorable à l'invasion de l'Ukraine et des manifestations pro-russes ont eu lieu dans la capitale Belgrade.

Afin d'exercer une pression politique, le Parlement européen a adopté pour la deuxième fois une résolution demandant la suspension des négociations d'adhésion serbe à l'Union européenne (UE). Une mesure risquée, car elle laisse à Moscou la possibilité de s'immiscer dans les Balkans. Il s'agit désormais de mener en toute hâte des négociations d'adhésion avec l'Albanie et la Macédoine du Nord, la Bosnie ayant obtenu le statut de candidat à l'adhésion.

«Je sais que l'UE est notre voie»

La Serbie était restée jusqu'à présent à l'écart, notamment parce qu'Aleksandar Vucic n'avait pas vu de raison de changer fondamentalement de politique. Les paroles critiques de Belgrade en direction du Kremlin étaient encore rares. Si le président serbe attendait un moment précis pour se tourner résolument vers l'Occident, celui-ci pourrait bien être arrivé.

«Je sais que l'UE est notre voie, a-t-il déclaré à Bloomberg. Il n'y a pas d'autres voies.»

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