Chaque matin, Blick plonge dans le volcan politique français que la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron est en train de faire exploser. Jusqu’au résultat du second tour des législatives le 7 juillet. Un voyage quotidien dans les coulisses du grand jeu du pouvoir, vu de Suisse. Des rires. Des larmes. De l’espoir. Et pas mal de chaos. Bienvenue sur la crête du volcan français.
A la «une» de ce jeudi 27 juin: Nanterre un an après, la rage, les larmes et la campagne.
Nahel Merzouk, la rage et les larmes
27 juin 2023, 8h19: en contrebas du Palais de Justice de Nanterre, à deux pas de la Préfecture des Hauts-de-Seine, deux motards contrôlent les allées et venues des voitures sur la piste cyclable de la cité Pablo Picasso. Nahel Merzouk, 17 ans, est arrêté par les policiers au volant d’une Mercedes automatique. Son refus d’obtempérer sera fatal. L’un des deux policiers tire. Le garçon, originaire de ce quartier, meurt sur le coup d’un tir à bout portant dans la poitrine. Son pedigree d’ado turbulent, connu des services de police, est vite signalé par les forces de l’ordre. Mais rien n’y fait. L’incendie démarre le soir même. Des commissariats sont attaqués aux mortiers d’artifice. Des centaines de voitures sont brûlées. Trois nuits de violence suivront. Au total: près de 800 millions d’euros de dommages matériels, un millier de blessés et près de 4000 interpellations. Les tribunaux sont mobilisés pour les comparutions immédiates des casseurs. Blick y était. Le policier qui a tiré évoque la légitime défense. Il a été inculpé d'homicide volontaire. L'instruction est toujours en cours.
A Montreuil, le Front populaire
Retour à Montreuil, l’une des plus grandes villes de la banlieue est de Paris. J’y étais durant les nuits d’émeutes des 28 et 29 juin 2023. Le feu brûlait devant la mairie. Les policiers se tenaient à distance, pour éviter les affrontements violents avec les bandes de jeunes casseurs. Plusieurs magasins furent pillés devant mes yeux. Un an après, la ville est calme. C’est elle que les ténors du Nouveau Front Populaire, l’Union de la gauche, ont choisie pour lancer leur campagne électorale éclair pour les législatives. «Envie d’avoir envie» a lancé, lors du meeting refondateur du 17 juin, le député sortant de la Somme François Ruffin, devenu au sein de La France Insoumise l’opposant en chef à Jean-Luc Mélenchon. Montreuil un an après? Les flammes de l’espoir.
Dans les banlieues, l’enjeu électoral
Les banlieues des grandes métropoles ne sont plus, comme dans le passé, le terreau le plus favorable du Rassemblement national. Toutes les études le montrent: la clientèle du RN vit aujourd’hui dans les zones plus périphériques, dans cette France pavillonnaire qui souffre de «déclassement», réel ou ressenti. La bataille des banlieues est menée en priorité par La France Insoumise, le parti de Jean-Luc Mélenchon. C’est dans ces quartiers, où vit la plus grande partie de la communauté musulmane française, que LFI a obtenu ses meilleurs scores lors des récentes élections européennes (9,89% au final, deux points de plus qu’en 2019), en partie grâce à sa campagne de dénonciation du «génocide» commis par Israël à Gaza. Le pouls politique de la France s’affolera-t-il dans ces quartiers, si le RN emporte la majorité absolue à l’Assemblée nationale, le 7 juillet?
La France Insoumise, jusqu’où?
Difficile de dissocier les émeutes de juin 2023 des risques d’émeutes post-dissolution dans la France de 2024. Le scénario du pire est dans de nombreuses têtes, et le ministère de l’Intérieur s’en inquiète ouvertement. Que se passera-t-il si le Rassemblement national l’emporte et revendique le droit de gouverner, alors que l’une de ses propositions phares est l’organisation d’un référendum sur l’immigration? En face, la France Insoumise sait que ses troupes de volontaires sont mobilisées. Les slogans antifascistes ont commencé à refleurir dans ses rangs. Beaucoup d’experts redoutent aussi une brutalité accrue des forces de police face aux émeutiers si Jordan Bardella devient Premier ministre, lui qui a pour priorité de «ramener l’ordre» dans le pays. Un syndicaliste policier, Mathieu Valet, a été élu eurodéputé RN le 9 juin.
JO 2024, le fantôme
Ils ont disparu du radar médiatique, sauf pour les Parisiens qui peuvent de moins en moins circuler facilement dans la capitale, et pour tous ceux qui s’intéressent à la Seine, ce fleuve sur lequel plusieurs répétitions de la cérémonie d’ouverture du 26 juillet ont été annulées, pour cause de débit trop important. La maire de Paris Anne Hidalgo, qui devait s'y baigner le 23 juin pour confirmer que le fleuve sera nageable pour les épreuves des JO, a reporté son essai. Les Jeux Olympiques de 2024 doivent toujours être «la fête de la France» et une «vitrine incomparable» pour reprendre les termes utilisés par Emmanuel Macron. Sauf que la dissolution de l’Assemblée a tout changé. L'heure n'est plus aux Jeux, sauf pour le comité d’organisation et les athlètes. Paris est encore loin de ressembler à Olympie.